vendredi 7 novembre 2025 : journée de solitude pour la communauté
(eucharistie vers 6h45, juste après Laudes). 

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 13 mars 2022 — 2e dim. du Carême — Frère Basile
Cycle : Année C
Info :

Année C - 2° Dimanche Carême - 13 mars 2022

Genèse 15, 5-12 + 17-18 / ps 26 - Philippiens 3, 17 à 4,1 - Luc 9, 28b-36

Homélie du F.Basile

Texte :

Frères et soeurs, nous sommes aujourd’hui sur la montagne : ouvrons nos yeux à la lumière divine, nos yeux et nos oreilles, surtout l’oreille du cœur pour écouter sa Parole. « Ecoutez-Le », c’est le dernier mot sur lequel s’achève ce « son et lumière » étonnant de la Transfiguration.

Qu’est-ce que le Seigneur veut nous révéler par là, alors que nous sommes en carême : pourquoi ce détour par la montagne de la Transfiguration ? Mais ce n’est pas un détour, ce n’est pas un épisode parmi d’autres dans la vie de Jésus, c’est un événement central, comme un pivot autour duquel tout s’ordonne. Les 3 évangiles de Matthieu, Marc et Luc rapportent cet événement, chacun avec un accent différent, mais pour les 3, il a bien lieu entre la 1° et la 2° annonce de la Passion, cette Passion du Fils de l’homme que Pierre ne peut accepter.

Sur la montagne, dans le récit de Luc, Jésus s’entretient avec Moïse et Elie de son départ, litt. de son exode, de sa sortie de ce monde, qui aura lieu à Jérusalem, et il nous faut comprendre qu’il s’agit de sa mort et de sa résurrection : la gloire et la croix, il y a là un raccourci très fort que les 3 disciples ne comprennent absolument pas. Ils voient le vêtement blanc, mais ils ne font pas le lien avec le Fils de l’homme souffrant que Jésus leur a annoncé. Ils voient la gloire de Jésus, ils reconnaissent Moïse et Elie, et Pierre propose de dresser 3 tentes, allusion sans doute à la fête des Tentes et au retour du Messie, mais « il ne savait pas ce qu’il disait. » En fait, en redescendant de la montagne, ils vont garder le silence et ils ne comprendront l’événement qu’après Pâques.

Mais nous, devant ce mystère de gloire, de lumière, car la Transfiguration, c’est bien cela : la gloire de Dieu qui rayonne sur un visage d’homme, je crois que nous sommes mieux placés que les disciples pour faire le lien avec Pâques, car seule la lumière de la Résurrection éclaire vraiment la Transfiguration. C’est donc important que nous célébrions ce mystère durant le carême pour nous conduire à la nuit pascale où nous chanterons le Christ ressuscité, notre Lumière. St Paul le dit ailleurs dans une formule magnifique : « c’est Dieu qui brille dans nos cœurs pour y faire resplendir la connaissance de sa gloire qui rayonne sur le visage du Christ. » (2 Cor 4, 6)

Luc est le seul à nous dire que cette illumination du visage de Jésus survient dans la prière. Il emmène ses 3 disciples sur la montagne pour prier, et « pendant qu’il priait, son visage apparut tout autre. » Il ne s’agit pas d’un flash, d’un spot lumineux qui viendrait l’éclairer ; cette lumière jaillit de l’intérieur, elle vient de sa prière, c’est à dire de sa relation au Père. Les disciples le voient comme ils ne l’avaient jamais vu : c’est bien pourtant l’homme Jésus, mais habité par l’Esprit de Dieu dans une relation unique à son Père ; alors la voix qui s’adresse aux disciples et à nous maintenant prend toute sa force : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le » Voilà ce que nous devons faire aujourd’hui : regarder vers le Christ pour être à notre tour illuminés, transfigurés : « Regardez vers lui, dit le psaume, et vous resplendirez, sans ombre, ni trouble au visage. » (ps 33)

Le visage, c’est ce qu’il y a de plus beau dans le corps humain : hélas depuis 2 ans nos masques l’ont défiguré. Il est fait pour refléter la lumière et la communiquer aux autres et j’ai envie de dire qu’il est en attente de résurrection ou de transfiguration. Ces 2 mots sont très proches. En ce jour, il nous faut regarder vers le visage du Christ, laisser la source de lumière atteindre tout notre être, changer notre regard, et même notre façon d’aimer. Le P. Shoufani, l’ancien curé de Nazareth, disait :

« Aimer, c’est ne plus voir la vie et les êtres que dans la lumière qui les traverse : c’est voir l’être humain, si opaque parfois, non pas tel qu’il est, mais tel qu’il est appelé à devenir lorsqu’il se sera éveillé à la lumière, tel qu’il est déjà habité par la clarté divine, même s’il ne le sait pas encore. »

Oui, dans la Transfiguration, il y a un déjà là et un pas encore. Car nous sommes tous appelés comme Jésus à ressusciter dans notre corps. Paul disait dans la lettre aux Philippiens (2° lecture) : « Nous attendons le Seigneur Jésus Christ, lui qui transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux » Voilà ce « pas encore » que nous attendons, mais déjà, par la transformation de notre regard, illuminé par le Christ, et jusque dans la souffrance même, nous pouvons vivre un peu de la résurrection promise : la Transfiguration n’est pas une antidote à la souffrance et à la mort, une sorte de parenthèse sur un petit nuage, c’est une expérience divine dans notre chair humaine, une expérience capitale pour la vie chrétienne. Elle va donner du sens et de la valeur à notre corps qui souffre, à notre vie qui va vers la mort, et elle contient en germe la résurrection.

J’aimerais citer pour finir un texte d’Olivier Clément, ce grand théologien orthodoxe, qui disait aux sœurs de Pomeyrol : « La Transfiguration ne doit jamais être séparée de cet « exodos » dont parle Jésus avec Moïse et Elie, c’est à dire de sa Passion, de cette réalité de l’amour vécu jusqu’au bout, jusqu’à la mort et donc jusqu’à la victoire sur la mort A partir de ce moment-là, pour nous, la Lumière vient d’une manière accessible, parce que pour nous qui sommes dans la mort, elle nous vient à travers la mort, à travers Celui qui nous rejoint dans la mort, Celui qui a pu dire :’Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?’

A partir de ce moment-là, cette Lumière va nous rejoindre dans la profondeur même de l’Eglise, à travers la Parole de Dieu, à travers le pain et le vin de l’Eucharistie, à travers toute cette réalité de l’Eglise qui est le mystère du Christ dans l’Esprit Saint. » (conférence donnée à Pomeyrol en août 1992)

F et S, laissons cette Lumière du Christ nous rejoindre aujourd’hui dans un monde très assombri. Même si pour beaucoup d’hommes et de femmes, c’est encore la nuit, il faut leur dire qu’il y a des lieux, des moments et des êtres de transfiguration. Je pense à notre frère Bernard. Que Dieu lui donne pleine lumière ! Amen

Frère Basile

Homélie du 06 mars 2022 — 1er dim. du Carême — Frère Jean-Louis
Cycle : Année C
Info :

Année C - 1er dimanche Carême (C) (06/03/2022)

(Dt 26, 4-10a – Ps 90 – Rm 10, 8-13 – Lc 4, 1-13)

Homélie du F. Jean -Louis

Texte :

Frères et sœurs, - Avec le Mercredi des Cendres, ce premier dimanche de Carême constitue une première étape de notre montée vers Pâques. Nous venons d’entendre le récit des tentations du Christ au désert. Cette année, il s’agit du récit de l’Évangile selon saint Luc.

Nous y voyons que la place de l’Esprit Saint est essentielle. Dans les deux premiers versets, il nous est cité deux fois : « Jésus, rempli d’Esprit Saint, quitta les bords du Jourdain » et « dans l’Esprit Saint, il fut conduit à travers le désert. » Au baptême, le Christ a reçu en effet l’Esprit Saint et il se laisse conduire par lui à travers le désert où il sera tenté.

Jésus jeûne et a faim. Précision brève et simple mais qui nous montre toute l’humanité, la pleine humanité du Christ. Dieu, en Jésus Christ, a fait l’expérience humaine de la faim. Quand on y réfléchit, il y a de quoi avoir le vertige : Dieu a eu faim. Vient alors le tentateur qui propose à Jésus, si j’ose dire, de mettre fin à sa faim, mais de façon subtile : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne » : il s’agit pour Jésus de prouver, peut-être de se prouver, de façon indiscutable, quasi scientifique, qu’il est le Fils de Dieu, qu’il est Dieu, par un acte de puissance. Le diable utilise la faim bien réelle du Christ pour l’amener à se poser en Fils de Dieu par un miracle. Fuir une fragilité pour affirmer sa puissance. Quelle belle tentation ! N’est-ce pas souvent une tentation dans notre monde qui fuit la fragilité et valorise tant la puissance, la force ? Le Christ refuse en citant la Parole de Dieu : « L’homme ne vit pas seulement de pain »il en cite une partie mais tout connaisseur de la Bible en sait la suite « mais de toute Parole sortant de la bouche de Dieu. »

Autre tentation, celle du pouvoir sur tous les royaumes. Le tentateur part d’un mensonge, il se présente comme le maître, le propriétaire de tous les royaumes de la terre alors que la Bible a bien montré que c’est Dieu qui est le créateur et le maître, le roi de la création. Le diable invite alors le Christ à se prosterner devant lui pour recevoir de lui la propriété des royaumes et donc il s’agit pour le Christ de reconnaître que les royaumes de la terre sont sa possession à lui, le diable. Notons que ce dernier promet de donner le pouvoir et la gloire des royaumes. Il ne propose pas à Jésus d’être serviteur ni sauveur des peuples. Il ne fonctionne que dans la catégorie du pouvoir, de la gloire. La suite de l’évangile montrera que la royauté du Christ sur la terre passera pour le Christ par la croix. Pas de gloire sans la croix. Tout le contraire de ce que propose le démon, tout le contraire de ce à quoi nous aspirons spontanément.

Enfin, la troisième tentation, Jérusalem, le Temple. C’est que l’évangile de Luc est bâti sur la montée du Christ vers Jérusalem, lieu du sacrifice final, de la mort et de la résurrection. Et là, la tentation est à nouveau très subtile. Car le diable utilise la Parole de Dieu pour tenter, ici, le psaume 90 qui a été chanté après la première lecture. Apparemment, cette tentation n’en est pas une. Il s’agit de faire confiance à la parole du Seigneur, au fait qu’il ordonnera à ses anges de protéger son Fils. Mais la Christ a percé la ruse. La confiance n’a pas besoin de preuves. Si Dieu a promis sa protection, nul n’est besoin de vérifier qu’il respectera sa parole.

Frères et sœurs, que peuvent nous dire aujourd’hui les lectures de ce jour ? Parmi les nombreuses réponses qui peuvent être apportées, j’en relèverai quelques-unes.

Et d’abord, c’est peut-être évident mais est-ce si évident pour nous ? C’est que la tentation n’est pas le péché. Être tenté, ce n’est pas encore avoir péché. Nous croyons de foi que le Christ, vrai Dieu et vrai homme, est semblable à nous en toutes choses excepté le péché, et pourtant, il a été tenté… Dieu, en Jésus Christ, s’est abaissé jusqu’à accepter ces épreuves de la tentation comme chacun de nous. Mais il n’a pas cédé, il n’a pas péché. Ne nous décourageons donc jamais devant les tentations, ne considérons jamais que nous avons péché parce que nous avons éprouvé cette expérience douloureuse ou humiliante de la tentation. Ce serait oublier la victoire du Christ sur le mal, sur le diable.

Ensuite, dans deux de ces trois tentations, la première et la troisième, il y a plus ou moins la tentation d’affirmer, de prouver sa filiation au Père par un acte de puissance : transformer des pierres en pains, se jeter du haut du Temple pour que le Père intervienne miraculeusement. Si le Christ est Fils de Dieu, est-ce qu’il le croit lui-même ? Qu’il montre sa puissance. Qu’il le prouve.

La seconde tentation, elle, vise à détourner complètement le Christ de son Père en l’amenant à se prosterner devant le diable pour acquérir une puissance dont le diable, en fait, ne dispose pas, celle de la gloire des royaumes terrestres.

Nous voyons ainsi que ces trois tentations tournent autour du pouvoir, de la puissance. Le diable fait miroiter à Jésus l’intérêt de la gloire, mais d’une gloire terrestre. N’est-ce pas cela que dénonce le pape en parlant de mondanité spirituelle, du désir effréné de possession ? N’est-ce pas de cela que nous rêvons en regrettant la fragilité actuelle de notre Eglise ? N’est-ce pas cela qu’il y a derrière notre désir de voir se réaliser des miracles, des actes extraordinaires pour nous prouver et prouver aux incroyants que Dieu existe vraiment ? N’est-ce pas cela qui se trouve derrière notre conception de la foi comme d’un paratonnerre devant nous éviter tout problème, toute épreuve ? Est-ce que vraiment le bon, le vrai chrétien est celui à qui il n’arrive rien de mauvais ? Mais alors, le Christ est-il un bon chrétien ? La vie du Christ nous montre en fait que la gloire passe par le chemin de la croix. C’est peut-être le refus de cette vérité qui fait se détourner nombre de personnes de la foi chrétienne.

La première lecture nous rappelle que lorsque le juif présente les prémices de ses récoltes à Dieu, il doit se rappeler qu’il lui doit tout, que dans toutes les situations de détresse qu’il a vécues, c’est Dieu qui est intervenu, non pas pour lui éviter ces situations mais pour l’en libérer.

Et Paul, dans la seconde lecture, nous rappelle l’importance de la Parole de Dieu. Proclamer sa foi nous sauve, invoquer le Seigneur également. Il ne s’agit pas d’affirmer notre puissance mais de compter sur Dieu, quoiqu’il arrive.

Si le diable tente le Christ, c’est pour l’amener à désirer manifester sa puissance, sa force, ou désirer acquérir une gloire terrestre. Si le diable se retire jusqu’au moment fixé, c’est que, lors de la Passion, les prêtres diront au Christ : « qu’il se sauve lui-même s’il est le Messie de Dieu, l’Elu ! » Tentation proche de celle du diable qui invitait Jésus à faire preuve de sa puissance s’il était le Fils de Dieu. Le Christ ne cèdera pas à cette dernière tentation. Il acceptera la mort pour nous libérer de la mort.

Frères et sœurs, voici un programme offert pour ce carême : Tout ramener au Père, ne compter que sur lui et son action par le Fils et l’Esprit Saint. L’histoire nous rappelle que Dieu est intervenu pour sauver l’humanité, qu’il intervient encore. Que son Salut n’est pas que passé mais qu’il est actuel. Et ce n’est pas pour nous faire manifester notre supposée puissance mais pour accepter nos limites et apprendre à compter sur lui seul. C’est aussi ce que nous dit la Croix du fils prodigue derrière l’autel. Il quitte son père avec beaucoup d’argent qu’il dépense. Il est dans la richesse, la gloire terrestre puis, vient la famine, la misère. Il accepte sa pauvreté et c’est alors qu’il se lève pour retourner vers son père et y trouver son salut. Alors, le bonheur est au bout du chemin et non pas le doute. Alors va poindre la lumière de Pâques, la lumière de la Résurrection. Vous me direz que ce n’est pas très original mais le carême est là pour nous rappeler des attitudes, des éléments de la foi qui ne sont pas extraordinaires mais plutôt bien ordinaires et que nous avons tendance à oublier. Demandons à l’Esprit Saint durant ce carême, de faire de nous des hommes et des femmes conscients de leurs fragilités mais comptant envers et contre tout sur Dieu non pas pour être forts mais pour lui être unis envers et contre tout. Soyons en cela de véritables disciples du Christ. Alors, le bonheur est au bout du chemin et non pas le doute sur la fidélité de notre Dieu. Alors va poindre la lumière de Pâques, la lumière de la Résurrection.

AMEN

Homélie du 02 mars 2022 — Mercredi des Cendres — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

CENDRES - 02.03.2022

Jl 2, 12-18 ; 2 Co 5, 20-6, 2 ; Mt 6,1-6, 16-18

Homélie du P.Abbé Luc

Texte :

Frères et Sœurs, - « Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché afin qu’en lui nous devenions juste de la justice même de Dieu », venons-nous d’entendre. Paul relit ainsi en une phrase le mystère de la rédemption que nous ne cesserons d’approfondir durant ces 40 jours de Carême qui nous préparent à la célébration de Pâques. Nous allons méditer, célébrer le mystère du Christ venu nous chercher. Alors que « nous étions perdus, incapables de nous rapprocher de Dieu, celui-ci nous a aimé de plus grand amour, son Fils, le seul juste, s’est livré lui-même à la mort » prierons-nous dans quelques instants… Et en méditant le mystère du Christ, inséparablement nous ouvrons davantage les yeux sur le mal qui blesse notre humanité et qui entrave notre propre liberté. Durant ces 40 jours, nous aurons sous les yeux, au chœur, cette croix peinte par le f. Yves, dite croix de l’enfant prodigue. Nous y reconnaissons autour de la croix, différents tableaux illustrant la parabole de l’enfant prodigue… Mais en fait, plus qu’une illustration de la parabole, l’association du thème de la croix avec le récit de la parabole, nous entraine à contempler le mystère du salut de notre humanité opéré sur la croix comme la course du Christ, qui s’est fait prodigue, péché pour nous, afin de nous ramener vers le Père. Le jeu des couleurs utilisées est suggestif. Le Christ en croix est tout en bleu-vert, de la même couleur que les sept porcs auprès desquels se désole le fils prodigue avant de faire retour sur lui-même pour revenir vers son Père. Sur la Croix, Jésus, lui le seul juste, a accepté d’être considéré comme un pécheur, un homme blessé par les impuretés dont les porcs sont l’image.

Durant ces 40 jours, nous sommes invités à regarder davantage vers Jésus. C’est vers lui qu’il faut revenir en déchirant notre cœur, par le jeûne, la prière et les larmes qui veulent exprimer et servir notre désir de repentir. Notre engagement dans une prière plus instante, dans une participation plus aimante aux célébrations de la liturgie, notre engagement dans le jeûne et dans une charité plus effective avec nos frères n’est pas le but, mais un moyen. L’évangile nous rappelle combien il nous faut veiller à la justesse de notre engagement dans la prière, le jeûne et l’aumône. Si cet engagement sert à nous mettre en valeur aux yeux des autres ou de nous-mêmes, il est vain et inutile. Cet avertissement de Jésus, nous permet de mieux entendre ce qui intéresse notre Père des Cieux. Ce qu’il désire le plus, c’est que nous tissions avec Lui, une relation toujours plus juste et plus aimante. Il n’a que faire de nos exploits, mais il cherche à nouer en Jésus ce « lien de charité si fort que rien ne pourra le défaire ». Oui comme nous le prierons dans la prière eucharistique, entrons dans « ce temps de grâce et de réconciliation, par la conversion du cœur, en mettant notre espérance dans le Christ Jésus, en nous dévouant au service de tous les hommes, et nous livrant davantage à l’Esprit Saint »…

Homélie du 27 février 2022 — 8e dim. ordinaire — Frère Basile
Cycle : Année C
Info :

Année C - 8° Dimanche Ord - 27 février 2022

Ben Sira 27, 4-7 / ps 91; 1 Cor 15, 54-58; Marc 6, 39-45

Homélie du F.Basile

Texte :

Frères et Soeurs, dans l’évangile d’aujourd’hui Jésus nous invite à une double conversion, celle du regard et celle du cœur : serait-ce déjà un avant-goût du Carême ?

Surtout ne confondons pas ici évangile et leçon de morale. Ces petites paraboles reprises par Jésus sont pleines de sagesse populaire comme aussi les proverbes du livre de Ben Sira en 1° lecture. On dirait aujourd’hui : « Garde-toi de juger les autres : regarde-toi d’abord dans la glace » ou bien « Commence par balayer devant ta porte ». Mais il faut aller plus loin jusqu’au cœur, dans notre cœur : c’est là que se situe la vraie conversion : mon cœur est-il bon ? mon cœur est-il mauvais ? 50 – 50 ? Je crois que Dieu ne le voit pas ainsi, car il sait quel trésor il contient.

S’il y a encore en nous de la dureté, de l’amertume, de l’agressivité, cela cache aussi un trésor de bonté, de patience, de bienveillance et de paix. « L’homme bon tire le bien du trésor de son cœur » Le cœur est le dernier mot de notre évangile, en lien avec nos paroles, mais je voudrais relever un autre mot présent dans les 2 lectures, c’est « l’arbre qui se reconnaît à son fruit. »

Ne pourrait-on pas dire que Jésus compare l’homme à un arbre ? On touche ici à un des grands symboles de la culture humaine, que la Bible utilise souvent et que l’on retrouve dans les paraboles de l’évangile.

Quel arbre es-tu ? Quelles sont tes racines, et le cœur du tronc ? Si le cœur est bon, l’arbre se développe, il vit ; mais si le cœur est mauvais, s’il est sec ou pourri, l’arbre dépérit, il meurt.

Dans la Bible, l’arbre est présent dès les premières pages, l’arbre au milieu du jardin, et tout à la fin dans l’Apocalypse : l’arbre de vie au bord du fleuve qui fructifie 12 fois l’an, et dont les feuilles guérissent les païens. Nous trouvons l’arbre aussi dans les psaumes : dès le 1° psaume, le juste est comme un arbre, planté près d’un ruisseau, qui donne du fruit en son temps, et son feuillage est toujours vert. Et puis dans l’évangile, il y a l’arbre de la Croix, sur lequel Jésus va mourir, pour que cet arbre donne la vie et non plus la mort.

Quel arbre es-tu ? Quelles racines et quels fruits ? La racine de l’homme, c’est son cœur, le cœur au sens biblique : lieu intérieur de sa liberté, de son engagement le plus profond : c’est là qu’il choisit Dieu ou le refuse ; là il se préfère lui-même à tout, ou bien il prend le risque d’aimer ses frères. C’est le lieu du combat spirituel. Au cours de ce Carême tout proche, n’aurions-nous pas à faire une petite séance de scanner pour vérifier la qualité de nos racines et la santé de notre cœur ? C’est important, car les fruits correspondent aux racines.

Quel arbre es-tu ? Quels fruits donnes-tu ? « Le juste poussera comme un palmier, dit le psaume, comme un cèdre du Liban. Vieillissant, il fructifie encore, il garde sa sève et sa verdeur. » Invitation à la croissance, à faire fructifier la vie qui est en nous, et que nos parents nous ont donnée. Nous la recevons de Dieu en permanence depuis notre baptême où nous avons été plongés dans l’eau vive du Christ. Et Jésus nous dit : « Je suis la vigne, vous êtes les sarments. Celui en qui je demeure, portera du fruit en abondance. »

L’arbre qui pousse droit vers le ciel, avec ses racines bien en terre, le cœur vivant où monte la sève, le vert tendre des feuilles et les fruits faits pour être cueillis et se reproduire, cet arbre n’est-il pas une image du chrétien, de l‘Eglise, du Christ à jamais vivant, de notre assemblée d’aujourd’hui, venue puiser la vie et rendre grâce.

J’aimerais citer pour finir ce poème de Patrice de la Tour du Pin, que frère Servan, grand ami des arbres, m’avait fait découvrir un jour ; en voici quelques lignes :

« En toute vie le silence dit Dieu !

…Vous avez tout en vous pour adorer,

Car vous avez l’hiver et le printemps.

Vous êtes l’arbre en sommeil et en fleurs.

Jouez pour Dieu des branches et du vent,

Jouez pour Dieu des racines cachées.

Arbres humains, jouez de vos oiseaux. »

Frères et sœurs, puisse notre chant et notre prière aujourd’hui porter des fruits pour Dieu et pour la paix du monde ! - Frère Basile

Homélie du 20 février 2022 — 7e dim. ordinaire — Frère Damase
Cycle : Année C
Info :

année C - Homélie du 7° dim du TO - 20 février 2022 –

1Sam 26 2-23 ; 1 Co 15 45-49 ; Luc 6 27-38

Homélie du F.Damase

Texte :

Voilà frères et sœurs, une page d’évangile qui nous laisse les bras ballants !

« Il y a encore du travail ! » pour chacun d’entre nous.

L’amour des ennemis est un précepte caractéristique des disciples du Christ.

Dans aucune autre religion, on ne trouve un tel commandement : « Aimez vos ennemis ! ».

Ainsi le livre de Samuel raconte l’histoire de la jalousie du roi Saül qui veut la mort de David.

Il le traque car tout le peuple a chanté :

Saül a vaincu des milliers, mais David a tué des dizaines de milliers d’ennemis !

Alors, de nuit, David dérobe la lance de Saül pendant son sommeil, posée près de sa tête -

mais il respecte la vie du roi Saül,

car il qui a reçu l’Onction du Seigneur ! Il ne se venge pas ; il ne touche pas à la vie du Roi Saül !

Dans l’Evangile, l’amour des ennemis est l’expression d’un don total, un Don total comme celui du Christ, qui va beaucoup plus loin que le simple pardon des offenses. L’amour du prochain, dans l’enseignement de Jésus, et en particulier l’amour des ennemis, est avant tout le DON – écrit en majuscule – le DON d’une personne à une autre, le DON d’un cœur qui a la capacité de se donner gratuitement.

Le concile Vatican II dit de l’homme dans Gaudium et Spes, « qu’il est l’unique créature sur terre que Dieu voulait pour elle-même. L’unique créature qui peut se réaliser uniquement par le Don désintéressé de soi-même ». (GS 24 – Lc 17.33))

C’est en cela que l’homme est un être semblable à Dieu par cette capacité qu’il a de se donner ;

comme Dieu se donne à l’intérieur même de la Trinité « Père, Fils et Saint Esprit »

et comme le Père se donne aux hommes en envoyant son Fils unique.

Et comme le Christ se donne en donnant sa vie aux hommes sur la Croix.

Si l’amour des ennemis, frères et sœurs, nous parait difficile, et il l’est !

L’amour du prochain, nous le savons, n’est pas non plus toujours aisé.

Si vous aimez ceux qui vous font du bien, c’est facile de leur rendre la pareille,

mais aimer sans attendre le retour de l’ascenseur, comme on dit familièrement, c’est plus difficile !

Aimer son prochain en Dieu. C’est l’aimer en sa vocation particulière, en ce qu’il est le plus lui-même.

C’est l’aimer d’un amour qui l’atteint au cœur de sa singularité.

C’est l’aimer comme Dieu l’aime, de cet amour de Dieu qui le fait être

et être tel, avec un fond de personnalité qui n’appartient qu’à lui-même.

Aimer l’autre, c’est l’aimer en sa singularité, dans la beauté de sa singularité voulue par Dieu.

Il s’agit en même temps, frères et sœurs, d’aimer le prochain d’un amour universel,

qui aime tel frère sans exclure qui que ce soit, pas même l’ennemi,

car tous nous sommes appelés à nous aimer les uns les autres,

à faire communauté sans aucune distinction entre amis et ennemis.

Et comme aimait nous dire le Père Denis Huerre,

« Le ‘je’(1° personne du Singulier) est toujours en dialogue avec le ‘nous’. (1° personne du pluriel) -

Le ‘je’ est pour le ‘nous’ et le ‘nous’ a sa racine dans le ‘je’ !

C’est de cet amour-là, frères et sœurs, que l’Eucharistie, que nous célébrons maintenant,

est non seulement le signe, mais la réalité, c’est-à-dire le sacrement.

Que le Christ Seigneur, qui a donné sa vie pour nous, nous entraine sur ce chemin, qui est le seul chemin qui conduit à la Joie parfaite,

595 mots

Homélie du 13 février 2022 — 6e dim. ordinaire — Frère Charles Andreu
Cycle : Année C
Info :

Année C - 6°dim du tps Odinaire - 13 février 2022

Jér 175-8 ; 1 Co 15 12-20 ; Lc 6 17-26 ;

Homélie du F.Benoit Andreu de Fleury

Texte :

Bonheur et malheur, rires et larmes, faim et satiété, estime et mépris. L’évangile des béatitudes nous touche car il aborde des réalités très simples, très sensibles, qui se mêlent en toute vie, et dans leur enchevêtrement souvent confus il trace un chemin.

Les Écritures nous en offrent plusieurs versions. Celle de Matthieu, que nous avons entendue à la Toussaint, était toute de douceur : Jésus y proclame bienheureux les pauvres de cœurs, les doux, les assoiffés de justice, les miséricordieux, les cœurs purs. La version de Luc, que nous venons d’entendre, est assurément plus âpre. Car le bonheur n’y est plus lié à des dispositions intérieures que nous aimerions bien faire nôtres, mais à toutes sortes d’adversités extérieures qui nous font peur : précarité, douleur, faim, haine, exclusion, mépris. Et puis il y a cette proclamation déconcertante du malheur de ceux que la vie semble avoir épargnés, car ils ne manquent de rien, car ils savent encore rire. Alors nous aurions peut-être envie de reprendre les mots que les disciples, en d’autres circonstances, avaient osé dire à Jésus : « Cette parole est dure, difficile, qui peut l’entendre ? »

Cette parole est difficile car en plaçant le consolation des affligés au futur, ou encore « dans le ciel », elle heurte notre soif d’établir dès maintenant la justice. Disons-le d’une simple image. Quand les évêques de France, après la publication du rapport de la CIASE, se sont réunis pour prier devant l’image d’un enfant en larmes, ça ne pouvait évidemment pas être pour proclamer « heureux vous qui pleurez maintenant, vous rirez », mais pour demander pardon et s’engager à tout faire pour que de telles larmes ne soient plus versées.

Car les larmes de nos frères et de nos sœurs nous requièrent ; elles nous requièrent dès maintenant, et quelles qu’elles soient (les larmes n’ont pas d’odeur). Alors pour être juste — je dirai même, pour ne pas risquer d’être cruelle — notre proclamation aujourd’hui de l’évangile des béatitudes doit s’accompagner d’une question et d’un engagement : « De quelles larmes, autour de moi, suis-je indifférent ? » ; « Que requièrent-elles de moi ? »

Cette parole est difficile car nous pourrions l’entendre sur un mode doloriste, comme une sorte de complaisance dans l’adversité et la souffrance dont on ferait le seul chemin valable en cette terre qu’il faudrait non seulement traverser comme une « vallée de larmes », mais encore d’un pas allègre, puisque les béatitudes donneraient à ces larmes le sens d’une espérance.

L’empressement d’une certaine spiritualité chrétienne à déclarer qu’on pourrait donner un sens à la souffrance, lui reconnaître une valeur salvifique, peut légitimement nous heurter. Car le propre de la souffrance n’est-il pas d’être toujours insensée et destructrice ? Lui prêter un sens, est-ce un magnifique acte de foi ou un terrible acte de déni ? La foi ne consiste-t-elle pas plutôt à affirmer que la vie seule a du sens, et de croire qu’elle a assez de sens pour traverser même le non-sens de la souffrance ? C’est le sens du mystère pascal : nous croyons en un Christ souffrant, mais il est le Dieu de la vie et non pas le Dieu de la souffrance.

Dans la bouche de Jésus, ces béatitudes si déroutantes n’ont pas été une parole dure parce que sa vie donne sens à notre vie. Ce sens, ce n’est pas d’abord une doctrine, mais son amour, et l’amour qu’il nous appelle à avoir les uns pour les autres. Si nous cherchons ailleurs le sens de la vie, dans les richesses, les plaisirs, la capacité à rire de tout, la notoriété, nous cherchons un faux sens qui donne peut-être au quotidien un certain confort, parfaitement respectable, mais qui ne suffit pas au bonheur. Alors Jésus nous prévient : « Quel malheur pour vous ! »

Concrètement cela signifie aussi que les larmes de nos frères et de nos sœurs requièrent encore notre capacité à leur manifester le sens et la beauté de leur vie. Notre amour seul peut le faire, la plupart de temps de façon très simple : quand on s’enfonce dans la peine, il suffit souvent d’un sourire, d’un regard plein de bonté pour nous relever. Ce ne sont pas les grandes phrases, mais ces petites virgules du quotidien, ces actes d’amour et de douceur qui ponctuent la course des jours, qui nous donneront d’être avec Jésus artisans des béatitudes.

Homélie du 06 février 2022 — 5e dim. ordinaire — Frère Guillaume
Cycle : Année C
Info :

Année C - HOMELIE du 5ème dimanche TO - 06-02-2022

(Isaïe 6,1-8 ; Cor 15,3-11 ; Luc 5,1-11)

Homélie du F.Guillaume

Texte :

Frères et sœurs

La liturgie de ce 5ème dimanche du TO nous offre à entendre 3 textes magnifiques de l’Ecriture. 3 rencontres d’hommes avec Dieu, 3 modalités de Révélation et de vocation : Isaïe, Paul, Pierre. Et ce qu’il y a de remarquable dans ces 3 expériences humano-divines c’est que toutes commencent par la vision de quelqu’un qui se donne à voir ou à entendre, suscitant alors la crainte et le sentiment d’indignité, d’impureté ou de péché, et toutes les 3 se concluant par un envoi en mission. De sorte qu’il était bon pour nous de chanter avec le psalmiste les versets du Ps. 137 « de tout mon cœur, Seigneur, je te rends grâces. Je rends grâce à ton Nom, pour ton Amour et ta Vérité, car tu élèves au-dessus de tout, ton Nom et ta Parole »

Reprenons brièvement chacune de ces rencontres.

Pour Isaïe, elle a lieu au Temple de Jérusalem, en l’année de la mort du roi Ozias. Au cours d’une vision en esprit, il est mis en présence du Dieu Saint, 3 fois saint. Dans la tradition juive, Isaïe est considéré comme le prophète de la Sainteté de Dieu. Dire que Dieu est Saint, c’est dire qu’il est le Tout-Autre. Ce n’est pas un qualitatif moral, ni même un simple attribut. La Sainteté atteste la nature même de Dieu, son essence. Dieu est Celui qui nous dépasse infiniment, que nous ne pourrons jamais atteindre par nos seules forces. Devant lui, l’homme ne peut que mesurer sa petitesse et éprouver de la crainte : il découvre le fossé infranchissable qui le sépare de lui et il prend conscience de son impureté. Mais le Dieu de la Bible n’en reste pas là. Il s’adresse à l’homme en lui disant : « ne crains pas ». Il prend l’initiative de s’approcher et il fait un geste en envoyant un ange purifier les lèvres de l’homme pécheur. Isaîe est alors prêt à écouter l’envoi en mission : il sera messager, prophète d’une Bonne Nouvelle à ses frères, à son peuple et plus largement à toutes les nations.

Dans la 2nde lecture, il nous est rappelé que Dieu, en la personne du Christ Ressuscité s’est faut voir à Pierre, puis aux 12 ensuite à plus de 500 frères à la fois, puis à Jacques et aux autres apôtres, et en tout dernier lieu il est apparu à Paul, l’avorton, le persécuteur de l’Eglise. Sur le chemin de Damas Paul a pris conscience de son effroyable péché, il a été touché par la miséricorde de Jésus et de ses disciples qui lui ont pardonné. Enfin libre, à l’égard de la Loi, il est devenu le 1er grand disciple missionnaire, apôtre des nations, lui qui ne se jugeait pas digne d’être appelé apôtre. Ce qu’il était désormais, c’était par la grâce de Dieu qu’il l’était, et la grâce débordant en lui n’a pas été stérile.

Enfin Pierre, dans l’Evangile de cette pèche miraculeuse relatée par Saint Luc. Tout comme Isaïe il fait l’expérience d’une mise en présence soudaine de Dieu lui-même, non pas à travers une vision oculaire, mais par un miracle inexplicable pour le pécheur de poissons professionnel qu’il est. En réalité, il n’a fait que répondre à la parole de Jésus en qui il avait mis sa confiance depuis son 1er appel avec André, son frère. « Avance au large, et jetez les filets ». Ayant obéi, le miracle se produit suscitant l’effroi et la prise de conscience de l’écart qui le séparait de son Maître. « Eloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur ». Prise de conscience à la fois de la Sainteté de Dieu, seul capable d’opérer un tel miracle, et à la fois de son indignité par ce fossé entre lui et Jésus, qui pourrait le pousser au découragement et à la peur paralysante. Mais ici encore, Dieu n’en reste pas là, à cette réaction très humaine. Tout comme Isaïe avait vu le geste de l’ange venant lui toucher les lèvres pour le purifier, ici, Pierre entend la parole de réconfort de Jésus : « sois sans crainte, désormais, ce sont des hommes que tu prendras ».

Tous les deux, ils reçoivent une vocation au service du même projet de Dieu qui est le salut des hommes. Isaïe sera un messager, un prophète, Pierre sera un pécheur d’hommes, un sauveteur

Pierre ne répond pas à la parole d’envoi de Jésus. La simplicité de la fin du texte est impressionnante : « alors, ils ramenèrent les barques au rivage, et laissant tout, ils le suivirent ». Encore faut-il s’entendre sur le sens de cette suite du Seigneur. Les disciples ne se contentent pas de suivre leur maître pour seulement l’écouter. Ils seront associés à sa tâche comme collaborateurs, même si l’entreprise sera parfois vouée à l’échec, à vue humaine. Il faudra continuer à lancer les filets. C’est le mystère de la collaboration, de notre collaboration à l’œuvre de Dieu. Nous ne pouvons rien faire sans Dieu, mais Dieu ne veut rien faire sans nous.

Comme le dit si bien Saint Paul : c’est la grâce de Dieu qui fait tout. Ce que nous sommes, c’est par la grâce de Dieu que nous le sommes, et la grâce en nous n’a pas été stérile. La seule collaboration qui nous est demandée, si l’on y réfléchit, c’est la confiance et la disponibilité. Tout a commencé parce que Pierre a fait confiance : « sur ta parole… » Il fait confiance à Jésus, assez pour l’écouter, assez pour se risquer à une nouvelle tentative de pêche. Après le miracle, Pierre ne dit plus « Maître », mais « Seigneur », le nom même de Dieu et c’est aux pieds de son Seigneur qu’il se prosterne. Il est prêt à se risquer pour cette nouvelle forme de pêche que Jésus lui propose : « désormais, ce sont des hommes et non plus des poissons que tu vas pécher »

Frères et sœurs, la parole de Jésus doit résonner encore à nos oreilles : « avancez au large et jetez vos filets ». A notre tour de répondre sans crainte et surtout faisons lui confiance, pour que notre pêche soit aussi miraculeuse. Il suffit de croire en Lui.

AMEN

Homélie du 30 janvier 2022 — 4e dim. ordinaire — Frère Cyprien
Cycle : Année C
Info :

Année C - 4eme T Ord -30 janvier 2022

Jér 1/4-5,17-19, 1Co 12/21-13/13, Lc 4/21-30

Homélie du F.Cyprien

Texte :

S'il me manque l'amour, je ne suis rien...

La parole du Seigneur s'adressa à moi: « Ne te laisse pas accabler par eux ».

Tous ils s'étonnaient du message de la grâce qui sortait de sa bouche…

Chers frères et sœurs, commençons par le commencement, le plus important, commençons si vous le voulez bien par la 2e lecture…

…La foi, l'espérance et l'amour, ces trois-là demeurent, déclare Saint Paul aux Corinthiens, mais l'amour est le plus grand.

Pourquoi l’amour est-il le plus grand ?

Pourquoi ? Parce que l’amour c’est Dieu ; Dieu est amour et celui qui aime connait Dieu et Dieu demeure en Lui…

Tout a commencé en Dieu : il a tout créé par amour… chaque fois que nous aimons, nous révélons la présence de Dieu, ce Dieu qui veut être tout… en nous tous. Pour cela Il nous donne son Esprit et il n’y a qu’un fruit en nous de cet Esprit de Dieu :

Le fruit de l’Esprit c’est l’Amour, l’Amour qui unit le Père et le Fils…

De l’Amour, Paul a énuméré les aspects, les manifestations, les conditions :

= les aspects : l’amour répand la joie et la paix ;

= les manifestations : l’amour s’exprime par la patience, la bonté et la bienveillance ;

= les conditions : la foi, l’humilité et la maîtrise de soi sont les conditions de la naissance et de la croissance de l’amour.

Retenons cette fois-ci avec ce passage aux Corinthiens les manifestations de la Charité qui vient de Dieu : la patience, la bonté, la bienveillance.

Puissions-nous, f. et s., nous emplir de ce qu’écrit saint Paul, l’apprendre par cœur (dans l’ordre !) pour arriver chaque jour à vivre un peu et même beaucoup…de cet amour qui nous unit à Dieu et fait demeurer Dieu en nous…

« L'amour prend patience,

l'amour rend service,

il ne jalouse pas, il ne plastronne pas, il ne s'enfle pas d'orgueil,

il ne fait rien de laid,

il ne cherche pas son intérêt,

il ne s'irrite pas, il n'entretient pas de rancune,

il ne se réjouit pas de l'injustice, mais il trouve sa joie dans la vérité.

Il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il endure tout ».

Maintenant, sachant cela, venons-en aux deux autres lectures qui se correspondent l’une l’autre : Jérémie en 1ére lecture et la rencontre de Jésus avec ses concitoyens à Nazareth.

Jérémie : c’est le prophète qui peine sous la charge que Dieu lui a confiée « Ne te laisse pas accabler par eux, eux qui ne veulent pas t’écouter…Ils ne pourront rien contre toi ».

Dans la Bible, tout au long de l’histoire de la foi, Jérémie a toujours été considéré comme le prophète dont le destin annonçait celui de Jésus, … La vie de Jérémie annonçait la vie de Jésus… Jésus persécuté pour être finalement éliminé.

Saint Luc présente Jésus en messager de la grâce, « On s’étonnait », écrit-il, …Jésus, messager de la grâce, étonne, il est trop connu de ses compatriotes pour parler et agir si bien : du coup il est rejeté : "Médecin, guéris-toi toi-même. ", : " Oui, je vous le déclare, aucun prophète ne trouve bon accueil dans sa patrie »… Plus tard il sera rejeté par les Anciens de son peuple, par les savants ; il sera livré aux romains pour être crucifié.

Jésus et ses compatriotes : cette façon de nous côtoyer les uns les autres et ne pas nous rencontrer, nous connaissons : nous réagissons souvent en croyant connaitre les personnes. Ce qu’elles ont à nous dire, nous l’écoutons… Nous écoutons, mais souvent à moitié …ou pas du tout, trop rarement pour apprendre ce que l’autre veut nous dire.

Le prophète n’est-il pas, en plus, celui qui vient nous dire quelque chose que nous ne voudrions pas trop entendre ?

Souvenons-nous de Jean-Baptiste qui attirait les foules et qui disait à Hérode : Tu n’as pas le droit de prendre la femme de ton frère…

Est-ce que les paroles de Jésus nous dérangent ? un peu ? beaucoup ? Il y a danger si elles nous rassurent sans effort de notre part. Jésus est mort par amour de nous, par amour de la Vérité : cela ne doit-il pas nous inciter à essayer de mieux comprendre son message ?

Frères et Sœurs, si nous sommes venus à l’Eucharistie ce matin, c’est que l’Esprit de Jésus nous a déjà fait entrer dans le message de paix et d’amour de Jésus. Déjà un peu…

Avec saint Paul qui nous a décrit la Charité de Dieu, que ce moment de prière ensemble nous enracine un peu plus dans cet Amour qui est la vie même de Dieu, en Jésus le pain vivant, Dieu qui nourrit les fidèles de sa Vie à Lui.

Frères sœurs, prions les uns pour les autres. Amen.

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Homélie du 23 janvier 2022 — 3e dim. ordinaire — Frère Hubert
Cycle : Année C
Info :

Année C - 23 janvier 2022 - 3e dimanche du Temps ordinaire –

Ex 3 1.15 ; 1 Co 10 1-12 ; Lc 13 1-9

Homélie du F.Hubert

Texte :

Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture que vous venez d’entendre.

Jésus, après quelques semaines en dehors de Nazareth, revient parmi les siens, au milieu desquels il a été élevé.

Il est descendu de Galilée au Jourdain se faire baptiser par Jean, incognito au milieu de foule venue reconnaître ses péchés. Jésus, le sans péché, a choisi les hommes, il ne s’est pas séparé de nous, il ne s’est pas mis à part, pas au-dessus, il s’est fait baptiser par Jean, comme les autres. Il nous a choisis, il a choisi d’être avec nous.

Dans ce choix, le Père l’a reconnu comme son Fils bien-aimé en qui il trouve sa joie.

Rempli d’Esprit Saint, il a été conduit au désert pour être tenté par le diable. Et là, il a choisi son Père. Il a refusé de recevoir les royaumes de la terre pour lui-même, il a refusé de choisir et recevoir les hommes pour lui. Il a refusé de se séparer de son Père. Il a refusé de n’être plus le Fils, de ne plus se recevoir de celui qui l’engendre et l’envoie.

Ayant ainsi choisi les hommes pour frères, et Dieu comme son Père, Jésus revient en Galilée dans la puissance de l’Esprit, et sa renommée se répandit dans toute la région.

Revenu chez les siens, trouvant dans le rouleau d’Isaïe le passage où il est écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi, Jésus se reconnaît, il reconnaît que se texte parle de lui. Et avec assurance, il affirme : Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture que vous venez d’entendre.

Oui, c’est lui qui est envoyé par le Père pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération.

Déjà en ce jour, tout cela est accompli, car ayant choisi les hommes, ayant choisi son Père, Jésus est déjà le trait d’union indissoluble entre le ciel et la terre, entre Dieu et les hommes. De Paul nous pouvons entendre : Vous êtes ressuscités avec le Christ, et de Jean : Nous sommes appelés enfants de Dieu et nous le sommes.

Cependant, dans la temporalité de Jésus et dans la nôtre, tout n’est pas encore accompli. Si Jésus a choisi et les hommes et son Père, il faut qu’il le vive dans sa chair jusqu’à porter dans tout son être, son corps et son cœur, l’horreur du péché, l’horreur de la séparation d’avec la Source, la séparation d’avec le Père. Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? Jusqu’à l’extrême de cet abandon total, il fait qu’il tienne ses choix : Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font.

Alors, chacune de nos années, chacune de nos journées, est un temps favorable, un temps de grâce, accordé par le Seigneur.

Dieu a jugé bon qu’habite dans le Christ toute la plénitude et que tout, par le Christ, lui soit enfin réconcilié.

Tu as tellement aimé le monde, Père très saint, que tu nous as envoyé ton Fils unique, lorsque les temps furent accomplis, pour qu’il soit notre Sauveur. Dieu fait homme … il a vécu notre condition humaine en toute chose, excepté le péché, annonçant aux pauvres la bonne nouvelle du salut, aux captifs la délivrance, aux affligés la joie.

Dans notre temporalité à nous aussi, il nous faut accueillir ce don de Dieu en Jésus : il nous faut regarder la croix, comme nous y avons été invités toute cette semaine, et entendre cette parole : Si tu savais le don Dieu…

Ce don nous est offert présentement dans le mystère de l’eucharistie : nous laisserons-nous toucher, aimer, réconcilier, sanctifier ?

Que l’Esprit soit sur nous, par le Christ, le Fils unique !

Homélie du 16 janvier 2022 — 2e dim. ordinaire — Frère Bernard
Cycle : Année C
Info :

2ème dimanche du T.O, année C, 16 janvier 2022

Is 62 1-5 ; Co 12 4-11 ; Jn 2 1-11

Homélie du F.Bernard

Texte :

Le 2ème dim. du T.O. est chaque année un dimanche de transition, entre le temps de Noël qui vient de s’achever, avec la fête du baptême du Seigneur, et le temps ordinaire où l’on entreprend la lecture semi- continue d’un évangile synoptique, cette année l’évangile de Luc.

C’est comme un moment de vacances, de repos pour Jésus, avant de commencer son ministère de prédication, de guérison, d’exorcisme, où tout son temps sera mangé. Un moment de compagnonnage aussi avec les disciples qu’il vient d’appeler. Il mène alors, de quelque manière, la vie de tout le monde et donne par sa seule présence du prix à nos vies. Jésus n’est pas seulement présent à nos prières et nos liturgies : il est présent dans nos maisons, nos lieux de vie et de travail, nos fêtes et nos loisirs.

Ici il est invité avec ses disciples à des noces. Sa mère aussi est invitée. La voilà mentionnée pour la première fois dans le quatrième évangile. Elle le sera à nouveau lors de la Passion du Seigneur, au pied de la croix. Ces deux seules mentions suffisent à lui donner, dans l’Évangile et la vie chrétienne, sa place exceptionnelle, unique.

A Cana, lors des noces, le vin vient à manquer. Cela devait bien arriver de temps en temps, dans ces noces de village, où l’on ne pouvait guère à l’avance prévoir le nombre des invités. Il fallait bien les traiter, non seulement le temps d’un repas, mais plusieurs jours, voire une semaine, car c’était traditionnellement la durée des noces dans la Bible. En cas de manque de vin, c’était au maître du festin de prévoir quelque boisson de remplacement.

C’est alors que se situe l’étrange dialogue entre la mère et le Fils : Ils n’ont plus de vin, mais c’était bien sûr au maître du festin de s’en préoccuper, non à l’invitée. Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore arrivée.--Faites tout ce qu’il vous dira dit Marie aux servants, nullement rebutée par la réticente de Jésus.

Jésus accueille de fait le désir de sa mère. Il donne l’ordre aux servants de remplir six jarres de pierre destinées aux ablutions rituelles des Juifs. Six-cent litres d’eau vont être transformés en vin, un vin abondant, excellent, de quoi continuer la fête.

De quoi s’agit-il ? La première lecture nous le laissait pressentir. Isaïe y invitait Jérusalem à se réjouir d’autres noces qu’il entrevoyait dans l’avenir : Comme un jeune homme épouse une jeune fille, ton Bâtisseur t’épousera. Comme la jeune mariée fait la joie de son mari, tu seras la joie de ton Dieu (Is 62,5). C’est bien de ces noces dont il s’agit ici, à Cana, les noces de Dieu avec l’humanité, celles du Fils de Dieu, le Roi Messie, avec le peuple de l‘alliance. Et pour ces noces le vin ne peut manquer, un vin purifié, savoureux, excellent. Les prophètes n’ont pas de mots trop forts pour le désigner.

En Jésus, l’Époux des noces messianiques est là. Jean le Baptiste va se comparer à l’ami de l’Époux, ravi de joie à la voix de l’Époux. Ce sera sa joie, sa joie complète (cf Jn 3, 29). Et Jésus lui-même se désignera comme l’Époux dont les compagnons ne peuvent jeûner tant qu’il est avec eux (Mc 2, 19). L’Époux est là, mais l’heure des noces n’est pas encore venue. Ce sera Pâques, quand le Fils de l’homme sera fixé en croix et que du haut de la croix, et de son côté transpercé, il livrera l’eau de la vie éternelle.

La mère de Jésus, dans sa hâte messianique, appelle cette heure de ses vœux. Ici elle obtient de son Fils qu’il devance cette heure, du moins sous la forme d’un signe, celui de l’eau changée en vin, annonce du vin changé en le sang du Christ à l’eucharistie, quand l’heure de la croix sera venue. Une autre femme dans l’Évangile agira auprès de Jésus, avec la même audace, la Cananéenne, une païenne. Elle obtiendra de Jésus que les miettes qui tombent de la table des enfants de Dieu ne soient pas perdues. Avant l’heure des païens elle obtiendra la guérison de sa fille atteinte par la maladie (Mt 15, 21-28).

Le temps de Noël est passé. Un temps de grâce nous a été donné pour affermir notre foi. Qu’en retenir pour le moment que nous vivons ? Peut-être un double enseignement. D’abord la présence de Jésus, le Fils de Dieu, à notre vie, toujours et partout : il est présent à nos prières et dans la liturgie que nous célébrons, mais aussi à nos fêtes humaines, aux jours de joie comme aux jours de détresse. Présence encore de Marie, inséparable de son Fils, proclamée Mère de Dieu au jour octave de Noël. Elle est aussi Mère de l’Église et notre mère : elle nous guide continuellement vers son Fils. Aujourd’hui, elle nous redit :

Faites tout ce qu’il vous dira.