vendredi 3 octobre 2025 : journée de solitude pour la communauté, messe vers 6h45 après Laudes.

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 30 mars 2024 — Veillée pascale — Père Abbé Luc
Cycle : Année B
Info :

Année B - VIGILE PASCALE 30.03.2024

Rm 6, 3-11 ; Mc 16,1-7

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

« Qui nous roulera la pierre pour dégager le tombeau ? » Telle est la préoccupation, frères et sœurs, qui habitait ces femmes qui se hâtent de bon matin au cimetière, vers le tombeau où le corps de Jésus a été déposé. Car cette pierre qui obstruait la porte était « très grande », nous précise l’évangéliste. Or quelle n’est pas leur surprise en arrivant sur le lieu, de voir la pierre qui a été roulée, laissant le tombeau ouvert. Qui donc a roulé cette pierre ? Serait-ce des voleurs qui auraient pris le corps, comme une certaine rumeur le laissera entendre plus tard ? Serait-ce ce jeune homme « vêtu de blanc » qu’elles trouvent assis dans le tombeau ? On ne nous le dit pas. Ce jeune homme qui leur inspire une forte frayeur leur annonce alors cette nouvelle étonnante : « le Crucifié que vous cherchez, il est ressuscité. Il n’est pas ici, il vous précède en Galilée ». Voilà un évènement auquel elles ne s’attendaient pas, elles qui venaient embaumer, et entourer d’honneurs le corps inerte de Jésus, ce que son ensevelissement fait en hâte à cause du sabbat, n’avait pas permis. Voilà une nouvelle qui peut, sinon expliquer, du moins suggérer, que la pierre n’a pas été roulée par des mains humaines. La pierre roulée s’offre alors comme un signe fort du bouleversement occasionné par la résurrection de Jésus qui demande une énergie, elle, qui n’est pas de ce monde ! Tel est le mystère que nous sommes invités à contempler en regardant cette pierre roulée et ce tombeau vide…

« Qui nous roulera la pierre ? » Telle est la question que nous nous posons peut-être parfois, frères et sœurs, en considérant tous les tombeaux ou tous les lieux de mort de notre humanité que nous peinons à rejoindre. Ces lieux semblent comme obstrués par des pierres trop lourdes pour nos seules forces humaines. Parfois ce sont des deuils trop pénibles à accompagner. Parfois la maladie laisse l’autre comme inaccessible alors qu’il demande des soins et une proximité. Enfin ce sont souvent nos propres difficultés ou souffrances qui se referment sur nous comme une lourde pierre. Et que dire au niveau de notre humanité, de ces conflits qui pèsent sur notre monde, et qui nous blessent tous, nous laissant comme impuissants tant on ne voit pas d’issues pacifiques.

« Qui nous roulera la pierre ? » Pouvons-nous légitimement nous demander. Frères et sœurs, la résurrection du Christ que nous célébrons cette nuit, ne nous donne pas de réponse à la manière d’une baguette magique qui transformerait la réalité en un clin d’œil. Cet évènement au cours duquel un homme a été relevé d’entre les morts, est survenu au cœur de l’histoire humaine qui connait et connaitra encore la souffrance et la mort. Mais ce qu’a vécu Jésus éclaire d’une lumière nouvelle notre destinée humaine ainsi que notre propre expérience. Si nous lui donnons notre adhésion de foi, non seulement il nous ouvre une espérance pour l’au-delà, mais dès maintenant il nous apprend à aborder tous nos tombeaux et tous nos lieux de mort d’une autre manière. Le Christ ressuscité, reconnu à nos côtés, nous enseigne à espérer pour nous-mêmes, et pour tout homme et toute femme, qu’aucune forme de mort n’enferme un être à jamais. Dire cela est un acte de foi fort et qu’il nous faut sans cesse renouveler face aux pierres qui semblent se dresser immuables devant nous. Pourquoi pouvons-nous affirmer cela ? La célébration de cette nuit nous le fait comprendre en nous révélant combien la puissance de vie que Dieu a mis en œuvre dans la résurrection de Jésus, était déjà à l’œuvre depuis la création du monde. Depuis le commencement, face à la mort et au mal omniprésent, son projet est de conduire l’humanité à la vie, au partage de sa propre Vie. Oui, dans le grand respect de notre liberté, Dieu désire nous faire passer de la prison du mal et de la mort à la vie reçue comme un cadeau toujours nouveau et pour l’éternité. Ainsi, en ressuscitant Jésus d’entre les morts, Dieu est profondément cohérent. Son projet trouve en lui son accomplissement.

« Qui nous roulera la pierre ? » Accueillons frères et sœurs, en cette nuit, le Christ ressuscité surgissant de la mort. Par la grâce de notre baptême, il nous offre une espérance qui nous donne courage et confiance. Par le pain et le vin de l’eucharistie, son corps et son sang de Ressuscité, il nous fortifie pour ouvrir avec lui de nouveaux chemins de vie. En cette eucharistie, disons notre merci à Dieu de prendre ainsi soin de nous, pour qu’à notre tour, nous prenions soin de ceux qui nous entourent, forts de l’espérance que les portes de la mort ne sont pas à jamais fermées.

Homélie du 29 mars 2024 — Vendredi Saint — Père Abbé Luc
Cycle : Année B
Info :

Année B - VENDREDI SAINT 29.03.2024

Is 52, 13 - 53, 12 ; He 4, 14-16 ; 5, 7-9 ; Jn 18, 1 - 19, 42

Homélie du Père Abbé

Texte :

« Devant lui les rois resteront bouche bée ». Peut-être éprouvons-nous ce sentiment d’être interloqué devant certaines représentations très réalistes de la croix de Jésus, comme devant certaines images contemporaines de corps défigurés par la violence humaine. Oui, Jésus a été jusqu’à cette déchéance physique. Il ne s’est pas esquivé face à la barbarie de ses frères en humanité. Et cependant, ce n’est pas l’intensité des souffrances endurées à nos côtés et pour nous, qui donne tout son sens à la mort en croix de Jésus. Non, le mystère de la croix s’éclaire sous une double lumière : celle de l’amour de Jésus qui nous a aimé jusqu’au bout et celle de la fidélité de son Père qui lui répond par la Résurrection. C’est ce double éclairage qui nous permet dans quelques instants de présenter en toute confiance au Père, les prières d’intercession qui voudraient n’oublier personne.

Car l’Eglise est habitée par cette confiance que sur la croix, Jésus a embrassé tous les hommes « dans sa bénédiction de feu » pour reprendre une hymne chantée ce matin. C’est aussi ce double éclairage porté sur la croix qui nous permet ce soir de vénérer cet instrument de supplice devenu instrument de notre salut. Sur la croix, la mort et le péché ont cédé le dernier mot à la vie. Une espérance s’est ouverte qui nous est offerte comme un immense cadeau totalement gratuit. Accueillons-la et célébrons-la.

Homélie du 28 mars 2024 — Jeudi Saint — Père Abbé Luc
Cycle : Année B
Info :

Année B - JEUDI SAINT - 28.03.2024

Ex 12, 1-8.11-14 ; 1 Co 11,23-26 ; Jn 13, 1-15

Homélie du Père Abbé

Texte :

Frères et Sœurs

Quand Dieu fait alliance avec son peuple, c’est pour toujours. En cette célébration de la Cène du Seigneur, les lectures que nous venons d’entendre nous disent chacune comment le Seigneur prépare son peuple à vivre de son alliance, et comment il lui donne les moyens de la célébrer ensuite et de la perpétuer pour toujours.

D’une manière un peu étonnante, dans le livre de l’Exode, le Seigneur prescrit un rituel à fêter d’âge en âge alors qu’il n’a pas réalisé l’œuvre de libération de son peuple. A travers le rituel du repas pascal donné avec détails, les auteurs du livre de l’Exode nous font comprendre que le Seigneur anticipe sa propre action de salut en même temps qu’il la pérennise. « Ce jour-là sera pour vous un mémorial. Vous en ferez pour le Seigneur une fête de pèlerinage. C’est un décret perpétuel : d’âge en âge, vous la fêterez ». Et le peuple juif a fait sien et il fait sien encore cette prescription reçue du Seigneur. Chaque année, il célèbre en un repas solennel, le mémorial de la Pâque, ce passage du Seigneur qui a délivré son peuple de l’esclavage de l’Egypte. D’année en année, il accueille cet évènement fondateur. De la sorte, il se nourrit de l’alliance, l’engagement que Dieu a pris et prend encore en faveur de la libération de son peuple.

Lorsque Jésus, la nuit où il était livré, célèbre la Pâque avec ses disciples, il éclaire d’une lumière neuve ce mémorial reçu de ses pères. Comme dans le livre de l’Exode, à travers le rituel du pain rompu et du vin partagé, il anticipe la passion qu’il va subir quelques heures plus tard. Il anticipe et il manifeste que « sa vie, nul ne la lui prend, mais que c’est lui qui la donne ». Librement il se donne scellant en son sang, la nouvelle alliance de Dieu avec son Peuple. Et il invite ses disciples à pérenniser les gestes qu’il accomplit en ce soir-là : « Faites cela en mémoire de moi ». Depuis ce soir de la Ste Cène, l’alliance nouvelle et éternelle que Dieu veut nouer avec son peuple est accueillie et célébrée dans le rituel du pain rompu et du vin partagé. C’est le mémorial de la passion et de la résurrection du Seigneur que nous célébrons solennellement ce soir, dans son « aujourd’hui » toujours offert. Comme nous le prierons dans l’oraison sur les offrandes : « chaque fois qu’est célébré ce sacrifice en mémorial, c’est l’œuvre de notre rédemption qui s’accomplit ». Oui, réjouissons-nous car en chaque eucharistie, Dieu continue d’offrir d’âge en âge son salut et son alliance à tout homme et toute femme de toutes nations.

L’évangile que nous avons entendu, nous invite à être attentif à une dernière dimension de l’alliance que Dieu désire voir se développer avec son peuple. Son alliance entre Lui et son peuple est inséparablement alliance entre nous. De nouveau Jésus pose un geste, un rituel qu’il nous invite à pérenniser : le lavement des pieds. A la veille de sa passion, Jésus révèle par ce geste toute la profondeur du don de lui-même : Lui le Seigneur s’abaisse comme un serviteur pour nous purifier de tout péché. Mais il va plus loin en nous invitant à le suivre dans le même mouvement de renoncement et de don vis-à-vis des autres. Ce geste, prélude de sa passion, doit aussi changer nos relations interpersonnelles. « Si moi, le Seigneur et le Maitre, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous ». A la suite de Pierre, nous sommes invités ce soir, à nous laisser laver, purifier par Jésus, si nous voulons savoir à notre tour, comment laver les pieds de nos frères. Lui seul peut nous apprendre, et la manière et le tact pour le faire. Demandons-lui cela comme une grâce pour qu’il nous rende capable de participer à l’œuvre d’alliance qu’Il désire mener à son accomplissement, non seulement avec Lui mais aussi entre nous.

Homélie du 24 mars 2024 — Dimanche des Rameaux — Père Abbé Luc
Cycle : Année B
Info :

Dimanche des Rameaux et e la passion - 24 mars 2024

Is 50 4-7 ; Phil 2 6-11 ; Mc 14.1 -15.47

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

RAMEAUX - 24.03.2024 - Introduction

Frères et sœurs

Nous voici au terme du carême et au seuil de la grande semaine chrétienne, la semaine sainte. En ce jour des Rameaux, nous faisons mémoire des foules de Jérusalem qui acclament Jésus comme le Messie, le Roi tant attendu. Mais Jésus ne dévoilera sa vraie identité de Roi qu’au matin de Pâques, après avoir traversé les abimes de la Passion. Car Il est Roi non pour dominer sur un Royaume terrestre, mais parce qu’il a vaincu le mal et la mort. Ce matin, à la suite des foules de Jérusalem, nous acclamons Jésus notre Roi, en acceptant nous aussi de ne pas bien le connaitre encore. Nous l’acclamons, mais pour mieux le connaitre et l’aimer, nous acceptons de nous laisser guider durant toute la semaine par la célébration de sa passion jusqu’à la lumière de la résurrection. Les rameaux que nous tenons en main veulent l’acclamer. Je vais appeler sur eux et sur nous tous la bénédiction du Seigneur. Lorsque nous les mettrons ensuite aux croix de nos maisons, qu’ils nous rappellent que si Jésus est Roi, c’est parce qu’il a vaincu le mal et la mort.

RAMEAUX - 24.03.2024 -

Is 50, 4-7 ; Ph 2, 6-11 ; Mc 14, 1 – 15, 47

Frères et sœurs,

Une expression revient de plus en plus souvent dans nos échanges humains, et particulièrement dans les échanges commerciaux ou économiques, c’est l’expression : « gagnant-gagnant ». Dans ces échanges, tout est fait pour que chacun des partenaires s’y retrouve, en retire un bénéfice. Ce matin, en cette célébration de la Passion qui ouvre la grande semaine chrétienne, nous faisons mémoire de Jésus qui, pour nous, a accepté de jouer « perdant-gagnant ». Il a accepté de tout perdre pour que nous soyons gagnants. Il a pris le risque de se déposséder de sa vie. Il ne s’est pas dérobé à ceux qui le traquaient, à Judas qui l’a livré, aux grands de ce monde qui l’ont condamné, aux soldats qui le frappaient et l’humiliaient, à ceux qui l’ont crucifié. Jésus a obéi à son Père jusqu’à ressentir un abandon de sa part. Il a tout perdu, sauf la confiance en son Père vers lequel il a crié jusqu’au bout. Descendu de la sorte au cœur de nos abimes humaines de maltraitance et de déréliction, il s’en est remis totalement à son Père. Et le Père lui a répondu en le ressuscitant des morts. Frères et sœurs, cette semaine sainte nous est offerte pour accueillir toute la profondeur de ce mystère de vie et d’amour, pour découvrir qu’en nous attachant à Jésus, sans avoir rien fait, nous sommes devenus gagnants. Gagnant pour vaincre avec lui le péché et le mal. Gagnant dans l’espérance que la mort, qui nous atteint tous, n’a pas le dernier mot. Remercions Dieu en cette eucharistie d’être associés à un tel bonheur. Et recueillons-ce bonheur durant cette semaine pour le laisser grandir et fortifier nos vies.

Homélie du 17 mars 2024 — 5e dim. du Carême — Frère Basile
Cycle : Année B
Info :

Année B - 5° Dimanche Carême - 17 mars 2024

Jérémie 31, 31-34 / ps 50 - Hébreux 5, 7-9 - Jean 12, 20-33

Homélie de F. Basile

Texte :

« L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié… Maintenant mon âme est bouleversée - Père, sauve-moi de cette heure ! Mais non, Père, glorifie ton Nom. »

F et S, c’est dans ces termes que l’évangile de Jean nous rapporte l’affrontement de Jésus à sa propre mort, ce que les autres évangiles situent un peu plus tard au jardin de Gethsémani, juste avant son arrestation.

Le 4° évangile n’a pas fini de nous étonner si nous essayons d’en saisir le sens et la progression. Nous savons comment cet évangile est sous-tendu par « l’heure qui vient ». C’est à Cana, tout au début de sa vie publique, que Jésus disait à Marie : Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue », et pourtant ce jour-là, à la prière de Marie, le vin a coulé et la gloire du Christ s’est manifestée pour la 1° fois.

Aujourd’hui, nous voilà au ch 12, et ce sont des grecs, des païens qui font cette demande : « Nous voulons voir Jésus »; de Philippe à André, la demande remonte à Jésus et elle reçoit une réponse solennelle : « L’heure est venue, l’heure où le Fils de l’homme doit être glorifié. » C’est la Croix qui est visée bien sûr, à l’heure de l’accomplissement total, mais c’est aussi pour l’évangéliste l’heure de la Gloire, l’heure de l’exaltation, l’heure où le prince de ce monde va être jeté dehors et où le Christ attirera tout à lui, l’heure de la nouvelle Alliance.

La perspective ouverte ici offre un horizon infini et rassemble toutes choses, alors que dans le passage parallèle de l’évangile de Marc, Jésus déclare à la fin de son agonie :

« C’en est fait, l’heure est venue : voici que le Fils de l’homme est livré aux mains des pécheurs » et la lettre aux Hébreux, que nous avions en 2° lecture, souligne elle aussi le grand cri et les larmes de Jésus

Au contraire, dans l’évangile de Jean, la Gloire et la Croix sont désormais liées. Jésus crucifié, c’est Jésus glorifié : depuis que le Fils de l’homme a été élevé, c’est la seule manière pour Jean d’envisager la mort du Christ, et cela peut nous interroger.

C’est dans ce même passage que Jésus cite la parabole de la semence, le grain qui meurt et porte beaucoup de fruit : parabole familière chez Marc et Matthieu, mais ainsi placée par Jean au début de la Passion, elle brille d’une lumière nouvelle ! L’accent n’est pas mis sur le rendement, mais sur la graine enfouie, sur la mort et la vie, sur la mort lucidement acceptée et la vie entièrement donnée, sur le service qui peut aller jusqu’à la mort. C’est pour lui, mais aussi pour nous que Jésus prononce ces paroles : « Là où je suis, là aussi sera mon serviteur, et mon Père l’honorera, le glorifiera. »

Comment ne pas évoquer ici tous les martyrs, connus ou inconnus, tous ceux qui ont semé l’Eglise en donnant leur vie. Tout près de nous, je pense au P. Jacques Hamel assassiné en juillet 2016 ; il y a, bien sûr, nos 7 frères de Tibhirine, enlevés dans la nuit du 26 au 27 mars, et retrouvés morts 2 mois plus tard. Même si cela est plus loin de nous, je voudrais mettre en lumière saint Oscar Romero, canonisé en 2015 par le pape François : archevêque de San Salvador, il fut assassiné au cours de l’eucharistie en pleine homélie le 24 mars 1980. Comme le Christ, il est allé jusqu’au bout ; en prenant le parti des pauvres, c’est là qu’il s’est converti, il savait les risques qu’il courait, les menaces qui pesaient sur lui et qui ne l’empêcheront plus de parler. Dans une de ses dernières homélies, il avait dit : « Comme chrétien, je ne crois pas à la mort sans la résurrection. S’ils me tuent, je ressusciterai dans le peuple du Salvador. »

Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. Les fruits, nous les connaissons : c’est l‘espérance des pauvres, l’espérance de tous ceux qui se sont relevés et remis debout à cause de sa vie offerte, par la force de l’évangile vécu. Oui, l’heure est venue avec la mort de Jésus lucidement acceptée, avec son élévation sur la croix et son souffle remis entre les mains du Père, l’heure est venue où la gloire du Fils de l’homme ne cessera plus d’être manifestée, jusqu’à nous aujourd’hui. « Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore »

Voilà bien l’Alliance nouvelle, annoncée par le prophète Jérémie, réalisée pleinement à la mort de Jésus, où tous les hommes sont appelés à entrer ; la présence des grecs, des païens au début de l’évangile aujourd’hui, en est le signe avant-coureur. « J’attirerai à moi tous les hommes. »

Cette Alliance nouvelle, dit le prophète, c’est Dieu qui inscrira sa Loi au plus profond des cœurs, non plus sur des tables de pierre, mais sur des cœurs de chair, et tous, nous connaîtrons le Seigneur. Celui qui n’est pas nommé, c’est l’Esprit Saint, mais Paul dira qu’Il est la Loi nouvelle inscrite dans nos cœurs.

Nous voyons combien toutes ces paroles convergent dans l’heure de Jésus : l’heure de la Croix, mais aussi de la Gloire, l’heure de la mort, mais aussi de la Vie donnée, l’heure du souffle remis au Père, mais aussi de l’Esprit répandu. C’est tout le mystère pascal, la Pâque nouvelle que nous allons célébrer dans quelques jours, mais déjà dans chaque eucharistie.

Frères et sœurs, n’oublions pas que même dans la souffrance, la maladie ou l’échec, si nous les vivons avec Jésus, nous ne dirons pas : « Père, sauve-moi de cette heure », mais comme Jésus : « Père, glorifie ton Nom. »

Homélie du 10 mars 2024 — 4e dim. du Carême — Frère Jean-Louis
Cycle : Année B
Info :

Année B - 4e dimanche de Carême - (10/03/2024)

(2 Ch 36, 14-16.19-23 – Ps 136 – Ep 2, 4-10 – Jn 3, 14-21)

Homélie du F. Jean-Louis

Texte :

Frères et sœurs,

En ce quatrième dimanche de carême, l’Eglise a choisi des lectures soulignant bien la joie dont ce jour est marqué. Joie qui tranche avec la gravité générale du carême mais qui nous indique déjà l’horizon de tout carême : la Pâques, la Résurrection du Christ.

Pourtant, la première lecture commence plutôt mal, et même très mal. Cette relecture de l’histoire d’Israël faite bien après les événements nous rappelle en effet une période sombre de l’histoire du peuple élu de Dieu. Son élection ne l’a pas protégé de l’infidélité envers son Dieu qui, lui, restait toujours fidèle à son Alliance, essayant d’envoyer des messagers, les prophètes, pour faire prendre conscience au peuple de son égarement. Or, ces prophètes ont été sans cesse moqués, méprisés, rejetés. Et pourtant, Dieu continuait à avoir pitié de son peuple. Cependant, à force d’idolâtrie, le peuple a fini par se détourner de son Dieu. L’auteur du livre des Chroniques, relisant, sans doute au 3e siècle avant le Christ, l’histoire religieuse du peuple d’Israël avec les critères de son époque a donc attribué à la colère de Dieu la chute de Jérusalem, en 587 avant le Christ, sous les coups des armées de Nabuchodonosor, roi de Babylone. Dans la mentalité du temps, si l’on était vaincu par une armée étrangère, c’est que le ou les dieux de la nation avaient abandonné la cause du vaincu. Si Jérusalem avait été prise et le peuple déporté à Babylone, c’est que le Dieu d’Israël avait pris acte de l’infidélité de son peuple et l’abandonnait aux conséquences de ses errements.

Il ne restait plus alors au peuple d’Israël qu’à adopter les dieux des vainqueurs et à s’assimiler à ces derniers. Mais un prophète, Jérémie, s’est levé pour dire que la colère du Seigneur n’était pas définitive et que le peuple serait à nouveau l’objet de son amour et c’est ce qui arrivera quelques 70 ans après.

En effet, les armées babyloniennes seront à leur tour vaincues par un autre roi, Cyrus, roi de Perse. Un roi païen mais qui va, de façon tout à fait inattendue, permettre aux exilés de revenir à Jérusalem et même de reconstruire le Temple. Ainsi, le peuple juif fera l’expérience très forte de la fidélité de son Dieu qui se manifeste au-delà des infidélités du peuple. L’alliance de Dieu avec son peuple est vraiment éternelle et sans retour.

La splendide seconde lecture de ce dimanche exprime, en un autre temps la même réalité de la fidélité sans faille de Dieu envers les pécheurs. Nous étions des morts par suite de nos fautes et Dieu nous a donné la vie avec le Christ, avec cette merveilleuse exclamation qui revient deux fois au cas où nous n’aurions pas compris :

« C’est bien par grâce que vous êtes sauvés ». Et au cas où nous nous acharnerions à nous trouver des motifs de mériter le salut de Dieu, Paul insiste et précise : « Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Cela ne vient pas de nos actes : personne ne peut en tirer orgueil. » En fait, tout le projet créateur de Dieu est ici exposé : Il nous a créés pour la communion avec lui et ce ne sont pas nos fautes qui peuvent l’empêcher de réaliser son projet.

Et l’évangile nous redit enfin comment, concrètement, Dieu est intervenu en notre faveur. C’est par le Christ Jésus. Avec cet optimisme incroyable : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. » Et l’évangile nous dit également que Dieu a envoyé son Fils dans le monde pour le sauver et non pas pour le juger.

Certes, il faut la foi. Mais la réflexion théologique récente qui a approfondi la révélation chrétienne a pu mettre en évidence que ce qui importe, c’est de vivre selon l’esprit de l’évangile, faire le bien et s’écarter du mal, respecter le prochain…

Nous savons que Dieu ne peut tenir rigueur à des gens qui ne connaissent pas le Christ parce qu’ils n’ont pas rencontré de témoins pour l’annoncer ou parce que les témoins rencontrés ne leur ont pas donné envie de croire.

Le dialogue interreligieux nous a appris aussi à respecter la foi de ceux qui suivent avec sincérité une autre voie religieuse que la voie chrétienne.

Le concile Vatican II a affirmé que l’humanité entière était appelée à la sainteté, et que tous pouvaient être unis au mystère pascal de mort et de résurrection du Christ, les chrétiens, par le baptême et ceux qui ne le sont pas par des moyens que Dieu seul connaît. Le Salut est donc offert à tous et c’est cela la bonne nouvelle.

Nous pourrions objecter : « À quoi sert alors d’annoncer l’évangile ? » Je pense que ce n’est pas rien que tout être humain aie connaissance d’être aimé à ce point par Dieu, par le Christ et c’est notre rôle de baptisés que de l’annoncer, non de l’imposer.

Bien sûr, il reste à agir en rejetant le mal qui déteste la lumière, qui déteste Dieu. Là aussi, nous avons la responsabilité d’agir de telle sorte que ceux qui nous entourent sentent que nous sommes habités par plus grand que nous.

Frères et sœurs, les lectures de ce jour nous révèlent que nous sommes dépositaires, par la foi que nous avons reçue, d’un immense trésor à partager avec nos frères et sœurs en humanité.

Puisse la deuxième partie du Carême qui a commencé nous aider à trouver, dans l’Esprit Saint, les moyens de le faire.

AMEN

Homélie du 03 mars 2024 — 3e dim. du Carême — Frère Vincent
Cycle : Année B
Info :

Année B - 3° dimanche de Carême - 03 mars 2024

Ex 20 1-17 ; Ps 18 ; 1 Co 1 22-25 ; Jn 2 13-25

Homélie du F. Vincent

Texte :



Les lectures bibliques de ce dimanche forment un tout. Il s’agit d’abord de Dieu qui fait alliance avec les Hébreux au temps de Moïse. Ces derniers n’étaient pas encore un peuple. C’était un ramassis de pauvres gens, esclaves en Egypte et menacés de génocide. Or voilà que Dieu leur parle. Il leur donne sa loi pour leur apprendre à vivre en cohérence les uns avec les autres. Nous trouvons dans le Livre de l’Exode de nombreux textes qui traitent de cas concrets. Mais le plus important c’est ce que nous appelons “les dix commandements”. Ces dix paroles de vie sont comme des balises qui indiquent la route pour aller vers Dieu. Ces dix commandements se résument à deux : Respect de Dieu et respect des autres. Dans un monde marqué par des intolérances de toutes sortes, ce texte biblique vient nous ramener à l’essentiel : Dieu et les autres. Plus tard, Jésus nous dira : Amour de Dieu et amour du prochain. Il précisera même que le prochain c’est celui dont je me fais proche. Saint Jean résumera ces deux commandements en un seul : “Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés”. Il précisera que la seule façon d’aimer Dieu c’est d’aimer les autres. Celui qui prétend aimer Dieu qu’il ne voit pas et n’aime pas son prochain qu’il voit est un menteur. Voilà ce programme qui nous est proposé pour ce temps du carême : Revenir vers Dieu, nous laisser guider par sa Parole et le suivre sur le chemin qu’il nous montre.

Dans la seconde lecture saint Paul nous invite à faire un pas de plus. La loi de Moïse c’est quelque chose d’important car elle ouvre à la vie. L’homme est appelé à s’y conformer. Cette loi nous montre le péché mais elle ne sauve pas. Le seul qui peut nous sauver c’est Dieu. Si nous voulons comprendre quelque chose à l’amour de Dieu c’est vers la croix du Christ qu’il nous faut regarder. A l’époque, c’était absolument impensable de prêcher un Messie crucifié. Les crucifiés de l’époque étaient soit des terroristes, soit des assassins. Or Jésus a accepté la mort la plus redoutée et la plus méprisée. Il voulait ainsi signifier que l’amour du Père pour l’humanité allait jusqu’au bout de l’infinie tendresse. C’est la folie de Dieu qui fait confiance à tout homme. Aimer comme Dieu aime ne se comprend qu’en regardant la croix. /// Dans l’évangile de saint Jean, nous voyons Jésus très en colère contre les vendeurs du temple. Pourtant ce commerce était bien commode pour les sacrifices. Mais Jésus s’en prend précisément à ceux qui confondent commerce et religion. A cause d’eux, la maison de Dieu est devenue “une maison de trafic”. Il ne supporte pas que les vendeurs de colombes pressurent les fidèles les plus pauvres ni que le culte rendu à Dieu devienne une source de profit illicite.

Il nous faut aller plus loin dans la compréhension de l’évangile. En purifiant le temple, Jésus veut nous apprendre à purifier notre prière. Au temps de Jésus, beaucoup venaient offrir le mouton pour que Dieu les fasse réussir dans leurs affaires. Or Dieu n’a que faire de la boucherie des autels. Il nous appelle à convertir notre prière. Se convertir c’est faire un demi-tour. Les bruits d’argent, tous les calculs que nous pouvons faire sont une insulte à la grandeur de Dieu.

Concernant la prière, il nous faut remettre les choses en place : On ne prie pas pour faire connaître nos besoins à Dieu mais parce qu’il les connaît. On ne prie pas pour être aimés de lui mais parce qu’il nous aime. On ne prie pas pour qu’il soit avec nous dans les bons et les mauvais jours mais parce qu’il est avec nous. Ce n’est pas l’homme qui agit sur Dieu. C’est Dieu qui voudrait bien agir dans le cœur de l’homme. C’est un peu comme lorsque nous ouvrons les volets d’une maison : ce n’est pas nous qui avons fait lever le soleil. C’est nous qui lui avons permis d’entrer dans la maison et de l’illuminer. Pour la prière c’est pareil : ce n’est pas nous qui rappelons à Dieu qu’il doit nous éclairer, mais c’est nous qui lui permettons de nous éclairer. Prier c’est ouvrir les portes et les fenêtres de notre cœur pour accueillir la lumière de Dieu. Cette prière n’est pas un trafic avec Dieu. Elle est accueil de son amour gratuit.

Le seul sacrifice agréable à Dieu c’est celui que le Christ fait de lui-même. De plus le temple dont les juifs sont si fiers n’est qu’un temple de pierre construit par un païen. Plus tard, il sera détruit. Jésus nous annonce que le seul vrai temple de Dieu c’est son corps. Il est la présence de Dieu parmi les hommes. Tout cela, les disciples ne l’ont compris qu’après la résurrection du Christ.

Autre message de ce jour : notre cœur est lui aussi un temple. Un temple dans lequel nous sommes invités à accueillir Dieu, et dans lequel il y a sans doute bien des choses encombrantes, des choses à jeter, d’autres qui nous polluent et menacent de nous étouffer. Ce n’est qu’en faisant le ménage en nous que nous pourrons y retrouver Dieu. C’est à ce prix que nous pourrons éviter l’étouffement de notre vie et notre relation avec Lui. Ayons le courage de faire ce ménage de Pâques pour accueillir dignement en nous le Christ ressuscité !

Homélie du 25 février 2024 — 2e dim. du Carême — Frère Hubert
Cycle : Année B
Info :

Année B - 2° dim de Carême - 25 février 2024

Gen 22 1-2,9-13, 15-18 ; Rom 8 31-34 ; Mc 9 2-10

Homélie du F. Hubert

Texte :

Il est heureux que la réforme liturgique de Vatican II ait placé le récit de la Transfiguration

au 2e dimanche de Carême, à chacune des trois années liturgiques.

Car la Transfiguration de Jésus n’est pas un en-soi – une « bulle » dirait -on aujourd’hui –

ce qu’avec erreur nous pourrions conclure de la fête du 6 août :

elle n’a son sens qu’au sein de l’itinéraire entier de Jésus et de son compagnonnage avec ses disciples.

Jésus en effet venait de questionner ses disciples : « Pour vous, qui suis-je ? »

Pierre, après avoir répondu : « Tu es le Christ »,

s’était violemment opposé à son maître qui, pour la première fois leur annonçait :

« Le Fils de l’homme doit souffrir beaucoup, être rejeté et tué ».

Annonce incompréhensible, inacceptable.

Jésus avait réagi vivement : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu. »

La Transfiguration est une réponse existentielle à ce carrefour de routes,

tant pour Jésus que pour les disciples.

Jésus est transfiguré, resplendissant de gloire ; de la nuée, la voix divine se fait entendre :

« Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le ».

La Transfiguration à ce moment-là, après cette première annonce de de la Pâque de Jésus,

vient confirmer que les pensées de Dieu sont des pensées de vie et de plénitude.

Jésus, en annonçant sa Pâque, y adhère.

Par ce chemin d’épreuve et de mort, il choisit non la mort mais la vie, pour lui

et pour la multitude des hommes qu’il est venu chercher pour les emmener dans le cœur de Dieu.

Face à cette adhésion de Jésus, le Père exulte, de la communion d’amour de son Fils avec lui,

de la communion d’amour de son Fils avec l’humanité.

Jésus, vrai homme, adhère sans réserve au projet de la Trinité : sauver, sanctifier toute l’humanité.

Cela ne s’est pas fait sans combat.

Dans son humanité, Jésus a dû écouter son Père,

choisir sa volonté, au vu des évènements qui lui étaient donné de vivre.

S’il a traité Simon de « Satan », c’st qu’il était tentation, pierre d’achoppement, à ce moment-là.

Comme nous, il a dû choisir entre sa volonté propre et sa volonté profonde unie à celle de son Père. Les tentations que les évangélistes placent aussitôt après son baptême, sont bien le témoignage qu’il a dû combattre et choisir, dans son être d’homme tout au long de sa vie.

La Transfiguration est la manifestation, en ce moment crucial,

que Jésus a choisi le chemin de la vie et de l’amour,

non celui de son « petit moi », pourrait-on dire, qui est stérile et ne conduit qu’à la mort.

Jésus a dû se dépouiller de lui-même, dépasser ses peurs d’homme,

ses peurs de la souffrance et de la mort, ses angoisses,

pour choisir le chemin qui ouvrirait la vie divine à toute l’humanité

et lui donnerait de la ramener vivante et aimante dans le sein du Père.

« Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le ».

Écoutez-le en toute circonstance, mais en particulier quand il vous dit :

« Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté et tué »…

Déjà, au seuil de l’Evangile,

c’est alors que Jésus, le seul Juste, venait de faire corps

avec tous ceux qui se faisaient baptiser par Jean « en reconnaissant leurs péchés »,

que la voix divine s’était fait entendre :

« Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie ».

Jésus a reçu la manifestation de sa filiation et de sa gloire

aux moments où le récit évangélique nous le montre prendre la place des hommes

auxquels il vient révéler l’amour du Père,

prendre la place des pécheurs, faire corps avec eux,

prendre sur lui leur fardeau de mal, de péché, de malheur.

« Tel père, tel fils », dit le dicton populaire.

Pour Jésus, on peut l’inverser en toute vérité et dire : tel est le Fils, tel est le Père.

« Qui me voit, voit le Père ».

Le Père se reconnaît en Jésus qui fait corps avec les pécheurs que nous sommes.

Jésus a pris sur lui notre mal et nos refus

pour nous guérir et nous faire accéder à la vie.

« Dieu l’a fait péché pour que nous devenions justice » dit Paul.

Jésus n’a pas choisi la souffrance et la mort, mais la vie, la vie en abondance pour la multitude.

Dieu ne dit à personne : « Je ne veux pas de toi ».

Aussi, Jésus a accepté d’être défiguré pour que nous soyons transfigurés.

« Qui est-il celui-ci ? » est la grande question qui traverse tout l’Evangile de Marc.

Jésus se révèle au rebours de toute la compréhension que l’on avait – que nous avons -

du Messie et de sa venue.

Nos chemins sont tellement loin des chemins de Dieu, nos pensées loin des pensées de Dieu,

nos réflexes de pouvoir et de puissance loin de l’humilité de Dieu.

Entre les pensées des hommes et les pensées de Dieu, il faut choisir.

La logique de Dieu n’est pas notre logique du pouvoir, de la puissance qui domine,

mais celle du Don.

Jésus a choisi.

« Le Christ s’est abaissé jusqu’à la mort. C’est pourquoi Dieu l’a exalté ».

Au jardin des Oliviers, Jésus a choisi la vie offerte à tous, partagée à tous,

il a accepté de boire la coupe amère pour que tous aient part au vin du Royaume.

Il a accepté la déréliction pour que tous aient part à la bénédiction.

Il a traversé la mort pour ramener un peuple de vivants.

Tout à l’heure, nous allons chanter :

Jésus, Christ et Seigneur, Librement, tu t'es engagé Sur la voie du Serviteur Mourant dans l'ombre. L'amour a donné sa réponse : Ton corps se transfigure, Il tient tout dans sa clarté.

La Transfiguration est une fenêtre ouverte momentanément sur la gloire de la Résurrection,

lorsque la Parole sera retournée à son origine en ayant accompli toute sa mission.

Que l’Esprit Saint nous apprenne, jour après jour, à devenir chrétiens !

Homélie du 18 février 2024 — 1er dim. du Carême — Frère Cyprien
Cycle : Année B
Info :

Année B - 1er Dim Carême - 18 février 2024

Gen 9/8-15, 1 Pi 3/18-22, Mc 1/12-15

Homélie du F. Cyprien

Texte :

" je me souviendrai de mon alliance entre moi, vous et tout être vivant quel qu'il soit; les eaux ne deviendront plus jamais un Déluge qui détruirait toute chair. (Genèse (TOB) 9)

18 En effet, le Christ lui-même a souffert pour les péchés, quand se prolongeait la patience de Dieu

12 Aussitôt l'Esprit pousse Jésus au désert. 13 Durant quarante jours, au désert, il fut tenté par Satan.

14 Après que Jean eut été livré, Jésus vint en Galilée. Il proclamait l'Évangile de Dieu et disait:

15 " Le temps est accompli, et le Règne de Dieu s'est approche, convertissez-vous et croyez à l'Évangile.

En accrochant son arc dans le ciel, Dieu suspend sa colère : avant le régime de la Grâce, avant l’envoi de l’Esprit Saint, répandu en abondance, déjà Dieu fait grâce.

Et le temps du Carême c’est pour nous chrétiens le temps de prendre parti pour Dieu, de reprendre parti pour Lui.

Ne vivons-nous pas, encore maintenant, un temps où se prolonge la patience de Dieu ?

L’année liturgique, l’organisation de la prière de l’Eglise est un bel et bon chemin pour nous aider dans l’attention, dans la foi, dans la confiance que le Seigneur nous fait.

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= Il y a le temps ordinaire qui couvre une bonne partie de l’année …jusqu’à la perspective du retour du Christ, l’Avent.

= Il y a surtout Pâques : nous y fêtons la Vie avec Dieu, la Vie redonnée, la vie du Ressuscité qui nous est communiquée. Il y a le, le temps du Carême est un temps de la préparation… Le mot Carême est la transformation du mot « Quadragesima », qui est devenu « quarantaine » dans notre vocabulaire : avant Pâques les chrétiens se mettent en quarantaine… comme Jésus qui s’est retiré quarante jours au désert.

Est-ce que cela parle encore aux chrétiens comme préparation, comme montée vers Pâques ? Pour les pratiquants les plus réguliers, oui, bien sûr, et pour beaucoup, le Carême évoque plus en comparaison le Ramadan des musulmans, …ramadan temps moins long et très typé. C’est bien de relier les pratiques religieuses pour les comprendre …Ce qui surprend avec l’Evangile et Jésus, c’est la liberté de Jésus face aux pratiques de ses contemporains…Pour le jeûne, il en parle sans donner de consignes pour le temps qui viendra ; après lui ses disciples jeûneront, oui et Jésus met surtout en garde contre le formalisme, contre l’hypocrisie qui guettent toutes les pratiques…

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En fait la vie chrétienne dans l’Esprit de Jésus implique une façon de vivre où la prière, l’aumône et le jeûne sont liés : ils sont une seule et même pratique pour aider le fidèle à ne pas oublier sa vie de baptisé : rien d’étonnant de retrouver cela dans les autres religions…

La liturgie et la prière nous demandent une cohérence dans notre vie de foi : les dangers sont connus : le formalisme, la bonne conscience, et tout ce qui éloigne d’une démarche vraiment personnelle, vraiment spirituelle, foi et espérance vivantes, pratique de charité authentique. C’était déjà la prédication du prophète Isaïe sur le jeûne,…« le jeûne qui plait à Dieu ».

Prière, Aumône, Jeûne

= Prière : c’est prendre le parti de Dieu, mettre Dieu en premier dans sa vie ;

= L’aumône, c’est prendre le parti de l’autre, de celui qu’on oublie si facilement…!

= Le jeûne, c’est prendre le parti de l’Esprit dans notre condition d’hommes, de femmes : nous n’avons pas le droit d’abuser des biens et nous abimer nous-mêmes.

Jeûner ne serait-ce pas apprendre à lutter contre la peur de manquer… ?

Prendre le parti de la « sobriété heureuse » (expression du pape François), faire attention à Dieu et aux autres en restant à notre place de modeste consommateur, d’habitant de la

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maison commune, sachant nous priver pour ne jamais oublier celui à qui manque le nécessaire ?

Partant de tout cela, il faut évoquer aussi la place de la il ne va pas nous dispenser de lutter pour mieux vivre et pour vivre à son service : le temps du Carême sera le temps de mendier sa Grâce pour être forts et joyeux dans la fuite du mal, dans cette joie d’être un peu mieux ajustés à sa Volonté. Nous sommes sûrs qu’Il nous donnera sa paix dans le combat, si nous voulons avancer avec Lui.

Oui, Dieu est un Père qui nous veut vivants : il ne va pas nous dispenser d’être vivants et désirants … il veut nous conduire vers une liberté authentique, non pas une liberté sans tentation ni échec, mais une vie où la relation à Lui, aux autres, à nous-mêmes rend nos cœurs de plus en plus heureux, parce qu’il y a « plus de joie à donner qu’à recevoir », parce qu’…il n’y aura jamais que Dieu pour nous combler…

Chers f. et S., nous savons bien que c’est Lui qui nous prépare cette béatitude… ce bonheur d’être et de vivre en fils et filles de Dieu. Nous avons besoin de ce temps pour apprendre la vraie Vie, la Vie de Jésus ressuscité, celle que nous recevons déjà dans l’Eucharistie, la vie divine qui advient dans nos cœurs, coeurs qui veulent croire, espérer, aimer…

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Homélie du 14 février 2024 — Mercredi des Cendres — Père Abbé Luc
Cycle : Année B
Info :

B - Mercredi des CENDRES - 14.02.2024

Jl 2, 12-18 ; 2 Co 5, 20-6, 2 ; Mt 6,1-6, 16-18

Homélie du Père Abbé

Texte :

Frères et Sœurs,

Dans sa règle, St Benoit invite les moines à « attendre la sainte Pâque dans la joie du désir spirituel ». En d’autres termes, il nous entraine à raviver notre désir en sa dimension la plus profonde, sa dimension vitale et existentielle : le désir de vivre pleinement dans la vie du Christ Ressuscité. Ce carême s’offre à nous comme une pédagogie pour revenir au lieu de notre désir spirituel, au lieu de notre cœur, ce foyer qui concentre toutes nos énergies d’amour et d’intelligence, de volonté.

Le prophète Joël nous a adressé des mots forts de la part du Seigneur : « revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne les larmes et le deuil, déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements… » Comment comprendre cette parole « déchirez vos cœurs », nous qui voulons retrouver le lieu de notre cœur ? D’un point de vue physique, si on déchire notre cœur, on le fait périr, c’est la mort immédiate. Le parallèle fait avec le vêtement rappelle cette coutume, dont on a trace dans les évangiles, selon laquelle on déchire ses vêtements, en signe d’indignation face à une atteinte faite à la majesté de Dieu, et sûrement aussi en signe de pénitence. On déchire son vêtement comme pour signifier que quelque chose est brisé dans la relation entre l’homme et Dieu. En invitant à déchirer son cœur, le prophète invite de la même manière le peuple et chacun de nous à prendre conscience que par notre péché nous avons rompu l’alliance avec Dieu. Et il poursuit, en espérant qu’une relation pourra se rétablir : « Qui sait, le Seigneur pourrait revenir, il pourrait renoncer au châtiment et laisser derrière lui sa bénédiction, alors vous pourrez présenter offrandes et libations au Seigneur votre Dieu ».

Déchirer nos cœurs pour mieux retrouver une vivante alliance avec notre Dieu et avec nos frères… Déchirer nos cœurs par le jeûne, les larmes et le deuil. Aujourd’hui nous dirions peut-être davantage avec la tradition de l’Eglise, déchirer nos cœurs par le jeûne, la prière et le partage. Par le jeûne, déchirer cette part insouciante en nous qui peut oublier qu’elle reçoit tout des mains de son Créateur, ou bien qui peut penser que tout son plaisir est dans l’assouvissement de ses désirs immédiats de consommer… Par la prière, déchirer cette part de superbe qui peine à demeurer dans la relation de confiance et de gratitude avec son Dieu ou bien encore qui s’estime pouvoir se débrouiller seule… Par le partage, déchirer cette part qui nous centre sur nous comme si nous étions seul au monde pour reprendre conscience que nous sommes faits pour l’échange et le don. Avec les jours qui passent, notre cœur a tendance à se draper dans toutes sortes de protection ou de justifications, qui obscurcissent son jugement, ralentissent son élan et finalement peuvent l’enferment sur lui-même… toutes ces protections ou justifications sont comme les mauvaises herbes de notre jardin, qu’il faut sans cesse recommencer à enlever. Ce temps de Carême s’offre à nous comme un chemin de grâce, la grâce du Seigneur qui nous accompagne pour retrouver la joie profonde de notre cœur d’être en alliance avec lui, la joie d’être fait pour vivre de sa vie de ressuscité. En marche vers Pâques, acceptons d’aller avec lui au désert de notre cœur parfois bien enherbé et désolé. Acceptons maintenant d’être marqué par la cendre en signe de notre désir de revenir à Dieu et vers nos frères. Le Seigneur veut nous sauver.