vendredi 7 novembre 2025 : journée de solitude pour la communauté
(eucharistie vers 6h45, juste après Laudes). 

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 02 février 2023 — Présentation du Seigneur — Père Abbé Luc
Cycle : Année A
Info :

PRESENTATION DU SEIGNEUR - 02.02.2023

Ml 3, 1-4 ; Lc 2, 22-40

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Ce jour de fête de la présentation du Seigneur est souvent appelé aussi, fête de la lumière, ou encore fête de la rencontre. L’Eglise en a fait aussi la fête de la vie consacrée. Ces appellations variées disent la richesse de sens que cette fête offre. Ce matin, je retiendrai le thème de la rencontre, la rencontre de Marie et Joseph avec Syméon, puis avec Anne. Une rencontre improbable ou paradoxale aurait dit un ami du monastère, Pierre Boulanger décédé aujourd’hui, qui s’était intéressé à toutes ses rencontres étonnantes qui jalonnent nos vies alors qu’elles auraient eu normalement toutes les chances de ne pas avoir lieu.

Qu’est-ce qui fait que cette rencontre a pu avoir lieu ? De part et d’autre, nous trouvons des personnes qui sont pleinement engagées dans leur dynamisme propre de vie. Les parents de Jésus remplissent leur devoir de croyants en venant présenter leur enfant nouveau-né après le temps prescrit de Moïse, et offrir les sacrifices demandés. Syméon est un croyant enraciné dans sa foi, vivant une attente active sous la conduite de l’Esprit Saint. Il se laisse guider étroitement par l’Esprit. Anne est elle aussi une femme fervente toute donnée au service du Seigneur dans le jeûne et la prière. Entre ces personnes animées par la fidélité à la Loi, et par l’écoute de l’Esprit, la rencontre va pouvoir se vivre et faire sens pour chacun d’eux. Ce premier point peut-être un encouragement pour chacun de nous, lorsqu’il nous semble que la monotonie des jours n’apporte rien de nouveau et que le quotidien peine à faire sens. Avec persévérance, vivons nos fidélités, vivons à l’écoute de l’Esprit qui pourra ouvrir un chemin où le Seigneur nous parle à travers nos rencontres ordinaires mais aussi inattendues. Le Seigneur entend ce dont nous avons besoin.

Ces rencontres de notre évangile révèlent aussi à chacune des personnes, et le mystère du Christ et quelque chose d’elle-même. Au milieu de Syméon, Marie et Joseph, se trouve Jésus, enfant. Il ne parle pas. Mais pourtant il éclaire. Il illumine par tout ce qu’on dit de lui. Syméon le révèle, et Marie et Joseph accueillent cette révélation. Mais encore, à la manière d’un cierge allumée dans la nuit qui éclaire les visages des personnes alentour, Jésus est la lumière qui révèle aussi le mystère des personnes qui sont là. Il révèle le visage de Syméon prophète, mais surtout celui de Marie en ce qu’elle va participer à la souffrance à venir de son fils. N’en est-il pas ainsi dans beaucoup de nos rencontres dans lesquels on croit que Jésus se tient au milieu de nous croyants. Nous parlons de lui. Son mystère se révèle aux uns et aux autres. Nous parlons de lui qui est là au milieu de nous, et notre propre visage de fils et fille de Dieu se révèle.

Rendons grâce en ce matin pour toutes ces rencontres illuminées par la présence du Christ dans nos vies de croyants. Que notre foi en la présence du Christ Vivant au milieu de nous vienne aviver notre confiance en nos partages et en nos rencontres qui nous nourrissent.

Homélie du 29 janvier 2023 — 4e dim. ordinaire — Frère Vincent
Cycle : Année A
Info :

Année A - 4ème dimanche ordinaire - 29 janvier 2023

So 2.3; 3 12-13 ; 1 Co 1 26-31 ; Mt 5 1-12a

Homélie du F. Vincent

Texte :

Les textes bibliques de ce dimanche nous adressent un appel à nous convertir. Nous avons tout d’abord celui du prophète Sophonie. Il vient de dé-noncer la violence et les fraudes chez les hauts fonctionnaires, le scandale et les injustices de toutes sortes. Ils sont nombreux ceux qui délais-sent le Seigneur et se tournent vers les divinités païennes. En laissant l’injustice et le mensonge l’emporter, on court vers le malheur. Et c’est ce qui est arrivé au peuple. Il a fini par se retrouver exilé en terre étrangère.

Mais tout n’est pas perdu : le Seigneur va pouvoir s’appuyer sur ceux qui le cherchent en toute justice et humilité. Ces humbles qui s’en re-mettent à Dieu ne sont pas nombreux. Ne pouvant s’appuyer sur des moyens humains, ils mettent toute leur confiance en Dieu. Alors Dieu va les rassembler ; ils vivront dans la justice et la vérité. Ils trouveront enfin le repos et la sécurité. Toute la Bible nous parle d’un Dieu qui a vu la misère de son peuple et qui veut le sauver.

Dans la seconde lecture, saint Paul s’adresse aux chrétiens de Corinthe. Dans cette ville, se trouvent une riche minorité d’intellectuels et de commerçants mais aussi une forte majorité de dockers et d’esclaves. Paul y a séjourné dix-huit mois pour faire entendre l’Évangile. Mais après Sophonie et d’autres prophètes, il fait le même constat que Jésus a pu faire lui aussi : ceux qui se sont laissé enthousiasmer par la Bonne Nouvelle de l’Évangile ce sont des petites gens ; ils ont compris que l’argent, la science et le pouvoir ne peuvent les sauver. Ils mettent toute leur con-fiance dans l’amour fou de Dieu pour tous les hommes. Lui seul peut les sauver.

Ces deux lectures nous ont préparés à recevoir le message de l’Évangile des béatitudes. Nous y voyons Jésus s’adresser aux pauvres, à ceux qui sont assoiffés de justice, aux cœurs purs, aux artisans de paix, à ceux qui sont persécutés. La situation des uns et des autres ne correspond guère à l’idée que nous nous faisons du bonheur. Le monde met en avant celui des riches et des puissants. Mais en y regardant de près, nous voyons bien que leurs richesses et leur puissance ne peuvent vraiment les combler.

Aujourd’hui le Christ nous parle du bonheur des pauvres, des lé-preux, des exclus. Leur rencontre avec lui est la chance de leur vie, et la nôtre. La source de notre bonheur c’est le Royaume de Dieu. Nous sommes loin des valeurs véhiculées par la société dominante d’aujourd’hui, de ses apprentis dictateurs et de ses slogans publicitaires. Tous nous disent : “Soyez les plus forts”… “Devenez scandaleusement riches…” Rap-pelons-nous ce que nous dit saint Paul : “Ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour couvrir de confusion ce qui est fort. »

Oui ! “Heureux les pauvres de cœur, les doux, ceux qui pleurent, les cœurs purs, les miséricordieux, ceux qui sont persécutés…” En fait, Jésus ne fait que dresser son propre portrait : quand Dieu prend chair, de la crèche à la croix, il est le pauvre, le doux, le miséricordieux ; il pleure avec la veuve de Naïm et les sœurs de son ami Lazare ; il est artisan de paix avec les lépreux, les publicains, Nicodème et la samaritaine. Il est comme l’agneau au milieu des loups, persécuté jusqu’à la mort au milieu des brigands.

La Bible de Chouraqui a traduit ce mot “Heureux” par “En avant”. C’est un appel pour les pauvres, les petits, les persécutés à se lever et à se mettre en marche à la suite du Christ. C’est en lui et avec lui que nous trouverons le vrai bonheur. Même quand tout va mal, il est là avec nous. Il vient nous habiter et nous combler de sa joie. Sa présence et son amour ne peuvent que nous rendre heureux.

Ce bonheur que nous trouvons en Dieu, il nous faut le communiquer à ceux qui nous entourent. Et pour cela le Christ a besoin de nous. L’Évangile c’est une lumière qu’il nous faut transmettre autour de nous à tous ceux qui nous entourent, en particulier à tous les blessés de la vie. Le Seigneur nous demande d’être les témoins de son amour partout dans le monde. C’est en vue de cette mission que nous nous sommes rassemblés pour nous nourrir de la Parole du Christ et de son Eucharistie. Soyons, chacun, là où nous sommes, les témoins de la bonne nouvelle de ce dimanche : « Heureux les pauvres… »

(sources diverses)

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Homélie du 01 janvier 2023 — Sainte Marie, Mère de Dieu — Père Abbé Luc
Cycle : Année A
Info :

Année A - SAINTE MARIE MERE DE DIEU - 01.01.2023

Nb 6, 22-27 ; Ga 4, 4-7 ; Lc 2, 16-21

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

L’année qui s’ouvre nous entraine à poursuivre notre pèlerinage à la rencontre de Dieu vers lequel, chacun et notre monde, nous nous acheminons. Nous sommes partie prenante de l’histoire en marche qui se déroule et à laquelle nous apportons modestement notre pierre, là où nous sommes. Cette histoire, avec ces aspects bien chaotiques et son lot de souffrances, nous la croyons sainte. Car dès la Création Dieu l’accompagne dans un mystérieux enfantement. Et depuis la venue de son Fils parmi les hommes, son œuvre, son projet, s’est manifesté plus clairement à nos yeux et à notre intelligence. Dieu veut faire de nous les humains des fils et des filles de Dieu, en Jésus son Fils. Il désire faire de nous des frères et des sœurs sous son regard paternel très aimant.

Comment faire pour que ce regard de foi illumine et nourrisse vraiment notre quotidien ? Comment faire pour que l’intelligence du projet de Dieu sur l’humanité devienne plus vive en nous et qu’elle nous transforme en des instruments toujours plus dociles de l’œuvre de Dieu ? De chaque lecture entendue ce matin, je retiendrai un point qui peut être pour nous comme un outil à mettre en œuvre dans notre quotidien.

Chaque matin, nous placer toujours sous la bénédiction de Dieu. Dans la première lecture, Dieu révèle à Moïse, qu’il n’a qu’un désir, nous bénir et tourner vers nous son visage. Au début de nos journées, plaçons-nous sous la bénédiction de Dieu, par un temps de prière, même très bref, en reconnaissant que la vie offerte et le souffle donné, nous viennent de Lui. Présentons-nous comme des vivants étonnés du cadeau de la vie et offrons-lui notre disponibilité à faire son œuvre. Il nous bénira. Cela ne veut pas dire qu’il nous épargnera les épreuves, mais il sera là avec nous pour les traverser et pour en faire quelque chose pour son œuvre.

Avec Marie, apprendre à scruter et comprendre les évènements petits et grands qui se passent dans nos vies. Comme elle, les retenir et méditer, les confronter avec la Parole de Dieu. Apprenons à ne pas laisser les jours filer sous nos yeux, soit en nous grisant dans les soucis ou les plaisirs, soit en oubliant. Mais accueillons leur goût et leur saveur, leurs questions et leurs épreuves, pour mieux repérer que cette trame des jours est le terreau dans lequel Dieu nous a placés pour porter tout notre fruit. Prenons un rendez-vous régulier avec la méditation des Ecritures. Ce RV quotidien ou hebdomadaire sera une école pour apprendre à lire et relire nos vies à la lumière de l’histoire sainte passée, conduite par Dieu depuis le commencement. Comme il a conduit le peuple d’Israël, il désire nous conduire en Eglise et nous aider à découvrir le sens de ce que nous vivons, parfois bien à tâtons.

Dernier outil offert pour entrer dans cette année nouvelle, avec Paul, apprenons chaque jour à nous tenir à l’écoute de l’Esprit. Repérons Celui qui murmure en nous le nom du Père. Oui, accueillons ses mouvements de prière qui nous tournent vers notre Père. Laissons l’Esprit nous conforter dans la confiance heureuse d’être des fils et filles de Dieu. Inséparablement, laissons-le agir quand il nous oriente vers nos frères. Oui, consentons à ces mouvements intérieurs qui nous sortent de nous-mêmes et des seules préoccupations de nous-mêmes, pour aller à la rencontre des autres. L’Esprit allume pleins de petits signaux dans notre quotidien pour ouvrir nos yeux et nos oreilles aux besoins de nos frères et sœurs. Ne les étouffons pas.

En cette eucharistie, laissons-nous entrainer dans la vie des fils en rendant grâce à Dieu, à la suite de Jésus notre Seigneur et notre frère.

Homélie du 25 décembre 2022 — Noël - Messe du jour — Père Abbé Luc
Cycle : Année A
Info :

Année ABC - Messe duJour de Noel - 25 décembre 2022

Is 52 7-10 ; Heb 1 1-6 ; Jn 11-18 ;

Homélie du F. Guillaume

Texte :

Frères et sœurs,

En ce jour de Noël, jour de grande fête et de joie nous ne célébrons pas que la seule naissance de Jésus à Bethléem, mais une tripe naissance de Dieu, selon un thème traditionnel de la spiritualité chrétienne. Il y a en effet une naissance de Dieu en lui-même, il y a la naissance du Fils de Dieu en notre chair, et il y a la naissance du Verbe de Dieu en nous-même, en notre âme.

La 1ère naissance sans doute la plus profonde et la plus mystérieuse est celle que nous contemplons dans le Prologue du 4ème Evangile, qui vient d’être chanté solennellement. Naissance éternelle du Verbe au cœur de la Trinité. Au commencement était le Verbe, la Parole de Dieu, et le Verbe était tourné vers Dieu, et le Verbe était Dieu. La suite du texte précise que ce Verbe est le Fils du Père, plein de grâce et de vérité.

Chaque dimanche et aujourd’hui encore dans un instant, nous professons dans le Credo de l’Eglise que le Christ est le Fils Unique de Dieu né du Père avant tous les siècles. Il est Dieu, né de Dieu, lumière née de la lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu engendré, non pas créé et de même nature que son Père. Cet engendrement, cette naissance dans l’éternité échappe au temps et à l’histoire. Elle échappe aussi à notre compréhension et dépasse infiniment les limites de notre entendement, mais nous l’affirmons cependant dans la foi et dans l’amour. Pour nous chrétiens, cette 1ère naissance de Dieu doit demeurer l’objet de notre émerveillement et de notre adoration. Elle est source de joie.

La seconde naissance, celle de l’enfant Dieu à Bethléem qui nous a été rapportée par l’évangile de la messe de minuit, nous est plus familière. Il est plus facile de la raconter aux enfants et elle a été préparée par les calendriers de l’Avent et la réalisation des crèches. Pourtant, cette seconde naissance n’en est pas moins paradoxale ou scandaleuse, voire même folle et impossible à admettre pour qui ne partage pas notre foi. Aucune sagesse païenne, aucune religion ne peut envisager une telle naissance d’un Dieu sur la terre des humains. C’est le mystère de l’Incarnation.

Jésus, le Christ, est né d’une femme, la Vierge Marie, lorsque les temps furent accomplis. Et Dieu a pris les traits de visage d’un bébé, d’un garçon, d’un homme.

Saint Paul dans sa lettre aux Philippiens dira qu’il n’a pas retenu jalousement son rang d’être l’égal de Dieu, mais qu’il s’est dépouillé, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes et par son aspect, il était reconnu comme un homme, et il s’est abaissé dans l’obéissance à son Père, jusqu’à mourir sur une croix.

Autant que pour la 1ère naissance du Verbe dans son éternité, nous avons à nous émerveiller et à nous réjouir de cette 2nde naissance du Verbe dans notre humanité.

Mais ces deux naissances ne présenteraient guère d’intérêt et resteraient extérieures et étrangères à nous, si elles ne s’actualisaient pas présentement en chacun de nous, à l’intime de chacune de nos âmes. C’est le dominicain Maître Echkart qui au Moyen Age, en reprenant une idée d’Origène a longuement développé cette naissance de Dieu qui se produit en nous, en notre âme, et c’est cela qui importe, dit-il. Dieu pénètre ici le fond de l’âme. Personne d’autre ne peut entrer dans le fond de l’âme sinon Dieu seul.

Cette 3ème naissance du Verbe de Dieu à l’intime de notre être permet de rendre compte du vouloir profond de Dieu en s’incarnant. Dieu se fait homme afin que l’homme puisse devenir Dieu, comme l’affirmaient les Pères de l’Eglise. Dieu veut rendre à l’homme sa dignité d’être créé à son image et à sa ressemblance, dignité qu’il a perdue et qu’il perd encore par le péché et c’est toute la raison du sacrifice pascal du Christ dans sa naissance, sa vie, sa mort et sa résurrection. Noël et Pâques sont ainsi inséparables et nous les célébrons ensemble à chaque eucharistie.

Pour terminer, je reprendrai les termes de l’une des préfaces de la nativité qui nous fait chanter à Dieu : « lorsque ton Fils prend la condition de l’homme, la nature humaine en reçoit une incomparable noblesse ; il devient tellement l’un de nous que nous devenons éternels » .

Homélie du 24 décembre 2022 — Noël - Messe de minuit — Père Abbé Luc
Cycle : Année A
Info :

Vigiles de NOEL 2022

Is 9, 1-6 ; Tt 2, 11-14 ; Lc 2, 1-14

Texte :

« Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur » !

Frères et sœurs,

Comment pouvons-nous entendre cette Bonne Nouvelle aujourd’hui ? De quel Sauveur et de quel Salut, avons-nous besoin ? Avec notre monde, nous sommes habités par des questions fortes : les dangers qu’une guerre se généralise, les inquiétudes face au climat, les incertitudes économiques et sociales face à la crise énergétique, et dans notre Eglise, le poids des révélations d’abus qui minent la confiance. Si nos questions sont bien différentes de celle du peuple juif qui accueillait le Christ, il a 2000 ans, elles sont cependant l’expression d’une même attente existentielle, attente de sens, de lumière et de force pour poursuivre le chemin. Quelle parole de salut et d’espérance, cette fête de Noël, vient-elle nous apporter ? Des textes que nous venons d’entendre, je retiens trois mots : lumière, justice et piété qui peuvent nous aider à reconnaitre aujourd’hui Jésus comme notre Sauveur.

Lumière. Dans les ténèbres, dit le prophète Isaïe, une lumière a resplendi. Oui, comme pour le peuple juif autrefois, la naissance de Jésus resplendit comme une belle lumière pour nous aujourd’hui. Lui que nous reconnaissons dans la foi, comme « le Dieu fort, conseiller merveilleux, Prince de la Paix », nous sauve de la tentation de toujours rechercher ce qui brille, et de nous ajuster à ce qui est en vue. La vraie lumière qui guide nos vies est une lumière cachée. Elle ne se découvre qu’à ceux qui acceptent de venir s’asseoir sur la paille avec Jésus, la paille de notre humanité en sa profonde simplicité. Car Jésus dans sa naissance très démunie, pauvre et dépouillée, vient à la rencontre de qui semble indigne à nos yeux, en nous ou chez les autres. Oui, Jésus veut nous sauver de la pensée qu’il ne peut pas rejoindre certaines parts obscures de nos vies. Dans une grande proximité, il est venu illuminer nos ténèbres, nos péchés et toutes nos incohérences. Il le fait avec une lumière douce qui ne juge pas ni n’accable. Cette lumière est source d’espérance, car elle nous assure que ce qui intéresse notre Dieu, ce ne sont pas nos réussites ou nos œuvres d’éclats, mais notre humanité toute simple, jusque dans sa petitesse parfois blessée mais toujours aimable à ses yeux.

Justice. Le Christ est encore notre Sauveur, parce qu’il est venu instaurer la justice en notre monde. Non pas une justice à la manière humaine et très nécessaire, telle qu’elle est promue par les institutions et par les lois. Non, il est notre Sauveur parce que, par sa grâce, il nous rend capable de vivre « dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice », comme l’affirme avec force Paul. Jésus nous a rachetés et purifiés de nos péchés, pour faire de nous « un peuple ardent à faire le bien ». Oui, Jésus nous sauve, non pas en nous apportant sur un plateau, un monde juste « clé en main », mais en faisant de nous des acteurs de justice pour construire ce monde meilleur tant espéré. Par sa grâce, si nous y consentons, il nous met en route. Sa naissance apparemment insignifiante pour qui vient inaugurer le Règne de Dieu, nous invite à mettre notre confiance dans la force de sa grâce. Elle est désormais ce ferment inséré dans la pâte humaine et qui ne cesse de la travailler. Face aux machinations des puissances et des injustices que nous voyons à l’œuvre sous nos yeux, dans tant de pays oppresseurs, croyons en la force de la quête humble de la justice et du don de soi. Telles sont les armes du Dieu caché. Pouvons-nous en avoir d’autres ? Là où nous sommes, écoutons l’Esprit de Dieu, laissons-nous guider pour poser des gestes, engager de nouvelles cohérences de vie et renoncer aux convoitises, sources de tant de souffrances.

Piété. Sous ce mot moins usité aujourd’hui, nous pouvons entendre une relation de qualité qui se noue avec notre Dieu. Jésus Sauveur vient restaurer notre relation filiale de confiance avec Dieu notre Père. Aujourd’hui, Lui le vivant au cœur de son Eglise vient nourrir cette relation à travers son Eucharistie et à travers la prière. Guillaume de St Thierry dans une belle prière adressée à Dieu que nous entendions la nuit précédente, disait : « Tu as voulu que nous t’aimions, car en justice nous ne pouvions être sauvés sinon en t’aimant. Et nous ne pouvions t’aimer à moins que cela ne vienne de toi ». Oui, accueillons le salut que Jésus nous offre en nous rendant capable d’aimer Celui est l’Amour. Le Seigneur nous fait partenaire à part entière de son Alliance. Ecoutons son Esprit quand il nous inspire de nous arrêter pour nous tenir dans la prière avec confiance et respect pour faire silence ou pour dialoguer avec notre Père des Cieux. Ecoutons encore l’Esprit lorsqu’il nous suggère de prendre part aux soucis de notre Dieu pour le monde, en priant pour les personnes qui sont dans la souffrance.

Frères et sœurs, ce soir, laissons le Prince de la Paix poursuivre en nous son oeuvre de salut, lui le Vivant Ressuscité dont nous allons faire mémoire en sa mort et en sa résurrection. Il désire habiter un peu plus notre maison commune que sont l’Eglise et nos communautés humaines, ainsi que notre maison plus intime. Et pour reprendre la belle prière de Ste Elisabeth de la Trinité, nous pourrons être pour Lui, une « humanité de surcroit, en laquelle il renouvelle tout son mystère ».

Homélie du 18 décembre 2022 — 4e dim. de l’Avent — Frère Cyprien
Cycle : Année A
Info :

Année A - 4e Dim Avent - 18-12- 2022

Is 7/10-16, Rom 1/1-7 , Mt 1/18-24

Homélie du F. Cyprien

Texte :

Noël est la fête de « l’Emmanuel », en hébreu littéralement : « Dieu avec nous », et saint Irénée écrit : « Dieu vu par les hommes ».

Chers fr. et srs, n’oublions pas que l’Emmanuel il est pour nous, que l’Incarnation c’est pour nous, et cette venue demande notre collaboration … pas seulement la collaboration de Marie et de Joseph. Et cette collaboration n’est pas si évidente ni facile…comme elle ne l’a pas été pour eux non plus…

Oui, il n’est pas facile ni évident d’accueillir Dieu dans sa vie



L’Evangile de ce jour c’est l’Annonciation, mais pour ainsi dire « du côté de Joseph »… Je parlerai moins de Marie et pourtant avec Joseph celle-ci est toute proche, évidemment…

Mais avant de parler de Joseph, j’aimerais d’abord dire deux mots de Jean-Baptiste.

Jean-Baptiste, le « précurseur », cela veut dire celui qui court devant, celui qui précède Jésus : « Il marchera devant le Seigneur avec l’esprit et la puissance d’Elie », comme cela avait été prédit à son père Zacharie.

Jean, l’ascète, exemple du détachement, « prophète… et bien plus qu’un prophète », celui qui demandait la conversion des cœurs, voué par vocation à préparer la venue du Messie de Dieu…

Eh bien, Jean a fini en prison… Il pouvait le prévoir …avec sa façon de « faire la morale », de contester les puissants.

…Quand il est en prison, il entend parler de Jésus et … apparemment Jésus ne correspond pas à l’idée qu’il s’est fait du Messie. A-t-il douté ? En tout cas sa solitude de prisonnier, ses questions ont été l’épreuve de sa vie, avant qu’il annonce, malgré lui, par sa propre mort, la mort de Jésus. Jésus l’a nommé « le plus grand des enfants des hommes », à cause de ce destin singulier, …destin rude d’annoncer le Messie, et… d’ignorer jusqu’au bout le mystère d’un Messie souffrant.

Et voici donc Joseph, saint Joseph, l’homme dont Marie était la promise, le fiancé et le mari qui a adopté le Fils de Dieu, : « Avant d’avoir habité ensemble, Marie fut enceinte par l’action de l’Esprit Saint ».

Joseph, l’homme juste, … Il a eu lui aussi son moment de solitude. Le Dieu d’Israël lui demandait tout… Issu de la race de David il donnait, c’est sûr, une place à l’enfant que Marie portait : par lui cet enfant devenait fils de David; Dieu avait besoin de lui, besoin de son consentement. Qui obéirait facilement à un tel appel ?

Solitude et épreuve de Joseph… Aimant Marie il a donné à celle-ci le meilleur de lui-même, parce que Dieu était venu bousculer radicalement sa vie …

Apprendre nous aussi que Dieu peut nous surprendre, nous bousculer, semblant nous laisser seuls avec nous-mêmes ? Il permettrait ainsi de se manifester un peu mieux à nous… nous demandant d’être de meilleurs disciples ? Ces moments de solitude et de doute sont peut-être les moments où Dieu va se faire plus proche de nous, malgré le désarroi…le doute.

Nous savons que la peur, le doute sont de mauvais conseillers … Mais nous pouvons avoir aussi le sentiment que des anges se glissent parfois dans nos vies pour nous aider à franchir ces seuils, ces épreuves que nous aimerions tant éviter ?

A trois jours de Noël, n’oublions pas non plus que le nouveau-né de la crèche, cet enfant vient nous sauver du mal, de la haine, du péché… et qu’il en mourra ! Pour cette naissance, dans la nuit de Noël, nous célébrerons par l’Eucharistie la passion, la mort et la résurrection de cet enfant Jésus, le Christ, notre Sauveur.

N’ayons pas peur d’avoir, dans notre vie et dans notre prière, des moments de solitude : vivons-les en présence du Dieu qui vient et qui est toujours là… ce sera toujours pour une plus grande foi de notre part, une plus grande confiance, une plus grande paix. Dieu en Jésus s’est attaché à nous et c’est lui qui en a payé le prix fort.

Que Marie, celle qui a été comblée par Dieu, que Joseph, si proche d’elle, soient nos guides sur ce chemin : le Seigneur peut nous dérouter, nous bousculer, mais c’est pour nous combler qu’il permet cela.

Déjà à vous tous : Bonne fête de Noël !

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Homélie du 11 décembre 2022 — 3e dim. de l’Avent — Frère Hubert
Cycle : Année A
Info :

Année A - 3e dimanche de l’Avent – 11 décembre 2022

Is 35, 1-6a.10 / Jc 5, 7-10 / Mt 11, 2-11

Homélie du f. Hubert

Texte :

« Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » - Qui est Jésus ? - Voilà bien la grande question.

Gardons-nous d’une réponse trop rapide, d’enfermer Jésus dans des mots, même ceux de la foi, si justes soient-ils. Son mystère dépasse toute compréhension. - Ne cessons pas de chercher qui est Jésus. - Il est venu parmi nous pour se révéler à nous, pour nous révéler le visage de son Père, nous révéler le vrai Dieu, le Dieu vivant, le Dieu qui donne la vie. - Demandons-lui la grâce de le connaître. - Demandons-lui : « Qui es-tu ? ». Ne cessons pas de scruter l’Evangile et les Ecritures, dans l’Esprit Saint, pour le connaître avec plus de justesse, et de marcher dans la voie où lui-même a marché, pour le connaître par connaturalité.

Ecoutons l’évangile de st Matthieu que nous allons entendre tout au long de cette année : dans cet évangile, l’ange du Seigneur annonçant la naissance de Jésus à Joseph le nomme comme celui « qui sauvera son peuple de ses péchés ». - Déjà dans cette formule, Jésus est celui qui sauve, non celui qui détruit. -Il détruit les péchés, il sauve le peuple, son peuple, le peuple de ses frères abîmés par le péché. « Au milieu de vous je suis le Dieu saint, et je ne viens pas pour exterminer », disait Dieu dans la bouche du prophète Osée.

Petit bébé fragile et dépendant, Jésus est confronté à la violence des hommes, à la violence du monde, il doit fuir en Egypte dans les bras de ses parents, pour être à l’abri de la jalousie destructrice d’Hérode. - De retour en Israël, il vit toute sa jeunesse incognito, caché à Nazareth de Galilée.

Si Jean Baptiste le reconnait au Jourdain : « C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! », il l’attendait comme le Messie qui allait tout remettre en ordre, faire le tri parmi les hommes, entre bons et méchants, nettoyer son aire à battre le blé avec la pelle à vanner. Jean est bien dans la ligne de son prédécesseur Elie qui voulait exterminer tous les prêtres et les adorateurs de faux-dieux.

Jésus, lui, continue son chemin comme il l’a commencé :

il est doux et humble de cœur (Mt 11, 19), il n’écrase pas le roseau froissé, n’éteint pas la mèche faiblit » (Mt 12, 20). Il pardonne les péchés, appelle à le suivre le publicain Matthieu, guérit le serviteur d’un centurion de l’armée d’occupation. - Il n’est pas venu détruire les pécheurs. Il est venu prendre leur place pour qu’ils accèdent à la vie divine.

« C’est ainsi qu’il doit accomplir toute justice » (Mt 3, 15).

Cette manière d’être et d’agir surprend le Baptiste et le trouble jusqu’à se demander si Jésus est vraiment celui qui doit venir. « Faut-il en attendre un autre ? »

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« Rapportez à Jean ce que vous entendez et voyez », répond Jésus aux émissaires de Jean. Il ne s’agit pas d’idées mais du concret de la vie :

« Les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. »

Jésus remet debout, réconcilie, réintègre les exclus.

« Le Royaume des cieux s’est approché » (Mt 4, 17).

Il est l’Emmanuel (Mt 1, 23), Dieu avec nous, pour que nous soyons avec Dieu.

Oui, Jésus est bien « celui qui doit venir », mais il vient comme le Serviteur, ce Serviteur annoncé par Isaïe, que Jean ne semble pas avoir eu en vue : « Le juste, mon serviteur, justifiera les multitudes, il se chargera de leurs fautes » (Isaïe 53). - Jésus inaugure par sa présence même un monde nouveau, le Royaume des cieux. - C’est bien pourquoi, le plus petit dans le Royaume est plus grand que Jean. - Dans le Royaume, tout être est bien plus que le plus grand des prophètes : il est fils de Dieu, uni au Fils unique. Les temps sont accomplis.

Qui est Jésus ? Qui est Jean Baptiste ? Qui sommes-nous ?

Nous pouvons trouver une réponse, qui est un chemin, dans l’hymne de la lettre aux Ephésiens : « Qu’il soit béni le Dieu et Père de notre Seigneur, Jésus, le Christ ! Il nous a bénis. Il nous a prédestinés à être pour lui des fils adoptifs, par Jésus, le Christ. En lui, par son sang, nous avons le rachat le pardon des péchés. » - Oui, nous espérons être sauvés par le Christ, nous espérons voir Dieu, nous espérons marcher à la suite de l’Agneau, ressusciter avec le Premier-Né d’entre les morts. - Soyons disciples du Christ en prenant soin des autres pour qu’ils vivent : alors nous ferons advenir le Royaume des cieux, nous rendrons présent Celui qui toujours advient.

Homélie du 20 novembre 2022 — 34e dim. ordinaire : Christ Roi — Frère Basile
Cycle : Année C
Info :

Fête du Christ Roi C; 20 novembre 2022

2 Samuel 5, 1-3 / ps 121 ;Colossiens 1, 12-20; Luc 23, 35-43

Homélie du F.Basile

Texte :

Frères et soeurs, à quoi pensait le bon larron quand il s’est retourné vers le Christ en disant ou plutôt en criant : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume ! » A quoi pensait-il ? N’essayait-il pas de se racheter en jouant la carte de la dernière chance ? On pourrait croire qu’il exagère et que c’est un peu facile quand on est condamné d’obtenir ainsi une place gratuite dans le Royaume. Mais alors pourquoi cet homme nous est-il si proche au point de vouloir nous glisser derrière lui et faire nôtre sa prière et son cri.

Est-ce si facile que cela ? Regardons les choses en face : les 3 condamnés vont mourir, Jésus comme les autres, et ce dernier apparaît totalement incapable de sauver les autres comme de se sauver lui-même : c’est pour cela qu’on se moque de lui et pas n’importe qui : les chefs du peuple qui l’ont fait condamner. Alors surgit cette parole d’un des 2 malfaiteurs en réponse à l’autre qui se moque aussi : « Mais lui, il n’a rien fait de mal » et voilà qu’il se tourne vers Jésus dans un acte de foi étonnant : lui seul a su le reconnaître dans sa royauté véritable. Et nous alors ?

Si l’on m’avait demandé de choisir un texte d’Evangile pour mettre en lumière la royauté du Christ, je n’aurais pas pensé à cette prière du bon larron à Jésus en croix. J’aurais pris spontanément la parole du Christ ressuscité, vainqueur de la mort et disant à ses disciples : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Et ce pouvoir, je vous le donne : Allez, enseignez toutes les nations, baptisez-les… » Au moins, c’est clair, nous savons qui est notre maître, notre roi ; nous sommes prêts à nous battre pour lui. Hélas, vous le savez, c’est en s’appuyant sur cette parole que l’on a évangélisé et baptisé à tour de bras, au mépris bien souvent de la liberté religieuse et du respect de la conscience de chacun. Des accents de croisade, refusés bien sûr aujourd’hui. Mais comme c’est difficile de comprendre, d’harmoniser, de ne pas déformer les paroles de Jésus.

C’est normal que le choix de cet évangile nous étonne, en présentant Jésus comme un roi crucifié et impuissant, mais il peut susciter en nous de vraies questions sur notre foi : à quoi pensons-nous quand nous parlons de la Royauté du Christ sur le monde ?

Bien vite nous risquons de faire l’amalgame : règne du Christ, règne des chrétiens ou du christianisme sur l’ensemble de l’humanité ; et nous avons rêvé d’une Eglise toujours plus influente : un aspect de triomphalisme qui nous habite tous, plus ou moins, et qui était très marqué à l’époque où cette fête du Christ Roi a été instituée par le pape Pie XI, il y a presque 100 ans. Il suffit qu’aujourd’hui tout s’effondre avec une baisse d’influence de l’Eglise sur la société, une baisse de la pratique religieuse et des vocations presbytérales, et nous voilà désemparés : nous avons l’impression que la foi est touchée, comme si Dieu n’était plus avec nous.

Réagir ainsi serait méconnaître le fondement de notre foi qui est Jésus Christ, mort et ressuscité, méconnaître l’Evangile, parole de salut et de sens pour le monde d’aujourd’hui. La tentation du pouvoir demeure grande chez les chrétiens alors que le Christ n’est pas venu pour dominer le monde, mais pour le servir ; sa royauté, c’est-à-dire là où il est le plus grand, est celle de l’humilité, de l’amour et du pardon.

Avons-nous compris que son Royaume est caché : « Ma royauté n’est pas de ce monde » ; notre Dieu est caché. Oui, Jésus vient le révéler, mais pas du tout comme on l’attendait, car il met tout à l’envers.

En effet tous les textes de la Bible, les prophètes et les psaumes annoncent le Christ comme le Messie, le Fils de David, le Roi, celui que les Juifs attendent encore. Vous l’avez entendu dans les moqueries des chefs et des soldats : « Qu’il se sauve lui-même s’il est le Messie de Dieu, l’Elu, le roi des Juifs ! » Or vous voyez bien qu’il n’est rien de tout cela : il est impuissant, crucifié, entouré par 2 bandits. Dieu n’est jamais là où l’on pense le trouver ; il est là où il ne devrait pas être.

Un seul a reconnu Jésus avant sa mort sur la croix, et c’est un malfaiteur, un seul a proclamé son innocence, un seul a reconnu, en dépit des apparences, le Royaume dont il avait parlé si souvent. Nous sommes là en plein évangile de de la grâce et du salut de Dieu ; Jésus ne cesse pas d’offrir l’accueil et le pardon de Dieu à tous les rejetés, à tous les exclus, au pire des criminels, dès lors qu’il se retourne vers Celui qui l’attend : cela ne se passe pas dans un palais ou même dans une église, cela se passe sur une croix dans le dénuement le plus absolu, dernière parole échangée entre 2 crucifiés : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume ! » Voilà la royauté du Christ, le pouvoir de l’amour plus fort que la dérision, la violence ou la mort !

Dans son roman « Crime et châtiment », l’écrivain russe Dostoievski qui a lui-même connu le bagne, montre bien jusqu’où peut aller la compassion du Christ : un pauvre homme se lève dans un café et récite le Notre Père, puis devant ceux qui se moquent de lui parce qu’il vient de boire l’argent gagné par sa fille qu’il a envoyé se prostituer, il pense à Dieu qui le jugera et il s’écrie : « Oui, Dieu nous dira alors : viens, je te pardonne et nous entendrons sa parole : Approchez, vous aussi, les débauchés, les impudiques, vous qui avez l’aspect de la bête, venez aussi. Tous, nous avancerons et il nous ouvrira ses bras, et nous nous y précipiterons. Alors nous comprendrons tout. »

« En vérité, je te le dis : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. » Frères et sœurs, faut-il attendre l’extrême détresse, le fond de la désespérance pour entendre cette parole ? Non, elle nous est donnée pour la vie de chaque jour, « aujourd’hui » nous dit Jésus et puis ce petit mot « avec moi » est à prendre à la lettre : dans le Royaume, on n’est pas sous le Christ, dominé par lui, mais avec le Christ. St Ambroise dit très bien cela : « La vie chrétienne consiste à être avec le Christ : où est le Christ, là est le Royaume. » Le Royaume, il est déjà là, en nous ; il s’agit de le reconnaître. Il est là chaque fois qu’au nom de Jésus nous choisissons d’aimer, de pardonner, de nous faire confiance, de nous ouvrir à la détresse des autres, de nous mettre au service des plus petits. « Jésus, souviens-toi de nous : vienne ton Royaume aujourd’hui ! »

Homélie du 13 novembre 2022 — 33e dim. ordinaire — Frère Damase
Cycle : Année C
Info :

Année C – 33° dim. du Temps Ordinaire – 13 novembre 2022

Mal 3 19-20 ; Ps 97 ; 2°Thess 3 7-12 ; Luc 21 5-19 ;

Homélie du F. Damase

Texte :

Les textes bibliques de ce dimanche sont un appel à l’espérance.

Malachie écrit, il y a qq 2 500 ans, pour des croyants qui ne savent plus très bien où ils en sont. Tout le monde a l’air de perdre la foi, y compris les prêtres de Jérusalem. On en vient à se demander où est Dieu. Que fait-il ? Pourquoi ne fait-il rien contre ceux qui se vautrent dans la corruption ? Ces questions sont aussi celles des croyants d’aujourd’hui. Pourquoi cette guerre en Ukraine ? Pourquoi ces prises d’otages dans le Sahel ? Pourquoi cette violence contre les immigrés ? Pourquoi la misère des vieillards ?

Mais Dieu annonce une bonne nouvelle : le mal n’a pas le dernier mot. Les croyants ne doivent pas désespérer. Malachie rappelle que le projet de Dieu d’instaurer la justice progresse. Le jour du Seigneur vient. Le croyant attend impatiemment sa venue. Dieu est Père. L’annonce de la venue du jour du Seigneur est une bonne nouvelle. Le prophète nous précise que ce jour « brûlant comme une fournaise » n’est pas une menace. C’est au contraire une manière de dire l’amour passionné de Dieu pour l’humanité. C’est une invitation à nous exposer tout entier au « soleil de son amour ».

Encore une fois, nous n’avons rien à craindre du jour du Seigneur. C’est de cette espérance que nous avons à vivre et à témoigner dans le monde d’aujourd’hui. Notre Dieu n’abandonne jamais ceux qui se confient à lui. Il est leur force, leur courage, leur soutien jusqu’au bout.

L’Evangile d’aujourd’hui a été écrit pour des chrétiens persécutés à cause de leur foi au Christ. Luc veut les ramener à l’essentiel : « Ne vous laissez pas égarer par les prophètes de malheur… ne marchez pas derrière eux… Ces gens ne parlent pas au nom de Dieu. Ils ne représentent qu’eux-mêmes. Il ne faut pas chercher le Christ dans ce qui affole, ni dans ce qui dramatise l’histoire. Nous le reconnaîtrons dans la paix qu’il donne au milieu des épreuves. Quand tout va mal, il est celui qui donne le courage de vivre et de travailler à la construction d’un monde plus juste et plus fraternel.

Et pourtant, certaines paroles du Christ ont de quoi faire peur. Il avertit les siens qu’ils seront détestés de tous. Mais si nous regardons les évangiles de plus près, nous voyons bien que lui-même a été détesté. Nous aussi, il nous arrive d’être critiqué à cause de notre foi et de l’amour que nous avons pour le Seigneur et pour les autres. L’Eglise est souvent tournée en dérision.

Les lectures de ce dimanche visent donc à réveiller notre foi. Trop souvent, nous ne voyons que ce qui va mal. On se lamente mais on ne bouge pas. Le Christ nous invite à vivre une vie digne de l’alliance dans laquelle nous sommes engagés. Quand nous regardons vers la croix, nous comprenons que Jésus s’est donné entièrement et jusqu’au bout. C’est sur cette route que nous sommes invités à le suivre. Certes, les épreuves seront au rendez-vous. Mais ceux qui les endureront au nom du Christ seront sauvés. C’est là que le Seigneur nous attend pour témoigner de l’espérance qui nous anime. Inutile de chercher les mots : Le Seigneur lui-même s’en charge. Si Jésus nous envoie son Esprit Saint, c’est pour que nous puissions témoigner de la foi et de l’espérance qui nous animent.

En ce dimanche, nous sommes venus vers le Seigneur. Nous voulons l’accueillir et lui donner la première place dans notre vie. C’est avec lui que nous pourrons travailler à la construction d’un monde plus humain, élargir nos cœurs aux dimensions du sien.

Que par notre prière, nos paroles et notre solidarité, nous soyons de vrais témoins de l’espérance qui nous anime.

630 mots

Homélie du 06 novembre 2022 — 32e dim. ordinaire — Frère Guillaume
Cycle : Année C
Info :

Année C - 32ème DIM DU TEMPS ORDINAIRE -

(6 novembre 2022)

2 Macc. 7,1-14 ; 2 Thess. 2,16-3,5 ; Luc 20, 27-38

Homélie du F.Guillaume

Texte :

Frères et sœurs

Les textes de l’Ecriture que nous venons d’entendre, celui de l’A.T. et le passage de l’Evangile de St Luc nous placent clairement devant la question de la résurrection des morts, la résurrection des corps. Ils doivent nous interpeller : y croyons-nous aussi ? C’est une question fondamentale pour quiconque se déclare chrétien, question qui interroge notre présence ici et maintenant dans cette église, à cette messe.

L’apôtre Paul dans une lettre aux corinthiens rappelait à ces derniers, car certains avaient des doutes : « S’il n’y a pas de résurrection des morts, Christ non plus n’est pas ressuscité, et si Christ n’est pas ressuscité, notre prédication est vide, et vide aussi votre foi. Votre foi est illusoire, vous êtes encore dans vos péchés »

La question est donc grave : il en va de notre foi, de la sincérité et de la vérité de notre parole de croyant, de baptisé.

En 1ère lecture, nous avons entendu ce récit du martyre d’une famille entière au temps d’une grande persécution contre les juifs qui se voulaient fidèles à la Loi de Dieu, à son Alliance avec son peuple. Le texte peut être daté du 2ème siècle avant notre ère. Il est l’un des tout derniers de l’A.T. et pourtant, il est un des premiers si ce n’est le premier de toute la Bible où s’affirme clairement l’espérance d’une résurrection personnelle des morts.

Au temps de Jésus, tous ne partageaient pas cette croyance. L’un des courants juifs les plus influents, le parti des Sadducéens s’y opposait, de même qu’il niait l’existence des anges, en argumentant que ces réalités n’étaient pas mentionnées dans les 5 premiers livres de la Thorah. Les pharisiens, y croyaient, eux. Ils constituaient un autre parti, dont Jésus était proche, tout comme St Paul qui en avait été membre avant sa conversion.

L’Evangile nous présente ainsi un débat, où les sadducéens cherchent à tendre un piège à Jésus avec un cas d’école caricatural, invraisemblable même, qu’ils appuient sur une fausse interprétation des Ecritures.

En réalité, l’enjeu du débat se trouve dans la distinction que fait Jésus et que ne font pas ses adversaires, entre 2 mondes de nature différentes. Le premier est celui que nous connaissons bien : le terrestre, le visible, tangible et actuel, le second, lui est à venir, c’est le monde de la Résurrection. Entre les deux il y a la mort physique et corporelle, point de passage obligé, et lieu à la fois de rupture et de continuité.

Pour les sadducéens, s’il y avait une résurrection, elle serait comme une prolongation ou une restauration de nos existences de ce monde ci ; elle serait marquée par la nécessité du mariage et de la procréation pour perdurer.

Pour Jésus en revanche, le passage entre les deux mondes est une vraie rupture avec l’établissement d’une création nouvelle, mais cependant dans une continuité de vie, une vie assurée par Dieu lui-même : le Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob qui n’est pas un Dieu des morts, mais des Vivants.

Ainsi, sommes-nous invités à bien distinguer dans la réalité de toute mort, la nôtre inéluctable comme dans celle d’un proche, d’un être particulièrement cher, à bien distinguer ce qui relève de la rupture et ce qui appartient à la continuité de la vie. La difficulté provient que nous avons du mal à nous représenter ce monde de la Résurrection et de la Vie Eternelle, où nous serons semblables aux anges. Alors même que nous y sommes déjà entrés par le baptême et la vie chrétienne dans l’Esprit. Car la vie éternelle, nous dit Jésus dans le IV° évangile, c’est de connaître Dieu et Celui qu’Il a envoyé dans le monde. En cela nous sommes déjà participants de la réalité du monde de la Résurrection, même si c’est d’une façon inachevée.

Saint Paul dans sa lettre aux corinthiens s’avance un peu plus dans la description de cette nouvelle création. Il distingue des corps spirituels des corps charnels. Par ailleurs, les récits des apparitions de Jésus Ressuscité en finales des évangiles nous révèlent des traits du corps glorieux de Jésus, portant les marques de sa Passion et qui se fait reconnaître à travers des relations retrouvées, des marches, des repas, des échanges de paroles.

Car la continuité de la vie dans ce monde de la Résurrection sera essentiellement fondée sur nos expériences relationnelles.

Et si nous professons dans le Credo : j’attends la résurrection des morts et la vie du monde à venir ou je crois à la résurrection de la chair, il faudrait tout aussi bien affirmer : je crois à la résurrection des relations, de ces relations heureuses ou douloureuses que j’ai entretenues sur terre, et que je retrouverai, transfigurées dans la lumière de la Gloire de Notre Père du Ciel. Et cela, quelle que soit, après tout, la consistance de ces corps spirituels et glorieux où nous ressusciterons.

Ainsi approchés et interprétés, les textes de la liturgie de ce dimanche sont des appels à l’espérance, à la grande et joyeuse espérance que nous désignerons tout à l’heure avant de communier, nous qui attendons que se réalise cette bienheureuse espérance : l’avènement de Jésus-Christ, Notre Sauveur.

Espérance de la vie éternelle, de la vie dans l’Esprit Saint avec le don de l’amour répandu dans nos cœurs, à jamais.

J’aimerais achever cette méditation par une phrase très belle de Saint Augustin qui fut un grand maître dans le domaine des relations humaines et spirituelles, à propos de la perte d’un être cher :

« on ne peut perdre celui qu’on aime, si on l’aime en Celui qu’on ne peut pas perdre »