Homélies
Liste des Homélies
B - 29juin 2021 -Solennité des saints Pierre et Paul,
Ac 12 1-11 ; 2 Tim 4 6-8, 17-18 ; Mt 16 13-19
Homélie du F.Bernard
La liturgie célèbre rarement deux saints ensemble. Elle ne le fait en principe que lorsque ces deux saints ont eu un parcours de vie très semblable, en sorte que spontanément nous les associons. Ainsi Cyrille et Méthode, ces deux frères qui ensemble ont évangélisé la Moravie, ou encore les deux frères médecins, Côme et Damien, ou encore les deux apôtres Philippe et Jacques le mineur, dont nous ne savons pas grand-chose.
Mais Pierre et Paul… Apparemment tout les distingue. Pierre a été appelé au début du ministère de Jésus, et Paul ne l’a pas connu selon la chair (2 Cor 5,16). Pierre est le premier à avoir confessé la foi au Christ, au nom des Douze, et Paul a d’abord persécuté l’Église. Pierre s’est adressé avant tout aux fils d’Israël, et Paul a fait connaître aux nations l’Évangile du salut. Pierre, plus porté à s’adapter aux personnes, aux circonstances, Paul, plus intransigeant dans sa ligne de conduite doctrinale.
On pourrait continuer à les distinguer, voire les opposer. Mais le plus important est de se rappeler, à leur propos, cette parole de l’Apôtre : Il y a dans l’Église, diversité de dons spirituels, mais c’est le même Esprit ; diversité de ministères, mais c’est le même Seigneur ; diversité d’opérations, mais c’est le même Dieu qui opère tout en tous (1 Cor 12, 4-6).
Pierre et Paul se sont croisés à plusieurs reprises, à Jérusalem, à Antioche, peut-être à Corinthe, à Rome. Avec des tempéraments et des parcours si différents, il était inévitable qu’ils fussent parfois en désaccord, même gravement. On sait qu’à Antioche, Paul a reproché à Pierre d’avoir dissimulé sa foi chrétienne derrière son appartenance juive, de n’avoir pas marché droit selon la vérité de l’Évangile (Gal 2,14) : reproche grave, très grave certes. Mais peut-être les tergiversations de Pierre ont elles pondéré les intransigeances doctrinales de Paul qui auraient pu entraîner l’Église primitive dans un schisme entre judéo-chrétiens et pagano-chrétiens ?
Mais l’essentiel est ailleurs, dans le fait que leur parcours à l’un et à l’autre a abouti à Rome, où il aura été donné à l’un et à l’autre d’y donner le témoignage suprême du martyre. Ainsi ont-ils été unis définitivement dans cette charité, cet Amour de Dieu, qu’ils voulaient annoncer l’un et l’autre.
Avec le martyre, c’est leur complémentarité même dans le ministère, celui de l’institution et celui du charisme, qui nous les fait rassembler conjointement en ce jour, comme les deux colonnes de l’Église, cette Église de Rome, chargée de présider à la charité sur toutes les églises, et de reconnaître la diversité des esprits venant de dieu, en vue de concourir à l’unité.
En ce jour nous prenons dans notre prière les cent trente prêtres qui ont été ordonnés ces derniers jours en France. Qu’ils soient dans la diversité des ministères qui leur seront confiés de vrais témoins fidèles de Jésus-Christ !
Année B - Dimanche 20 juin 2021 –12e dimanche ordinaire
Job 38, 1.8-11; Psaume 106; 2 Co 5, 14-17; Marc 4, 35-41
Homélie du F.Damase
Rembrandt avait 27 ans quand il a peint en 1633, son unique marine. Elle représente cette scène du Christ dans la tempête. On y voit Jésus et ses disciples, dans un bateau dressé sur une mer en furie, debout comme un cheval qui se cabre.
Pas de meilleure façon d’entrer dans ce récit que de nous demander ce que nous aurions fait, embarqués ce soir-là avec eux, perdus au milieu de l’abîme. Réveille-toi, Seigneur, Pourquoi dors-tu ?
Qui de nous, Frères et Sœurs, à l’heure de l’épreuve, n’a pas crié vers Dieu sa détresse, sa révolte ? Qui n’a pas connu aussi cette étrange paix qui vient après l’épreuve, et parfois plus étrangement, qui vient pendant l’épreuve et la résout mystérieusement ? Le vent tomba et il se fit un grand calme.
Ce grand calme, cette nuit-là, c’est Jésus dans la barque, qui se réveille, se lève, menace le vent, dompte la mer et à l’heure des ténèbres, franchit l’abîme et passe de l’autre côté de la mer. De quel sommeil Jésus dort-il ? Pour quel passage ?
Il est clair que ce récit préfigure la passion du Christ, quand Jésus s’endormira dans la mort, et se réveillera au matin de Pâques, Homme debout, vainqueur de l’abîme. Comment quelqu’un qui dort, comment quelqu’un qui meurt peut-il nous sauver ?
Même énigme pour les disciples et pour nous. C’est bien notre foi au Christ mort et ressuscité, que ce récit interroge. Notre foi, frères et sœurs, court toujours le risque de rêver d’un Dieu qui écarterait devant nous les obstacles, nous épargnerait l’épreuve. Ce n’est pas le choix de Dieu. Jésus n’a pas évité le combat, allant même au-devant de sa propre mort, comme ce soir-là, il va au-devant de la mer à l’heure la plus difficile.
Non, Jésus n’a pas contourné l’obstacle, la mort il l’a traversée comme il a traversé la mer. Et nous, ce n’est pas en abandonnant Jésus, en quittant la barque que nous pourrons être sauvés mais en liant notre destin au sien, en demeurant avec Jésus dans la barque. Le pire danger ce n’est pas la tempête, c’est de ne pas être avec Jésus dans la tempête, ce n’est pas l’épreuve, c’est de ne pas être avec Jésus dans l’épreuve.
Quand Marc rédige son évangile, dans les années 60-70, l’église de Rome est persécutée et on peut penser qu’il veut par ce récit l’encourager dans l’épreuve, l’appeler à mettre sa confiance dans son Seigneur ressuscité. La barque de l’église aujourd’hui semble tout autant menacée et nous chrétiens, nous nous sentons souvent cruellement faibles.
Réentendons la question du Christ : Pourquoi avez-vous peur ? N’avez-vous pas encore la foi ? Non pas Pourquoi n’avez-vous pas la foi ? Mais pourquoi n’avez-vous pas encore la foi ? PAS ENCORE. Magnifique expression qui nous donne notre chance, qui nous donne de la marge, qui laisse place pour nous A TOUS LES POSSIBLES ET LIBERE NOTRE DESIR d’embarquer avec Jésus, de passer avec lui sur l’autre rive, vers notre port d’attache, puisqu’Il le veut et puisqu’Il est avec nous. Sur son ordre, passons avec Lui, trépassons avec Lui, le Christ, notre Pâque. Sans rien craindre. Puisque sa Présence, seule, dans les intempéries de nos vies et celles de l’histoire, puisque sa présence est le lest, la sécurité, ici-bas, de notre traversée.
552 mots
B - 11° dimanche Ordinaire - 13 juin 2021
Ez 17 22-24 ; Co 5 6-10 ; Mc 4 26-34
Homélie du F.Vincent
Le Seigneur aujourd’hui nous parle du Règne de Dieu et il nous en parle en paraboles.
La première des deux paraboles, qui nous est racontée ce matin, nous montre un homme qui jette en terre la semence… Qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit jusqu’à la moisson. On pourrait dire de façon un peu triviale : « Patience, ne nous affolons pas ! » Si nous, nous vivons dans le temps, avec ces alternances, le Règne de Dieu, lui, ne connait pas ce rythme : c’est sans cesse qu’il est à l’œuvre. Et donc, l’installation du règne en nous et autour de nous, n’est pas d’abord le fruit de nos efforts, C’est celui d’une parole jetée en terre, dite dans le monde, parole qui continue d’agir et de faire agir. Et puisque c’est Dieu qui donne la croissance, notre action doit d’abord être celle de la confiance, de l’abandon et de la foi. Foi et confiance, parce que comme le dit la parabole, les semailles aboutiront à la moisson, le Règne parviendra à maturité ! Bien souvent, nous nous interrogeons sur l’état de notre monde, l’état de notre Église ou même l’état de notre vie, mais nous oublions peut-être un peu rapidement que nous n’en sommes encore qu’au temps des semailles, au temps de la lente croissance et nous ne pouvons donc pas encore estimer la moisson. Par contre ce qui doit nous aider à vivre, et à agir, c’est que la moisson est sûre et certaine. Ainsi, que nous dormions ou que nous nous levions, le Règne de Dieu est là dans nos vies et s’y développe.
Ce Règne, qui est tout proche, il ne s’abat pas sur nous comme un jugement, comme une fin du monde, Cette présence du règne de Dieu, n’est pas plus éclatante que cette naissance dans une étable, que ce corps meurtri sur une croix, que ce tombeau retrouvé vide par un petit groupe de femmes. Non, Dieu entre dans nos vies, dans notre temps, dans notre croissance, avec respect, avec patience, avec confiance.
Cette parabole n’a pas pour but de nous dire comment nous devons faire pour accueillir le Royaume mais plutôt comment ce Royaume agit, grandit en nous. Et peut- être, aussi que c’est en prenant le temps de nous mettre à l’écoute de l’œuvre de Dieu en nous et autour de nous, que nous accueillerons davantage cette croissance, ce dynamisme qui nous conduiront de l’herbe à l’épi avec du blé plein l’épi.
Dans la seconde parabole, il n’y a, là encore, rien d’éclatant dans cette graine de moutarde, la plus petite de toutes les semences, « elle est si petite ! » Mais un nouvelle fois, Jésus nous appelle à nous en remettre à cette force de croissance qui nous échappe et qui nous dépasse. Là où, dans la 1ère parabole, la semence poussait dans le temps, cette fois-ci c’est l’espace qui est pris dans cette dynamique du règne : cette plante née de la plus petite de toutes les semences, étend de longues branches si bien que les oiseaux du ciel peuvent faire leurs nids à son ombre. Cette image fait référence à la prophétie d’Ezéchiel que nous avons entendue en première lecture : l’arbre où les oiseaux font leur nid, c’est le roi qui guide et protège son peuple. Ainsi, à partir d’une simple graine de moutarde, Jésus annonce l’accomplissement de la promesse, la certitude que Dieu mène à son achèvement ce qu’il a commencé, et bien au-delà de ce à quoi nous nous attendions !
Cette semence, c’est la Parole de Dieu qui nous rejoint dans nos vies et qui frappe à notre porte pour transformer nos cœurs.
Cette semence, c’est tous ces petits gestes du quotidien qui font l’histoire de nos vies.
Cette semence, enfin, c’est aussi notre prière, notre humble prière ici, et qui pourtant franchit les frontières, que nous dormions ou que nous nous levions.
Et finalement, croyons-le, espérons-le, voulons-le, cette semence c’est notre parole, notre façon d’être à chacun d’entre nous, habités, animés par la puissance d’un amour : aimés de Dieu, aimés en Dieu.
(Sources diverses)
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B - SACRE-CŒUR - 21-06-2021 - f. Hubert
Os 11 1-4 ; Ep 3 8-12 - Jn 19 31-37
Homélie du F. Prieur Hubert
Le premier chapitre du dernier livre de notre f. Ghislain a pour titre :
« L’amour désarmé ». C’est à la lumière de ces deux mots que je voudrais contempler le Christ, offert à nos regards aujourd’hui sur la croix.
Quand il vient à nous, Dieu vient, fragile, sans rien pour le défendre, le protéger, sinon les bras de Marie et de Joseph ; il vient désarmé, posé dans une mangeoire, comme du pain à manger pour donner la vie, à Bethléem, la « maison du pain ».
Il est Dieu, livré aux mains des hommes qui lui « ont fait tout ce qu’ils ont voulu » ;
devant Pilate, il est silencieux, ne cherchant pas à se défendre ;
et, nu sur la croix, sans plus personne pour le protéger, il est Dieu, désarmé,
exposé pour toujours au rejet et à la violence :
il les assume sans les rendre.
Jésus, Dieu, jeté hors de la terre et du ciel,
continuant de donner la paix et la bénédiction.
« Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils sont transpercé » :
Nous l’avons transpercé.
Nous l’avons transpercé d’un coup de lance, sur sa croix ;
nous l’avons transpercé en toute femme, en tout homme, en tout enfant, méprisé,
agressé, tué, de génération en génération, en quelque lieu que ce soit.
Nous le transperçons en tous ceux qui sont exclus de notre abondance.
Nous l’avons transpercé, et le transperçons encore, et nous devrions en être condamnés.
Notre délivrance, la délivrance du monde,
c’est que son amour est tel qu’il nous aime encore, jusque dans notre rejet.
Il nous attire à lui et nous revêt de sa bénédiction.
« Quand je serai élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. »
De son cœur ouvert, jaillit l’eau vive qui nous lave et nous désaltère.
De son cœur ouvert, jaillit le sang qui nous donne vie,
le sang de l’alliance qui fait de nous tous un seul corps avec lui.
De son cœur ouvert il fait notre refuge.
Vais-je les livrer au châtiment ? dit Dieu.
Non ! Mon cœur se retourne contre moi ; mes entrailles frémissent.
Je n’agirai pas selon l’ardeur de ma colère, je ne détruirai plus Israël,
car moi, je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu saint,
et je ne viens pas pour exterminer.
Seigneur Jésus, que ton amour nous désarme, dans nos cœurs et nos esprits,
pour t’accueillir toi, pour accueillir nos frères et sœurs, dans leurs diversité,
leurs richesses et leurs pauvretés, leurs agressivités.
Si ton Cœur ouvert fait de nous un seul corps avec toi,
allons-nous prendre les armes pour nous défendre ?
Cœur plus humain
Que fut jamais le cœur
D'un enfant de la terre,
Cœur plus ouvert
Qu'un ciel à l'infini,
Une mer sans rivage,
Tu t'es livré
De pleine grâce
Au repas de la Pâque.
L'Esprit, le sang et l'eau
Sont témoins de ton alliance d'amour.
Viens élargir en nous
La mesure et l'horizon de l'amour.
Dans la foi, donnons au Christ d’habiter dans nos cœurs,
pour que nous comprenions quelle est la largeur, la longueur,
la hauteur et la profondeur de l’Amour.
« Regardons celui que nous avons transpercé : approchons-nous du cœur de Dieu. »
Fête du Corps et du Sang du Christ - 6 juin 2021 Année B -
Exode 24, 3-8 / ps 115 ; Hébreux 9, 11-15 ; Marc 14, 12-16 + 22-26
Homélie du F.Basile
Frères et Sœurs, pourquoi fêter l’Eucharistie aujourd’hui d’une manière toute spéciale ? Nous la célébrons chaque dimanche, chaque jour même, mais cela nous renvoie toujours au premier jour, au jeudi saint, où Jésus, la veille de sa passion et de sa mort, accomplit ce geste et le confie à ses disciples, pendant le dernier repas qu’il prend avec eux. Dans l’évangile de Marc qui vient d’être proclamé, le commandement de le faire en mémoire de Lui, n’est même pas mentionné. Mais le geste et le sens que Jésus lui donne est très fort : en prenant le pain et en le partageant, il dit ‘Ceci est mon corps' ; en prenant la coupe et en la leur donnant, il dit ‘Ceci est mon sang, le sang de l’Alliance, versé pour la multitude’ ; ce geste et ces mots sont si forts que cela deviendra le sacrement par excellence, signe donné une fois pour toutes, mais qui rendra présente, à toutes les générations à venir, la Pâque du Christ, le sacrifice de sa vie, le mystère de sa mort et de sa Résurrection, le sacrement de la nouvelle Alliance entre Dieu et les hommes.
Quel mystère et qui peut le comprendre ? Nos cœurs s’étonnent et voudraient mieux comprendre, chantons-nous dans une hymne du jeudi saint. Concrètement, à quel âge l’enfant peut-il faire sa première communion ? Dans une homélie, Christian de Chergé, le prieur des moines de Tibhirine en Algérie, rappelait qu’il l’avait faite à l’âge de 5 ans, malgré les réserves de son père, et sa mère disait : Il comprendra plus tard. Au lycée, Christian disait encore à son aumônier qu’il ne comprenait pas la messe. Et nous-mêmes, que dirions-nous ? Or Christian nous révèle ensuite qu’il a été conduit au cœur du mystère eucharistique par un musulman. Il commence à le comprendre vraiment par le don que son ami Mohamed a fait de sa vie pour lui, Christian : un événement qui l’a bouleversé et dont il fera souvent mémoire.
Pour nous, il est toujours bon de revenir au sens que Jésus donne à ce dernier repas ; à la messe nous refaisons le geste du Christ qui donne sens à l’offrande de sa vie. « Chaque eucharistie, disait Christian de Chergé, me le rend infiniment présent, dans la réalité de son Corps de gloire, où le don de sa vie a pris toute sa dimension pour moi et pour la multitude. », « pour moi et pour tous » dirait notre frère Ghislain.
Sang versé pour la multitude : la lettre aux Hébreux, 2° lecture, met en valeur le sang du Christ qui fait pour nous bien davantage que tous les sacrifices compliqués de la 1° alliance ; son propre sang nous purifie de tous nos actes de mort et nous permet de célébrer le Dieu vivant. Dans la 1° lecture, tirée de l’Exode, il nous a été rappelé l’alliance au Sinaï avec Moïse, la 1° alliance, et ce rapprochement est saisissant : car il s’agit bien d’un engagement pour la vie, d’un acte d’alliance avec Dieu, conclu par le sang répandu, et le sang, c’est la vie. Moïse, après avoir aspergé l’autel, asperge le peuple avec le même sang ; et il relie cela aux 10 commandements reçus et à l’engagement pris à les respecter : c’est une question de vie ou de mort.
Alors comment ne pas faire le lien avec le commandement nouveau de l’amour, que Jésus nous donne, et qui dans l’évangile de Jean prend justement la place de l’Eucharistie ? Jésus commence par laver les pieds de ses disciples. ‘Comprenez-vous ce que je fais ?’ leur demande Jésus. ‘Ce que j’ai fait, faites-le vous aussi.’ ‘Comme je vous ai aimés, vous devez vous aimer les uns les autres.’
Tout est donné, tout est lié. Dès lors, communier au Corps et au Sang du Christ, devient un geste d’amour qui nous engage : en devenant nous-mêmes le Corps du Christ, nous entrons dans le grand mouvement de charité qui a conduit le Christ à donner sa vie totalement ; avec lui nous communions à la volonté du Père, avec lui nous sommes unis à tous ceux qui peinent et qui offrent leur vie aujourd’hui. Le Christ est bien l’aîné d’une multitude de frères et l’Eucharistie nous met en communion avec tous.
F et S, c’est bien dommage que nous ne puissions plus actuellement communier au Sang du Christ d’une manière ou d’une autre, en raison des mesures sanitaires qui nous sont imposées. J’espère que bientôt nous pourrons le faire à nouveau.
Pour finir je voudrais citer une page brûlante du patriarche Athénagoras, et cela nous relie à toutes les Eglises d’Orient.
« L’Eucharistie, disait-il, déjà secrètement illumine le monde ; l’homme y retrouve sa filiation perdue et puise sa vie dans celle du Christ, l’ami secret qui partage avec lui le pain de la nécessité et le vin de la fête.
Le pain est son corps, et le vin est son sang, et dans cette unité plus rien ne nous sépare de rien ni de personne. Que peut-il y avoir de plus grand ? C’est la joie de Pâques, la joie de la transfiguration de l’univers. Désormais tout a un sens.
Et toi aussi, tu as un sens. Tu ne mourras pas. Même la souffrance, même la mort ont un sens et deviennent les chemins de la vie.
Il existe ici-bas un lieu où il n’y a plus de séparation, où il y a seulement le grand amour, la grande joie.
Ce lieu, c’est le saint Calice au cœur de l’Eglise. Et par là dans ton cœur… Voilà ce que devrait être le culte ! » Amen
(extrait des ‘Dialogues avec le Patriarche Athénagoras’
d’Olivier Clément page 276 sv)
Année B - PENTECÔTE -23 MAI 2021
Ac 2, 1-11; Ga 5, 16-25 ; Jn 15, 26...16,15
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et Sœurs, un mot revient plusieurs fois dans les textes entendus, c’est le mot « conduire ». Paul invite ses interlocuteurs les Galates, à « se laisser conduire par l’Esprit », ou « à marcher sous la conduite de l’Esprit Saint ». Et Jésus lui-même nous promet que l’Esprit Saint nous « conduira dans la vérité tout entière » … Qu’est-ce que cela veut dire : se laisser conduire par l’Esprit Saint ? Et qui est-il Celui-là sous la conduite duquel nous sommes conviés à marcher ?
Qui est-il ? Dans la première lecture, l’Esprit Saint se présente comme une force, sous l’image d’un fort vent violent et de flammes de feu donnés aux Apôtres. Loin d’effrayer ou de terroriser, il donne de l’assurance aux Douze apôtres pour aller à la rencontre des étrangers présents à Jérusalem en parlant leur langue… L’Esprit Saint se révèle alors comme une force irrésistible d’amour qui tourne vers les autres, une force puissante de communion. Il relie les hommes là tant de barrières culturelles ou sociales pourraient les séparer. Que veut-dire alors nous laisser conduire par l’Esprit Saint ? N’est-ce pas nous laisser entrainer à aller à la rencontre de l’autre, à apprendre son langage, à entrer dans son monde de pensée pour tisser un lien de solidarité, de communion, et avec des mots ou simplement par notre présence témoigner de l’Amour qui nous fait vivre… ?
Qui est-il encore l’Esprit Saint ? St Paul nous le fait découvrir à travers ce qu’il produit en nous. Il affirme ainsi que « le fruit de l’Esprit » est « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maitrise de soi » … Pour prendre une image chimique, l’Esprit Saint est un « principe très actif » dans nos existences. Allons-nous le laisser agir ? Paul nous rappelle que les choses peuvent être parfois difficiles. Il y a en nous un combat, « un affrontement » entre deux tendances, celles de la chair et celle d’Esprit. Face aux tendances de la chair, laissée à elle-même, qui nous tire vers le bas, vers la division, la jouissance égoïste ou encore la haine, se joue un combat dans lequel l’Esprit Saint se manifeste comme notre « défenseur ». Là où les tendances de la chair entrainent à un repli sur soi, à la violence, et à des addictions mortifères, l’Esprit nous montre un chemin d’unification, de paix et de maitrise de soi. Entre les deux tendances, notre expérience humaine nous montre un jour ou l’autre que le combat peut être sévère. Laissés à nos seules forces nous risquons souvent de céder aux forces négatives et, à la longue, destructrices. Nous laisser conduire par l’Esprit va prendre alors la forme d’un apprentissage au gré de la vie quotidienne. A travers la prière qui permet de faire le point sous le regard de Dieu, à travers la rencontre avec quelqu’un avec qui on peut parler en vérité, à travers la méditation de la Bible qui nous redonne le cap, à travers les sacrements vécus en Eglise qui nous donnent la force, peu à peu notre désir devient plus vif et plus attentif. Peu à peu, nous apprenons à discerner les voies qui sont des impasses, et nous demandons à l’Esprit Saint sa force, sa lumière pour vivre selon son vouloir très bon pour l’homme...
Qui est-il encore l’Esprit Saint ? Jésus nous dit qu’il est celui qui nous conduira à la vérité tout entière… L’Esprit Saint est en nous comme un veilleur, comme un éveilleur qui nous incline à toujours chercher la Vérité. Notre foi est une lumière forte. En elle, nous regardons notre monde comme porté par les mains de Dieu et promis à la Vie avec Lui. Depuis la mort et la Résurrection de Jésus, nous croyons que tous les hommes sont aimés et sauvés des liens du mal et de la mort. Nous croyons, et nous continuons de chercher pour mieux comprendre ce que cela veut dire… Nous laisser conduire par l’Esprit Saint vers la Vérité tout entière, n’est-ce pas approfondir toujours la vérité de Dieu et de son mystère, mais aussi celle de son projet pour tous les hommes ? N’est-ce pas accepter de rester toujours ouvert, pour nous laisser surprendre ? Attitude d’ouverture confiante vis-à-vis de Dieu, et attitude d’ouverture bienveillante vis-à-vis de tout homme, temple de sa Présence… Les recherches actuelles vécues dans le dialogue interreligieux ou dans la quête de la fraternité universelle voulue par le pape François, sont des lieux à travers lesquels l’Esprit Saint nous conduit vers la Vérité toute entière.
Frères et Sœurs, rendons grâce en cette célébration d’être placés sous la bonne garde de l’Esprit Saint. Et unis à Jésus, offrons-nous davantage à son œuvre d’amour.
Année B - 6e dimanche de PÂQUES - (09/05/2021)
(Ac 10, 25-26.34-35.44-48 – Ps 97 – 1 Jn 4, 7-10 – Jn 15, 9-17)
Homélie du F.Jean-Louis
Frères et sœurs,
En écoutant les lectures de cette messe, en particulier les deux dernières lectures, je pense que vous aurez été frappés par la fréquence des mots amour et aimer, sous différentes formes. Une dizaine de fois dans chacune des deux lectures. C’est beaucoup, et le fait que la liturgie de ce dimanche ait mis en écho en quelque sorte, ces deux lectures, signifie que c’est un des messages voulu pour ce 6e dimanche de Pâques.
Certes, il importe de savoir que les mots amour, aimer utilisés ici traduisent un verbe grec qui ne parle pas de l’amour-sentiment. Le philosophe Platon utilisait déjà ce terme pour parler d’amour désintéressé, on a parlé d’amour platonique. Mais les chrétiens ont utilisé ce terme pour parler de l’amour de Dieu envers l’humanité, un amour totalement désintéressé dont Dieu seul est capable mais qu’il peut transmettre à ses disciples par l’Esprit Saint.
Il me semble que les lectures de ce dimanche nous présentent plusieurs aspects de cet amour divin et il me semble que le temps pascal où nous faisons plus particulièrement mémoire de la Résurrection du Christ pour la proclamer au monde est le bon moment pour approfondir l’un ou l’autre sens de cette expression qui nous paraît si, voire trop évidente : « Dieu est amour. »
Les différents dimanches de Pâques comportent comme première lecture les Actes des Apôtres qui racontent les débuts de l’Eglise. Et ce dimanche, nous est racontée la prédication de Pierre au centurion Corneille, un païen (c’est le sens du mot nations ici) ainsi qu’à ses proches. Ce passage des Actes des Apôtres me paraît intéressant pour aborder un des aspects de ce Dieu amour des chrétiens. Parler de l’amour de Dieu est tellement immense, l’Ecriture Sainte peut nous permettre au moins d’en approcher l’un ou l’autre aspects.
Ce passage est assez capital dans l’histoire de l’évangélisation et donc dans l’histoire de l’Eglise. En effet, jusqu’alors, l’évangile n’avait été annoncé et le baptême donné qu’aux juifs ou aux prosélytes, c’est-à-dire aux païens ayant accepté la loi juive dont la circoncision. Et cela semblait évident aux croyants qui accompagnaient Pierre chez Corneille. Ces croyants, nous dit le texte, étaient d’origine juive, tout comme Pierre. Or, voilà que l’impensable se produit : l’Esprit Saint descend sur un centurion païen, un occupant (et l’occupation romaine de la Palestine n’avait rien d’une partie du plaisir, même si le Livre des Actes des Apôtres nous dit un peu avant le passage d’aujourd’hui que Corneille était particulièrement favorable aux Juifs). La famille et les proches de Corneille sont eux aussi l’objet de l’action de l’Esprit. Les compagnons de Pierre sont désemparés et c’est Pierre, dont nous connaissons par ailleurs la fougue et la rapidité de réaction, qui en tire les conclusions.
Il faut dire que Pierre, avant de partir pour rencontrer Corneille, avait eu une vision, lors d’un temps de prière, où il avait vu des animaux de toute espèce, dont des animaux réputés impurs pour les Juifs, et une voix lui avait dit « Offre-les en sacrifice et mange ». Il s’y était refusé ne voulant pas, en bon juif, sacrifier et manger des animaux impurs et la voix divine lui avait répondu : « Ce que Dieu a déclaré pur, toi, ne le déclare pas interdit ». Cette vision lui avait trotté dans la tête et en arrivant chez Corneille, il comprend. Il n’y a pas une nation pure et les autres nations impures. Il comprend que, selon ses mots, « Dieu est impartial : il accueille, quelle que soit la nation, celui qui le craint et dont les œuvres sont justes. » Et pour confirmer ses paroles, l’Esprit Saint se manifeste en descendant de façon très visible sur Corneille et les siens. Stupeur pour les compagnons de Pierre qui se croyaient, comme juifs, privilégiés de Dieu. Ils découvrent cette impartialité de Dieu et se sentent bien obligés d’admettre ces païens au baptême.
Voilà donc un des aspects de l’amour de Dieu et pas le moindre. Lorsque nous aimons, n’avons-nous pas parfois tendance à des préférences, voire des exclusivités ? Or le passage des Actes nous révèle ici que Dieu ne fait pas d’exclusive pour tout homme et toute femme vivant selon sa conscience et recherchant le bien et la justice. Il n’y a pas de passe-droit pour Dieu.
Souvenons-nous de la parabole du pharisien et du publicain, c’est ce dernier qui est justifié alors qu’il se reconnaît pécheur, or le pharisien qui se complaît dans sa perfection, lui, ne l’est pas.
Frères et sœurs, il me semble que nous devons sans cesse nous réinterroger sur Dieu et surtout sur notre vision de Dieu, de son amour. Nous risquons toujours de mettre des barrières voire des obstacles à la grâce de Dieu mais Dieu est souverainement libre et sa grâce dépasse de loin les frontières qu’il nous arrange de lui fixer. Son amour est offert à tous. Il n’y a pas de privilégiés de Dieu ou plutôt tous et toutes sont des privilégiés de Dieu.
Pierre et les siens ont dû renoncer, et c’est heureux pour nous, à la doctrine de l’élection exclusive du peuple juif pour découvrir, mais cela le prophète Isaïe l’avait déjà fait, que l’élection d’Israël était en fait ouverte à l’élection de tous les peuples de la terre. Ainsi l’amour de Dieu n’est pas réservé à quelques privilégiés supposés parfaits. Le Christ l’a lui-même dit : il est venu non pour les bien portants mais pour les malades. Comme chrétiens, comme baptisés, nous ne devons pas considérer Dieu comme obligé envers nous. Il est ouvert à l’humanité tout entière et la moindre parcelle de bonté qui habite même l’être le plus repoussant selon notre point de vue, est l’occasion pour Dieu d’une irruption dans sa vie qui peut changer sa destinée.
Voilà la bonne nouvelle de l’évangile, voilà un des aspects de l’amour de Dieu, cette ouverture sans calcul, sans restriction… Voilà aussi l’invitation qui nous est faite pour notre vie de tous les jours, pour le témoignage de notre foi. Sans doute que cela rendra l’évangile et l’Eglise plus attirants pour nos contemporains. C’est là notre responsabilité. Sachons nous laisser toucher par l’attitude de Pierre.
Frères et sœurs, dans 15 jours, nous célébrerons la Pentecôte, fête du don de l’Esprit et c’est cet Esprit qui seul, peut nous donner d’aimer comme Dieu aime. Préparons-nous à l’accueillir dans un cœur ouvert et disponible à Dieu et aux autres. AMEN
Année B -5° dimanche de Pâques - 2 mai 2021
Ac 9, 26-31 ; 1Jn 3, 18-24 ; Jn 15, 1-8
Homélie du F.Bernard
Si vous possédez un missel, datant déjà de quelques années, vous constaterez que l’Évangile que nous venons d’entendre, commençait par ces mots : A l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père. Et il en était ainsi pratiquement de tous les Évangiles que nous entendrons, le dimanche ou en semaine, jusqu’à l’Ascension et la Pentecôte, tous pratiquement pris dans le discours de Jésus après la Cène en Jn 13-17. Comme si, à mesure qu’approche la fin du temps pascal, la liturgie tenait à se référer le plus étroitement possible à l’heure de la Pâque de Jésus.
Cette heure, nous l’avons célébrée au cours de la Semaine Sainte, non pas comme une heure transitoire, semblable à ces heures qu’indiquent nos montres et nos horloges, mais comme une heure permanente, ayant valeur d’éternité, l’heure du plus grand amour, l’heure des gestes ultimes et des paroles décisives, l’heure où le Maître et Seigneur s’est fait le Serviteur de ses frères, les lavant du bain de la régénération, l’heure où il s’est fait pain partagé pour la vie éternelle, et vin distribué pour le Royaume.
Chaque fois que nous célébrons l’eucharistie, non seulement nous faisons mémoire de l’heure où Jésus est passé de ce monde à son Père, mais nous la rendons présente, car aujourd’hui Jésus continue de passer de ce monde à son Père, en son Corps, dans l’humanité en chemin vers le Père.
Ainsi tout le discours de Jésus après la Cène doit-il toujours s’entendre dans ce contexte du passage de Jésus à son Père. Celui qui s’est fait pain rompu et vin distribué est celui-là même qui ajoute aujourd’hui : Je suis la vraie vigne, non pas le champ de la vigne, le vignoble, mais le cep, le plant de la vigne, à partir duquel la vigne peut se développer : les mots en grec sont différents.
Dimanche dernier, Jésus avait déclaré : Je suis le Bon Pasteur. L’image se comprenait aisément à l’adresse d’un peuple qui n’oubliait pas ses origines pastorales. Il s’agissait d‘écouter la voix du Pasteur, la voix du Maître intérieur, qui nous parle à l’intime de nous-mêmes, de le reconnaître lui comme le Seigneur, à l’instar de Marie-Madeleine, au matin de Pâques, dans le jardin, quand il l’avait appelée par son nom.
Aujourd’hui Jésus déclare : Je suis la vraie vigne. L’image est aussi parlante pour un peuple sédentarisé en région méditerranéenne, dont la félicité pour chacun de ses membres est d’être assis dans sa vigne, sous son figuier, et pour qui, selon le psaume, la mère de famille avec ses enfants est comparée à une vigne féconde (Ps 127,3).
Je suis la vraie vigne, et mon père est le vigneron. Le Père du ciel a donc lui aussi sa vigne. Bien sûr ! Sa vigne, c’est son peuple Israël, le peuple choisi, avec qui il a fait alliance pour toujours. Mais cette vigne n’a pas donné les fruits qu’il en attendait. Alors il a envoyé son Fils pour la régénérer.
Je suis la vraie vigne, et vous êtes les sarments. L’image est très claire. Le sarment, s’il n’est pas relié au cep, s’il ne reçoit pas la sève pour le nourrir, ce n’est plus que du bois mort, tout juste bon à alimenter le feu. Si au contraire il est relié au cep, s’il en reçoit la sève, il peut porter du fruit. Nous de même, si nous sommes reliés vitalement au Christ et demeurons en lui.
Sans moi, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Il se peut que cette phrase dans sa radicalité nous gêne parfois. Nous ne pouvons rien faire par nous-mêmes, rien de bon ? Si certainement, mais rien dans l’ordre de la grâce, dans l’ordre de la relation au Père, de la vie trinitaire : Nul ne va au Père que par moi, nous dit Jésus, et encore : Je suis le chemin vers le Père.
Le sarment ne peut pas porter du fruit, s’il ne demeure dans la vigne. Mais quel est ce fruit ? l’évangile d’aujourd’hui ne le dit pas explicitement. Il faut se référer aux versets qui le suivent immédiatement : Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres (Jn 15, 9 et 12). Le fruit de la vigne, c’est l’amour de charité échangé entre les Personnes divines, communiqué à nous les hommes pour que nous le partagions entre nous.
Nous entendions, à l’instant, en deuxième lecture, la première lettre de saint Jean. Elle ne disait pas autre chose. Elle nous exhortait à avoir foi en Jésus-Christ et à nous aimer les uns les autres.
La sève nourricière qui alimente le sarment et le relie au cep de vigne, nous la recevons dans l’eucharistie. Le sacrement nous est donné pour que nous apprenions à mettre en œuvre l’amour reçu de Dieu non pas avec des paroles et des discours, mais par des actes et en vérité.
Année B - 4e dimanche de Pâques - 24 avril 2021
Act 4 8-12 ; 1 Jn 30 1-2 ; Jn 10 11-18
Homélie du F.Hubert
« J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos :
celles-là aussi, il faut que je les conduise.
Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. »
Jésus est celui qui franchit les frontières – qui les transgresse même.
Il n’y a pas d’enclos qui le retienne.
Dans les évangiles synoptiques, au lendemain de sa journée à Capharnaüm,
il dit à ses disciples : « Allons ailleurs, afin que là aussi je proclame l’Evangile. »
Personne ne peut mettre la main sur lui et sur sa mission.
La première frontière – l’infranchissable – qu’il a franchi,
c’est l’abîme entre sa divinité et notre humanité.
C’est son Incarnation.
Il est descendu, il s’est fait l’un de nous.
Il n’est pas passé par hasard, comme le bon samaritain :
il est venu par décision d’amour.
« Le Verbe était Dieu, le Verbe s’est fait chair. »
Il s’est fait proche, il est venu avec nous, pour que nul ne soit sans lui.
Il a traversé les abîmes : l’abîme du péché, l’abîme de la mort.
Un malfaiteur crucifié a su reconnaître qu’il était là, sur la croix d’à côté…
Il s’est fait pain et coupe,
pour être avec nous au long des âges et en tout lieu.
Rien ne le retient, rien ne l’empêche d’être avec nous,
de rassembler tous les enfants de Dieu dispersés.
Nous, nous ne cessons de construire des murs pour nous protéger,
mettant les autres à distance, et trop souvent en les excluant.
Jésus, lui, ne se protège pas, il risque sa vie pour aller à la rencontre de chacun,
il part à sa recherche : il veut inclure tout être.
Il s’est fait le frère de tous, jusqu’au plus lointain de lui.
« J’ai encore d’autres brebis… celles-là aussi, il faut que je les conduise. »
Le diable divise. Jésus rassemble.
« Ta croix dressée au cœur du temps Montre la voie :
Tu as uni la terre au ciel, et de l’orient à l’occident,
Toi seul rassembles les vivants », chantons-nous à midi en ce Temps pascal.
Jésus rassemble les vivants, au prix de sa croix, au prix de sa vie donnée.
Il va vers les publicains et les pécheurs,
vers les lépreux et les possédés, vers les samaritains et les païens,
tous ces gens qui étaient aux marges, souvent méprisés, voire exclus.
Il passe les frontières.
« Ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi » :
y a-t-il un être que le Père ne lui ait donné ?
Ya –t-il un être pour lequel le Christ ne franchit les frontières, au risque de sa vie, pour qu’il soit avec lui ?
Nous trouvons dans la bouche de Jésus cette affirmation étonnante :
« J’ai le pouvoir de donner ma vie ».
Qui peut donner sa vie, sinon celui qui aime, celui qui est l’Amour ?
Pierre a fait douloureusement l’expérience qu’il n’avait pas ce pouvoir,
lui qui après avoir dit à Jésus : « Je donnerais ma vie pour toi ! » a juré peu après : « Je ne connais pas cet homme. »
Pierre croyait aimer mais il aimait avec ses seules forces.
C’est seulement plus, tard, après avoir reçu l’Esprit d’amour promis, qu’il a donné sa vie,
qu’il a suivi son maître jusqu’au bout.
Donner sa vie, c’est en faire le don :
dans notre souffle ultime et dans le quotidien des jours.
Etre là, avec l’autre, dans sa joie et dans sa souffrance,
dans sa beauté et dans sa part inhumaine, quel que soit son enclos.
Le livre que nous lisons en ce moment en communauté sur les martyrs d’Algérie,
nos frères et sœurs qui aujourd’hui choisissent d’être avec le peuple haïtien
et en bien d’autres lieux, nous montrent le chemin.
Faire don de sa vie à celui qui n’est pas moi, qui est autre, étranger, différent,
et qui est mon frère, ma sœur, enfants d’un même Père
Donner sa vie pour que tous aient la vie.
Le Christ l’a fait une fois pour toutes, et pour tous.
Contemplons le Christ pour apprendre à devenir chrétiens.
Nous sommes tous, chacun pour une part, pasteurs les uns des autres.
Que faisons-nous pour œuvrer au rassemblement des brebis,
qu’elles soient de notre enclos ou d’un autre ?
f. Hubert
Année B -- 3ème dimanche de Pâques - 18 Avril 2021
Actes 3, 13...19; 1Jean 2,1-5a; Luc 24, 35-48
Homélie du F.Damase
La chose la plus surprenante dans cet Évangile, c'est la crainte dont sont saisis les onze Apôtres et leurs compagnons. Peu de temps auparavant, les disciples avaient rencontré Jésus sur le chemin d'Emmaüs et l'avaient reconnu dans la fraction du pain et ils étaient revenus raconter ces choses aux Apôtres. Ceux-ci avaient répondu : "C'est bien vrai ! Le Seigneur est ressuscité, et il est apparu à Simon". Avant cela il y avait eu le témoignage des femmes venues au tombeau le matin de Pâques. Donc tout le monde savait déjà que Jésus était bel et bien ressuscité.
Soudain, alors même qu'ils sont en train de parler ensemble de Jésus, celui-ci apparaît au milieu d'eux et leur dit tout simplement : "La paix soit avec vous." Et cela suffit pour qu'ils soient effrayés et remplis de crainte. Quelle est donc la source de cette crainte ?
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La raison de leur crainte est sans doute que Jésus présent au milieu d'eux est différent de l'image qu'ils se sont faite de lui, et dont ils continuent à parler. Or, le Ressuscité est toujours le même. « C’est bien moi » dit Jésus aux Apôtres ce matin !
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N'y a-t-il pas quelque chose de semblable qui se produit de nos jours dans nos pays occidentaux. Nous parlons de Jésus, comme les Apôtres faisaient entre eux. Peut-être oublions-nous trop facilement que Jésus est autre que toutes les images que nous nous faisons de Lui. Ces images peuvent avoir été utiles, à une certaine époque. Mais ces images ne sont plus une médiation efficace pour une très grande partie des hommes et des femmes de notre temps, qui ne rejettent pas le Christ, même lorsqu'ils ont abandonné la pratique sacramentelle et l'institution ecclésiale.
Il y aurait sans doute lieu d'être beaucoup moins sûrs de tout ce que nous avons à dire sur Jésus et de le laisser se rendre présent au milieu de nous de façon imprévue. Les mains et les pieds qu'il nous montre sont ceux de tous ses frères et sœurs blessés par la guerre et par les kilomètres parcourus lors des migrations. Par la bouche de tous les affamés de la terre, il nous dit et redit sans cesse : "Avez-vous de quoi manger ?".
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C'est ce que nous rappelle saint Jean dans la seconde lecture. Dire de Jésus "je le connais", sans observer le commandement d'amour qu'il nous a donné est un mensonge. Mais si nous observons ce commandement, c'est alors que son amour, c'est-à-dire son esprit, atteint en nous la perfection.
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L’Eglise nous parle beaucoup en ces jours de « Fraternité Universelle » à travers la querelle des vaccins, entre autres –
Il s’agit (nous dit le Pape François), de se défaire de ce faux rêve universaliste qui finit par priver le monde de sa variété colorée, de sa beauté et en définitive de son humanité. En effet, l’avenir ne sera pas monochromatique mais, est possible si nous avons le courage de le regarder dans la variété et la diversité de ce que chacun peut apporter.
Comme notre famille humaine a besoin d’apprendre à vivre ensemble dans l’harmonie et dans la Paix, sans que nous ayons besoin d’être tous pareils ».
Voilà ce à quoi nous invite le Pape François dans Fratelli Tutti (au n°100), ainsi que l’Evangile d’aujourd’hui !
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