Homélies
Liste des Homélies
Année B - 6e dimanche de PÂQUES - (09/05/2021)
(Ac 10, 25-26.34-35.44-48 – Ps 97 – 1 Jn 4, 7-10 – Jn 15, 9-17)
Homélie du F.Jean-Louis
Frères et sœurs,
En écoutant les lectures de cette messe, en particulier les deux dernières lectures, je pense que vous aurez été frappés par la fréquence des mots amour et aimer, sous différentes formes. Une dizaine de fois dans chacune des deux lectures. C’est beaucoup, et le fait que la liturgie de ce dimanche ait mis en écho en quelque sorte, ces deux lectures, signifie que c’est un des messages voulu pour ce 6e dimanche de Pâques.
Certes, il importe de savoir que les mots amour, aimer utilisés ici traduisent un verbe grec qui ne parle pas de l’amour-sentiment. Le philosophe Platon utilisait déjà ce terme pour parler d’amour désintéressé, on a parlé d’amour platonique. Mais les chrétiens ont utilisé ce terme pour parler de l’amour de Dieu envers l’humanité, un amour totalement désintéressé dont Dieu seul est capable mais qu’il peut transmettre à ses disciples par l’Esprit Saint.
Il me semble que les lectures de ce dimanche nous présentent plusieurs aspects de cet amour divin et il me semble que le temps pascal où nous faisons plus particulièrement mémoire de la Résurrection du Christ pour la proclamer au monde est le bon moment pour approfondir l’un ou l’autre sens de cette expression qui nous paraît si, voire trop évidente : « Dieu est amour. »
Les différents dimanches de Pâques comportent comme première lecture les Actes des Apôtres qui racontent les débuts de l’Eglise. Et ce dimanche, nous est racontée la prédication de Pierre au centurion Corneille, un païen (c’est le sens du mot nations ici) ainsi qu’à ses proches. Ce passage des Actes des Apôtres me paraît intéressant pour aborder un des aspects de ce Dieu amour des chrétiens. Parler de l’amour de Dieu est tellement immense, l’Ecriture Sainte peut nous permettre au moins d’en approcher l’un ou l’autre aspects.
Ce passage est assez capital dans l’histoire de l’évangélisation et donc dans l’histoire de l’Eglise. En effet, jusqu’alors, l’évangile n’avait été annoncé et le baptême donné qu’aux juifs ou aux prosélytes, c’est-à-dire aux païens ayant accepté la loi juive dont la circoncision. Et cela semblait évident aux croyants qui accompagnaient Pierre chez Corneille. Ces croyants, nous dit le texte, étaient d’origine juive, tout comme Pierre. Or, voilà que l’impensable se produit : l’Esprit Saint descend sur un centurion païen, un occupant (et l’occupation romaine de la Palestine n’avait rien d’une partie du plaisir, même si le Livre des Actes des Apôtres nous dit un peu avant le passage d’aujourd’hui que Corneille était particulièrement favorable aux Juifs). La famille et les proches de Corneille sont eux aussi l’objet de l’action de l’Esprit. Les compagnons de Pierre sont désemparés et c’est Pierre, dont nous connaissons par ailleurs la fougue et la rapidité de réaction, qui en tire les conclusions.
Il faut dire que Pierre, avant de partir pour rencontrer Corneille, avait eu une vision, lors d’un temps de prière, où il avait vu des animaux de toute espèce, dont des animaux réputés impurs pour les Juifs, et une voix lui avait dit « Offre-les en sacrifice et mange ». Il s’y était refusé ne voulant pas, en bon juif, sacrifier et manger des animaux impurs et la voix divine lui avait répondu : « Ce que Dieu a déclaré pur, toi, ne le déclare pas interdit ». Cette vision lui avait trotté dans la tête et en arrivant chez Corneille, il comprend. Il n’y a pas une nation pure et les autres nations impures. Il comprend que, selon ses mots, « Dieu est impartial : il accueille, quelle que soit la nation, celui qui le craint et dont les œuvres sont justes. » Et pour confirmer ses paroles, l’Esprit Saint se manifeste en descendant de façon très visible sur Corneille et les siens. Stupeur pour les compagnons de Pierre qui se croyaient, comme juifs, privilégiés de Dieu. Ils découvrent cette impartialité de Dieu et se sentent bien obligés d’admettre ces païens au baptême.
Voilà donc un des aspects de l’amour de Dieu et pas le moindre. Lorsque nous aimons, n’avons-nous pas parfois tendance à des préférences, voire des exclusivités ? Or le passage des Actes nous révèle ici que Dieu ne fait pas d’exclusive pour tout homme et toute femme vivant selon sa conscience et recherchant le bien et la justice. Il n’y a pas de passe-droit pour Dieu.
Souvenons-nous de la parabole du pharisien et du publicain, c’est ce dernier qui est justifié alors qu’il se reconnaît pécheur, or le pharisien qui se complaît dans sa perfection, lui, ne l’est pas.
Frères et sœurs, il me semble que nous devons sans cesse nous réinterroger sur Dieu et surtout sur notre vision de Dieu, de son amour. Nous risquons toujours de mettre des barrières voire des obstacles à la grâce de Dieu mais Dieu est souverainement libre et sa grâce dépasse de loin les frontières qu’il nous arrange de lui fixer. Son amour est offert à tous. Il n’y a pas de privilégiés de Dieu ou plutôt tous et toutes sont des privilégiés de Dieu.
Pierre et les siens ont dû renoncer, et c’est heureux pour nous, à la doctrine de l’élection exclusive du peuple juif pour découvrir, mais cela le prophète Isaïe l’avait déjà fait, que l’élection d’Israël était en fait ouverte à l’élection de tous les peuples de la terre. Ainsi l’amour de Dieu n’est pas réservé à quelques privilégiés supposés parfaits. Le Christ l’a lui-même dit : il est venu non pour les bien portants mais pour les malades. Comme chrétiens, comme baptisés, nous ne devons pas considérer Dieu comme obligé envers nous. Il est ouvert à l’humanité tout entière et la moindre parcelle de bonté qui habite même l’être le plus repoussant selon notre point de vue, est l’occasion pour Dieu d’une irruption dans sa vie qui peut changer sa destinée.
Voilà la bonne nouvelle de l’évangile, voilà un des aspects de l’amour de Dieu, cette ouverture sans calcul, sans restriction… Voilà aussi l’invitation qui nous est faite pour notre vie de tous les jours, pour le témoignage de notre foi. Sans doute que cela rendra l’évangile et l’Eglise plus attirants pour nos contemporains. C’est là notre responsabilité. Sachons nous laisser toucher par l’attitude de Pierre.
Frères et sœurs, dans 15 jours, nous célébrerons la Pentecôte, fête du don de l’Esprit et c’est cet Esprit qui seul, peut nous donner d’aimer comme Dieu aime. Préparons-nous à l’accueillir dans un cœur ouvert et disponible à Dieu et aux autres. AMEN
Année B -5° dimanche de Pâques - 2 mai 2021
Ac 9, 26-31 ; 1Jn 3, 18-24 ; Jn 15, 1-8
Homélie du F.Bernard
Si vous possédez un missel, datant déjà de quelques années, vous constaterez que l’Évangile que nous venons d’entendre, commençait par ces mots : A l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père. Et il en était ainsi pratiquement de tous les Évangiles que nous entendrons, le dimanche ou en semaine, jusqu’à l’Ascension et la Pentecôte, tous pratiquement pris dans le discours de Jésus après la Cène en Jn 13-17. Comme si, à mesure qu’approche la fin du temps pascal, la liturgie tenait à se référer le plus étroitement possible à l’heure de la Pâque de Jésus.
Cette heure, nous l’avons célébrée au cours de la Semaine Sainte, non pas comme une heure transitoire, semblable à ces heures qu’indiquent nos montres et nos horloges, mais comme une heure permanente, ayant valeur d’éternité, l’heure du plus grand amour, l’heure des gestes ultimes et des paroles décisives, l’heure où le Maître et Seigneur s’est fait le Serviteur de ses frères, les lavant du bain de la régénération, l’heure où il s’est fait pain partagé pour la vie éternelle, et vin distribué pour le Royaume.
Chaque fois que nous célébrons l’eucharistie, non seulement nous faisons mémoire de l’heure où Jésus est passé de ce monde à son Père, mais nous la rendons présente, car aujourd’hui Jésus continue de passer de ce monde à son Père, en son Corps, dans l’humanité en chemin vers le Père.
Ainsi tout le discours de Jésus après la Cène doit-il toujours s’entendre dans ce contexte du passage de Jésus à son Père. Celui qui s’est fait pain rompu et vin distribué est celui-là même qui ajoute aujourd’hui : Je suis la vraie vigne, non pas le champ de la vigne, le vignoble, mais le cep, le plant de la vigne, à partir duquel la vigne peut se développer : les mots en grec sont différents.
Dimanche dernier, Jésus avait déclaré : Je suis le Bon Pasteur. L’image se comprenait aisément à l’adresse d’un peuple qui n’oubliait pas ses origines pastorales. Il s’agissait d‘écouter la voix du Pasteur, la voix du Maître intérieur, qui nous parle à l’intime de nous-mêmes, de le reconnaître lui comme le Seigneur, à l’instar de Marie-Madeleine, au matin de Pâques, dans le jardin, quand il l’avait appelée par son nom.
Aujourd’hui Jésus déclare : Je suis la vraie vigne. L’image est aussi parlante pour un peuple sédentarisé en région méditerranéenne, dont la félicité pour chacun de ses membres est d’être assis dans sa vigne, sous son figuier, et pour qui, selon le psaume, la mère de famille avec ses enfants est comparée à une vigne féconde (Ps 127,3).
Je suis la vraie vigne, et mon père est le vigneron. Le Père du ciel a donc lui aussi sa vigne. Bien sûr ! Sa vigne, c’est son peuple Israël, le peuple choisi, avec qui il a fait alliance pour toujours. Mais cette vigne n’a pas donné les fruits qu’il en attendait. Alors il a envoyé son Fils pour la régénérer.
Je suis la vraie vigne, et vous êtes les sarments. L’image est très claire. Le sarment, s’il n’est pas relié au cep, s’il ne reçoit pas la sève pour le nourrir, ce n’est plus que du bois mort, tout juste bon à alimenter le feu. Si au contraire il est relié au cep, s’il en reçoit la sève, il peut porter du fruit. Nous de même, si nous sommes reliés vitalement au Christ et demeurons en lui.
Sans moi, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Il se peut que cette phrase dans sa radicalité nous gêne parfois. Nous ne pouvons rien faire par nous-mêmes, rien de bon ? Si certainement, mais rien dans l’ordre de la grâce, dans l’ordre de la relation au Père, de la vie trinitaire : Nul ne va au Père que par moi, nous dit Jésus, et encore : Je suis le chemin vers le Père.
Le sarment ne peut pas porter du fruit, s’il ne demeure dans la vigne. Mais quel est ce fruit ? l’évangile d’aujourd’hui ne le dit pas explicitement. Il faut se référer aux versets qui le suivent immédiatement : Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres (Jn 15, 9 et 12). Le fruit de la vigne, c’est l’amour de charité échangé entre les Personnes divines, communiqué à nous les hommes pour que nous le partagions entre nous.
Nous entendions, à l’instant, en deuxième lecture, la première lettre de saint Jean. Elle ne disait pas autre chose. Elle nous exhortait à avoir foi en Jésus-Christ et à nous aimer les uns les autres.
La sève nourricière qui alimente le sarment et le relie au cep de vigne, nous la recevons dans l’eucharistie. Le sacrement nous est donné pour que nous apprenions à mettre en œuvre l’amour reçu de Dieu non pas avec des paroles et des discours, mais par des actes et en vérité.
Année B - 4e dimanche de Pâques - 24 avril 2021
Act 4 8-12 ; 1 Jn 30 1-2 ; Jn 10 11-18
Homélie du F.Hubert
« J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos :
celles-là aussi, il faut que je les conduise.
Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. »
Jésus est celui qui franchit les frontières – qui les transgresse même.
Il n’y a pas d’enclos qui le retienne.
Dans les évangiles synoptiques, au lendemain de sa journée à Capharnaüm,
il dit à ses disciples : « Allons ailleurs, afin que là aussi je proclame l’Evangile. »
Personne ne peut mettre la main sur lui et sur sa mission.
La première frontière – l’infranchissable – qu’il a franchi,
c’est l’abîme entre sa divinité et notre humanité.
C’est son Incarnation.
Il est descendu, il s’est fait l’un de nous.
Il n’est pas passé par hasard, comme le bon samaritain :
il est venu par décision d’amour.
« Le Verbe était Dieu, le Verbe s’est fait chair. »
Il s’est fait proche, il est venu avec nous, pour que nul ne soit sans lui.
Il a traversé les abîmes : l’abîme du péché, l’abîme de la mort.
Un malfaiteur crucifié a su reconnaître qu’il était là, sur la croix d’à côté…
Il s’est fait pain et coupe,
pour être avec nous au long des âges et en tout lieu.
Rien ne le retient, rien ne l’empêche d’être avec nous,
de rassembler tous les enfants de Dieu dispersés.
Nous, nous ne cessons de construire des murs pour nous protéger,
mettant les autres à distance, et trop souvent en les excluant.
Jésus, lui, ne se protège pas, il risque sa vie pour aller à la rencontre de chacun,
il part à sa recherche : il veut inclure tout être.
Il s’est fait le frère de tous, jusqu’au plus lointain de lui.
« J’ai encore d’autres brebis… celles-là aussi, il faut que je les conduise. »
Le diable divise. Jésus rassemble.
« Ta croix dressée au cœur du temps Montre la voie :
Tu as uni la terre au ciel, et de l’orient à l’occident,
Toi seul rassembles les vivants », chantons-nous à midi en ce Temps pascal.
Jésus rassemble les vivants, au prix de sa croix, au prix de sa vie donnée.
Il va vers les publicains et les pécheurs,
vers les lépreux et les possédés, vers les samaritains et les païens,
tous ces gens qui étaient aux marges, souvent méprisés, voire exclus.
Il passe les frontières.
« Ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi » :
y a-t-il un être que le Père ne lui ait donné ?
Ya –t-il un être pour lequel le Christ ne franchit les frontières, au risque de sa vie, pour qu’il soit avec lui ?
Nous trouvons dans la bouche de Jésus cette affirmation étonnante :
« J’ai le pouvoir de donner ma vie ».
Qui peut donner sa vie, sinon celui qui aime, celui qui est l’Amour ?
Pierre a fait douloureusement l’expérience qu’il n’avait pas ce pouvoir,
lui qui après avoir dit à Jésus : « Je donnerais ma vie pour toi ! » a juré peu après : « Je ne connais pas cet homme. »
Pierre croyait aimer mais il aimait avec ses seules forces.
C’est seulement plus, tard, après avoir reçu l’Esprit d’amour promis, qu’il a donné sa vie,
qu’il a suivi son maître jusqu’au bout.
Donner sa vie, c’est en faire le don :
dans notre souffle ultime et dans le quotidien des jours.
Etre là, avec l’autre, dans sa joie et dans sa souffrance,
dans sa beauté et dans sa part inhumaine, quel que soit son enclos.
Le livre que nous lisons en ce moment en communauté sur les martyrs d’Algérie,
nos frères et sœurs qui aujourd’hui choisissent d’être avec le peuple haïtien
et en bien d’autres lieux, nous montrent le chemin.
Faire don de sa vie à celui qui n’est pas moi, qui est autre, étranger, différent,
et qui est mon frère, ma sœur, enfants d’un même Père
Donner sa vie pour que tous aient la vie.
Le Christ l’a fait une fois pour toutes, et pour tous.
Contemplons le Christ pour apprendre à devenir chrétiens.
Nous sommes tous, chacun pour une part, pasteurs les uns des autres.
Que faisons-nous pour œuvrer au rassemblement des brebis,
qu’elles soient de notre enclos ou d’un autre ?
f. Hubert
Année B -- 3ème dimanche de Pâques - 18 Avril 2021
Actes 3, 13...19; 1Jean 2,1-5a; Luc 24, 35-48
Homélie du F.Damase
La chose la plus surprenante dans cet Évangile, c'est la crainte dont sont saisis les onze Apôtres et leurs compagnons. Peu de temps auparavant, les disciples avaient rencontré Jésus sur le chemin d'Emmaüs et l'avaient reconnu dans la fraction du pain et ils étaient revenus raconter ces choses aux Apôtres. Ceux-ci avaient répondu : "C'est bien vrai ! Le Seigneur est ressuscité, et il est apparu à Simon". Avant cela il y avait eu le témoignage des femmes venues au tombeau le matin de Pâques. Donc tout le monde savait déjà que Jésus était bel et bien ressuscité.
Soudain, alors même qu'ils sont en train de parler ensemble de Jésus, celui-ci apparaît au milieu d'eux et leur dit tout simplement : "La paix soit avec vous." Et cela suffit pour qu'ils soient effrayés et remplis de crainte. Quelle est donc la source de cette crainte ?
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La raison de leur crainte est sans doute que Jésus présent au milieu d'eux est différent de l'image qu'ils se sont faite de lui, et dont ils continuent à parler. Or, le Ressuscité est toujours le même. « C’est bien moi » dit Jésus aux Apôtres ce matin !
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N'y a-t-il pas quelque chose de semblable qui se produit de nos jours dans nos pays occidentaux. Nous parlons de Jésus, comme les Apôtres faisaient entre eux. Peut-être oublions-nous trop facilement que Jésus est autre que toutes les images que nous nous faisons de Lui. Ces images peuvent avoir été utiles, à une certaine époque. Mais ces images ne sont plus une médiation efficace pour une très grande partie des hommes et des femmes de notre temps, qui ne rejettent pas le Christ, même lorsqu'ils ont abandonné la pratique sacramentelle et l'institution ecclésiale.
Il y aurait sans doute lieu d'être beaucoup moins sûrs de tout ce que nous avons à dire sur Jésus et de le laisser se rendre présent au milieu de nous de façon imprévue. Les mains et les pieds qu'il nous montre sont ceux de tous ses frères et sœurs blessés par la guerre et par les kilomètres parcourus lors des migrations. Par la bouche de tous les affamés de la terre, il nous dit et redit sans cesse : "Avez-vous de quoi manger ?".
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C'est ce que nous rappelle saint Jean dans la seconde lecture. Dire de Jésus "je le connais", sans observer le commandement d'amour qu'il nous a donné est un mensonge. Mais si nous observons ce commandement, c'est alors que son amour, c'est-à-dire son esprit, atteint en nous la perfection.
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L’Eglise nous parle beaucoup en ces jours de « Fraternité Universelle » à travers la querelle des vaccins, entre autres –
Il s’agit (nous dit le Pape François), de se défaire de ce faux rêve universaliste qui finit par priver le monde de sa variété colorée, de sa beauté et en définitive de son humanité. En effet, l’avenir ne sera pas monochromatique mais, est possible si nous avons le courage de le regarder dans la variété et la diversité de ce que chacun peut apporter.
Comme notre famille humaine a besoin d’apprendre à vivre ensemble dans l’harmonie et dans la Paix, sans que nous ayons besoin d’être tous pareils ».
Voilà ce à quoi nous invite le Pape François dans Fratelli Tutti (au n°100), ainsi que l’Evangile d’aujourd’hui !
550 mots
Année B - 2ème Dimanche de Pâques - 11-04-2021
Ac 4 32-35 ; 1Jn 5 1-6 ; Jean 20, 19-31
Homelie du F.Vincent
L’évangile, aujourd'hui, nous rapporte deux manifestations de Jésus Ressuscité, à huit jours d'intervalle. Spontanément nous aurions tendance à concentrer notre attention sur la seconde apparition, celle faite à Thomas, parce que nous nous identifions souvent à lui, trouvant bien pratique d'avoir sous la main quelqu'un qui doute, quelqu'un qui a du mal à croire…. trouvant peut-être en lui une sorte de justification à nos propres manques de foi. Mais nos connivences avec Thomas ne doivent pas nous empêcher de lire le texte dans son entier.
Le passage que nous avons ce matin était, (avant que des disciples ajoutent plus tard le chapitre 21), la conclusion de l'évangile, et il se termine par cette expression très forte : "afin que vous croyez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu, et que par votre foi vous ayez la vie en son nom". Le même évangile de Jean commençait par : "Le Verbe était Dieu" et ce terminait donc par : "Jésus est le Fils de Dieu". L'évangile n'est pas un "biographie de Jésus" et encore moins un recueil de belles pensées ou un manuel de morale, l'évangile est un livre choc, écrit tout entier pour que nous recevions en pleine poitrine une révélation stupéfiante : "Je vais vous parler d'un homme, Jésus, qui a vécu il y a deux mille ans en Galilée! Eh bien, cet homme EST le Fils de Dieu, cet homme c’EST Dieu".
C'est ce que dit la dernière phrase entendue aujourd'hui : "Ces signes ont été écrit, c'est pour que vous croyez que Jésus est le Fils de Dieu".
Croire cela, c'est être chrétien. Il y a des millions d'hommes qui croient en Dieu, mais seuls les chrétiens ajoutent à cette foi une affirmation que les juifs et les musulmans n’acceptent pas : Dieu est Père, Fils et Esprit ; et le Fils s'est incarné en Jésus de Nazareth. Ceux qui ont fréquenté Jésus, ses disciples, ses apôtres, se doutaient bien de quelque chose, mais il a fallu la Résurrection pour qu'au nom de tous, Thomas jette ce cri d'amour et d'adoration : "Mon Seigneur et mon Dieu ! "
Mais ce livre, l’évangile, a aussi été écrit pour que "par votre foi vous ayez la vie en son nom". Mais quelle vie ? St Jean tout au long de son évangile nous a parlé de vie éternelle. Le mot est un peu trompeur, on pense à une vie sans fin. C'est vrai mais c'est très insuffisant pour bien voir de quelle vie il s'agit. Ne faut-il pas plutôt penser à un de ces noms de Dieu qu'aime bien certains de nos frères de la Réforme : l’Éternel. La vie qui nous est offerte, c'est la vie de l’Éternel, la vie même de Dieu. Notre foi va jusque-là.
Mais comment cette autre vie que St Jean appelle la vie éternelle se manifeste-t-elle très concrètement dans notre existence de tous les jours ? On peut remarquer chez les vrais croyants, et j’espère chez nous, une certaine manière de juger les gens, les actes, les événements, dans une lumière différente. On peut remarquer chez ces croyants, une espérance que rien ne peut abattre, une paix et une joie qui résistent aux inquiétudes, aux tristesses qui normalement devraient les accabler. C’est cette paix et cette joie que Jésus annonce à ses disciples, ce matin, quand il les retrouve. Mais le plus apparent peut-être, et aussi le plus attirant, c’est ce souci des autres, cette promptitude à rendre service, à s’engager; cette manière d’aimer sans se payer de mots. Ce dont nous parlait la première lecture… et aussi l’évangile du Jeudi Saint.
Cette vie, en un mot c’est la vie chrétienne, si l’on donne à ce mot un peu dévalorisé, toute sa force. une vie donnée par Dieu et nous reliant constamment à Lui ; celle qui faisait dire à St Paul : "pour moi vivre c’est le Christ !"
En ouvrant notre vie à Jésus-Christ, la foi y fait entrer les pensées de Jésus-Christ, ses jugements, sa force, sa manière d’aimer, tout ce que Jean exprime dans ce « comme » : vivre comme le Christ. « L’Évangile nous dit St Jean, a été écrit pour que par votre foi vous ayez la vie ». Croire ne sert à rien, si cela ne nous fait pas bouger. La pire malchance qui puisse arriver à l’Évangile, c’est qu’il soit lu sans que rien ne change dans la vie de celui qui le lit.
Nous devrions entendre cet affectueux reproche de Jésus : « À quoi te sert de croire en moi si tu ne fais pas ce que je te demande ? » Ce que nous dit l’évangile aujourd’hui, au-delà de l’épisode de Thomas, c’est que l’évangile ce n’est pas un livre, mais que l’Évangile, la Bonne Nouvelle, c’est Lui, Jésus.
Année B - Jour de Pâques - 4 avril 2021 -
Actes 10, 34a + 37-43 - Colossiens 3, 1-4 -Jean 20, 1-9
Homélie du F.Basile
Pourquoi chercher le Vivant parmi les morts ? Pourquoi, Marie, t’es-tu levée si tôt pour aller au tombeau chercher celui que ton cœur aime ? On l’avait enlevé ! Pourquoi es-tu allée si vite prévenir Pierre et l’autre disciple, que son corps avait disparu ? Eux aussi sont venus en courant au tombeau le chercher parmi les morts.
Frères et sœurs, au cœur de notre vie chrétienne, il y a cette affirmation de foi bouleversante, incroyable : Il est ressuscité, Il est vivant !
Elle a retenti à Jérusalem au matin de Pâques, il y a près de 2000 ans ; et l’étonnant, c’est qu’elle retentit encore aujourd’hui comme un événement au cœur des communautés chrétiennes, chaque fois qu’elles célèbrent Pâques, chaque fois qu’un membre de plus est baptisé, plongé dans la mort et la résurrection du Christ, chaque fois qu’un frère ou une sœur a fait le grand passage.
Il est ressuscité, Il est vivant ! Quand nous disons cela, nous ne réalisons pas toujours ce qu’il y a derrière, ce que cela devrait transformer dans notre vie. C’est pourquoi il nous est bon de revenir à l’évangile, à celui de ce matin dans st Jean, à celui de cette nuit dans st Marc : « Il est ressuscité, il n’est pas ici ! »
Il faudra du temps, beaucoup de temps aux disciples pour se mettre cela dans la tête et dans le cœur. Vraiment ils n’y étaient pas préparés : ils n’avaient pas encore compris que, selon l’Ecriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.
Cette lenteur à croire, cette résistance de l’esprit à adhérer au mystère du Christ ressuscité, toutes ces difficultés à le reconnaître vivant, qui nous sont rapportées par l’évangile, sont précieuses pour nous. Il faudra aux disciples du temps pour s’habituer à vivre avec un Vivant.
Alors qu’il fait encore nuit, Marie Madeleine s’est rendue au tombeau, elle voit la pierre enlevée ; devant le tombeau vide, elle est comme perdue, ne sachant plus que penser, comme cela arrive quand il prend à l’autre, à celui qu’on aime, de se révéler autre, différent… il n’est plus là où nous le cherchions, il ne se trouve plus là où notre désir l’avait mis une fois pour toutes. A entendre la plainte de Marie, l’urgent pour elle serait de ramener Jésus à sa place, au tombeau ; alors tout rentrerait dans l’ordre. Mais d’abord elle va prévenir Pierre et l’autre disciple. Ce dernier, à son arrivée au tombeau, a tout de suite compris : il voit, il voit les linges bien pliés dans le tombeau vide, il voit et il croit, tandis que Pierre reste perplexe. Marie, elle, est revenue, inconsolable, sa recherche continue, et c’est à elle que sera donné l’inattendu de Pâques. Elle verra le Vivant.
Un vivant, cela surprend toujours, c’est comme un enfant, et cela fatigue les parents. Nous, chrétiens, combien de fois voudrions-nous que Jésus soit un peu moins vivant, un peu moins imprévisible : qu’on sache où il est, une fois pour toutes, et surtout avec qui il est, et avec qui il n’est pas ; qu’on puisse le cerner avec nos formules de foi, qu’il reste le même et ne change pas. Nous oublions que c’est lui qui peut nous changer, parce qu’il est vivant, qui peut nous transformer, nous renouveler dans notre foi. Laissons le Vivant être vivant dans l’Eglise et aussi hors de l’Eglise ; ne l’enfermons pas parmi les morts, dans nos tombeaux, quels qu’ils soient.
Le tombeau est vide une fois pour toutes, il ne faut pas le chercher là.
La réponse est ailleurs : il est dans la communauté des frères, dans la joie de l’Evangile et dans le cœur des nouveaux baptisés, dans l’humble service des autres et la vie donnée sans compter, et bien sûr dans la rencontre personnelle avec le Christ Ressuscité.
Dans la période que nous traversons en ce moment, avec la pandémie qui touche le monde entier et la crise de l’Eglise, nos questions, nos interrogations sont grandes et nous en souffrons tous : où est-il, le Ressuscité ? Puissent notre foi pascale et l’Esprit Saint qui nous sont données aujourd’hui, nous éclairer et nous faire reconnaître le Vivant au milieu de nous, dans l’assemblée des frères qui célèbrent l’eucharistie.
VIGILE PASCALE 03.04.2021
Rm 6, 3-11 ; Mc 16, 1-7
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
Il n’est pas facile de prendre la parole après la profusion de mots entendus, d’images suggérées ou de gestes accomplis ! Faut-il dire quelque chose de plus ? Ou peut-être nous faut-il essayer, comme l’aurait volontiers proposé notre frère Matthieu, de faire avec tous les textes « un collier de perles », un petit collier ! Ces textes sont autant de perles en apparence disparates qui seront davantage mises en valeur par le collier. Quel collier peut les réunir ? Quel fil rouge peut les rassembler ? J’en vois un principal : celui de l’action souveraine de Dieu. En tous ces textes, depuis la Genèse jusqu’à l’évangile, en passant par les prophètes et la lettre aux Romains, est proclamé de manière forte que Dieu conduit profondément la destinée de notre monde vers son accomplissement dans le Christ ressuscité, prémice de notre propre résurrection.
A l’origine, c’est lui qui créé toute chose et qui les fait toutes bonnes, et même « très bonnes » lorsqu’il s’agit de l’être humain. Vers le Mont Moriah, Abraham part confiant dans l’espoir de revenir avec son fils, car il sait que « Dieu saura bien trouver un agneau pour l’holocauste ». Lors du passage de la Mer Rouge, les Egyptiens ont peur car ils reconnaissent avec inquiétude : « Fuyons devant Israël, car c’est le Seigneur qui combat pour eux contre nous ». Epoux de Jérusalem, Dieu qui l’avait abandonnée un court instant, et la ramène dans sa grande tendresse. Il est Celui dont la Parole ne revient sans avoir fait ce qui lui plait. Lui, la Source de la Sagesse, il a confié à Jacob son serviteur, les chemins du savoir. A la recherche de son peuple en exil, Dieu promet de le rassembler et de lui donner un cœur nouveau, et un esprit nouveau pour qu’il marche selon ses lois. Patiente action de Dieu envers son peuple qui culmine dans la mort et la résurrection du Christ. Au tombeau, il agit souverainement et les femmes n’ont rien à faire. La pierre est déjà roulée. Il n’y a plus de corps à embaumer. Jésus est ressuscité. Il précède ses disciples en Galilée. Et aujourd’hui ? Dieu continue d’agir lors du baptême de chaque personne qui est mise au tombeau avec Jésus pour en ressortir vivante d’une vie nouvelle, dans l’attente de sa propre résurrection.
Oui frères et Sœurs, Dieu agit dans notre monde. Si ses chemins ne sont pas nos chemins, notre foi nous fait reconnaitre en Jésus mort et ressuscité, le Chemin, la Vérité et la Vie. En renouvelant maintenant les promesses de notre baptême, et en recevant son Corps et son Sang, offrons-nous à son Esprit de Vie. Dieu fait de nous des instruments de son amour au service de son dessein pour notre histoire.
VENDREDI SAINT 02.04.2021
Is 52, 13 - 53, 12; He 4, 14-16; 5, 7-9; Jn 18, 1 - 19, 42
homélie du Père Abbé Luc
Du long récit de la passion que nous venons d’entendre, nous pourrions retenir deux paroles de Jésus : la première et la dernière. La première « Qui cherchez-vous ? » et « Tout est accompli » …. La question « qui cherchez-vous ? » nous invite à demeurer comme des chercheurs devant la grandeur de ce qui se joue en la passion de Jésus, comme d’ailleurs en toute mort -et nous ne pouvons oublier en ce jour notre frère Matthieu parti cette nuit-. Devant le récit de la passion, nous restons balbutiants, et impuissants à tout comprendre. L’identité de Jésus entrevue demeure en partie voilée, toujours offerte à notre quête. Il est ce roi d’une royauté si paradoxale ! Dans le même temps, la seconde parole « Tout est accompli » nous fait pressentir une plénitude de sens réalisée en cette mort injuste, et si peu banale. Accomplissement d’une vie donnée au service de l’annonce du Royaume, accomplissement des Ecritures, « le livre ouvert à coup de lance » pour reprendre la belle expression d’une hymne. Accomplissement que nous n’avons pas fini d’approcher car il s’agit de la destinée de toute l’humanité. Ce soir cependant, cette parole « tout est accompli » nous permet d’entrer avec plus d’assurance dans la célébration du rite toujours étonnant, de la vénération de la croix. Dans la lumière de la résurrection, nous pouvons confesser que ce morceau de bois infamant est la « croix bienheureuse qui a porté le salut du monde ». En signe de reconnaissance et de gratitude, nous nous prosternerons devant ce bois, devenu le lieu de la victoire de la Vie sur la mort.
JEUDI SAINT - 01.04.2021
Ex 12, 1-8.11-14 ; 1 Co 11,23-26 ; Jn 13, 1-15
Homélie du Père Abbé Luc
« Sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus ayant aimé les siens, les aima jusqu’au bout » …
« Jésus ayant aimé les siens… », cette expression, frères et sœurs, m’a rappelé une expression proche qu’on trouve au début de ce même évangile de Jean, dans le prologue : « Le Verbe était la vraie lumière qui éclaire tout homme en venant dans le monde… Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu… ». Les siens qui ne reçoivent pas, les siens aimés jusqu’au bout… D’un côté, St Jean nous donne à contempler le Verbe qui était auprès de Dieu et qui est venu chez les siens, les hommes qu’il a créés, et de l’autre St Jean nous montre Jésus, à l’heure où il va vers son Père, prendre le tablier de serviteur pour laver les pieds des siens. Le rapprochement entre ces deux passages nous fait saisir la profonde unité de la mission du Verbe fait chair, le Fils sorti du Père. Venu chez les siens qui sont nés de son dessein créateur, il est venu les aimer et les aimer jusqu’au bout alors qu’il n’est pas bien reçu par eux… Lui qui « porte l’univers par sa parole puissante » (He 1, 3) se met aux pieds des hommes, « les siens », pour les laver, pour les restaurer dans leur dignité. Jésus s’abaisse. Avec ses mains, entre lesquelles « le Père a tout remis », il purifie les pieds, mais aussi les mains et la tête, finalement tout l’être humain. Geste symbolique qui unit Dieu à l’homme sorti de ses mains et l’homme à son Dieu qui le restaure aujourd’hui. Oui en cette célébration mémorial, il nous est proposé, d’entrer avec Pierre dans un lâcher prise, pour laisser Jésus réaliser aujourd’hui l’œuvre de purification qu’il a opéré hier pour l’humanité et qu’il veut poursuivre jusqu’à la fin des temps. Laissons-nous servir par lui et rassasier de son corps livré et de son sang versé, par lequel Jésus nous purifie du péché et du mal. Laissons-nous régénérer et fortifier. Durant les trois jours qui nous séparent de Pâques, nous est proposé de nous laisser transformer par l’Esprit agissant à travers la liturgie, les paroles, les gestes, les chants, le silence. Donnons du temps pour Dieu dans la prière, goûtons par la méditation ce grand mystère. Il contient une lumière profonde que les yeux de la foi nous donnent d’entrevoir, nous qui avons la grâce d’être comptés parmi les siens.
Geste symbolique de Jésus, mais aussi geste prophétique. Lorsque Jésus lave les pieds des disciples, il leur laisse un exemple. « Si moi, le Seigneur et le Maitre, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous lavez les pieds les uns aux autres ». Jésus pose le geste prophétique d’une humanité fraternelle. De proche en proche, celle-ci peut vivre non plus sur le registre de la domination du plus fort sur le faible, mais sous la loi du service où le fort se met aux pieds du plus faible. Humblement, Jésus conteste toutes les représentations spontanées que nous avons de nos relations humaines, envisagées en bonne part sur le mode de la comparaison et de la concurrence. Ses mains liées sur la croix seront le dernier acte de son geste contestataire que sa résurrection confirmera. Ce n’est pas la force qui aura le dernier mot, mais l’amour offert. Ce geste prophétique de Jésus est une bonne nouvelle pour notre monde autant que pour nous ses disciples. Notre monde n’est pas appelé à être un éternel champ de bataille et de compétition. Sa vraie finalité est de permettre à tous de trouver leur place, car chacun est aimé et a du prix aux yeux de Dieu. Le geste prophétique de Jésus, laissé à ses disciples et à son Eglise, agit comme un levier, comme un ferment pour notre monde, dans la mesure où nous acceptons d’entrer nous aussi dans le don de nous-mêmes. Rien de spectaculaire, rien de clinquant dans ce don. Pas même la recherche de la réussite, mais l’humble consentement à entrer ici et maintenant dans le service demandé. Laisser le geste prophétique de Jésus animer vraiment notre vie ne nous laissera jamais quitte. Le don de soi est toujours devant nous. Le jour, où nous estimons avoir assez donné, nous sommes déjà morts. Jusqu’à notre dernier souffle, comme Jésus sur la croix, nous sommes appelés à nous donner, et d’une manière qui nous échappera toujours en bonne partie. Se donner ne se mesure pas aux efforts déployés ou à l’envergure de l’énergie dépensée, autrement les plus faibles, les malades ou les personnes âgées seraient disqualifiées. Non le don auquel appelle Jésus, est d’abord affaire d’attention du cœur, de disponibilité, et d’oubli de soi vécus aussi bien dans la vigueur de l’action que dans l’offrande obscure ou dans la prière cachée.
En rendant grâce ce soir pour le don parfait de Jésus, qui nous ouvre le chemin de la vraie vie, dès aujourd’hui et pour l’éternité, laissons Jésus nous sauver de nos égoïsmes et nous apprendre le don de nous-même.
RAMEAUX - 28.03.2021
Is 50, 4-7 ; Ph 2, 6-11 ; Mc 14,1 – 15, 47
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et Sœurs
Chaque année, lorsque nous entendons ce récit de la passion du Seigneur Jésus, sont offertes à notre contemplation la face sombre et la face lumineuse de notre humanité. La face sombre des lâchetés des disciples, la face sombre de la cruauté des soldats qui se moquent, frappent, la face sombre des pouvoirs en place qui ne peuvent se remettre en cause. Et sur le visage défiguré de Jésus, silencieux, abandonné de tous, seul dans la tourmente apparait la face lumineuse de notre humanité. Rien d’attirant, rien de séduisant…Sur ce visage cependant brille beaucoup de dignité, la dignité d’un homme debout qui ne donne pas prise à la haine, ni même à l’indignation. « Je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient ». Comme une éponge, Jésus absorbe le mal qui se rue sur lui. Il l’absorbe et le transforme en amour. Il prend sur lui le mal et le péché sous toutes leurs formes pour en délivrer ceux qui les commettent. Sa confiance est ancrée en son Père qui l’a envoyé. « Le Seigneur vient à mon secours. Je sais que je ne serai pas confondu »…
Frères et sœurs, tout au long de cette semaine sainte, contemplons Jésus. Il nous sauve du péché qui nous défigure. Apprenons de lui et recevons de Lui notre vrai visage humain.