vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 13 octobre 2024 — 28e dim. ordinaire — Frère Basile
Cycle : Année B
Info :

Année B - 28° Dimanche Ord - 13 octobre 2024

Sagesse 7, 7-11/ ps 8 - Hébreux 4, 12-13 -Marc 10, 17-30

Homélie de F. Basile

Texte :



« Elle est vivante, la Parole de Dieu » F et S, c’est le concile Vatican 2, dont on célébrera l’an prochain les 60 ans, qui nous a rendu la Parole de Dieu dans la liturgie ; il nous l’a rendue non seulement compréhensible, dans notre langue maternelle, mais aussi dans toute sa richesse abondante et variée : 3 lectures différentes chaque dimanche, un vrai cadeau ! J’aime bien dire aussi que le Concile nous a rendus l’Evangile, tout l’Evangile comme une parole de vie adressée à chacun chaque jour : c’est notre vraie richesse.

Madeleine Delbrêl, un témoin du 20 siècle, morte durant le concile, écrivait : « On ne peut rencontrer Jésus pour le connaître sans un recours concret, constant, obstiné à l’Evangile ; c’est pour nous une question de vie ou de mort d’écouter le Seigneur » (Joie de croire p. 225-226)

Alors écoutons pleinement l’Evangile de ce dimanche, approchons-nous de Jésus comme cet homme dont nous parle st Marc, posons-lui nos questions, écoutons son appel à le suivre, et puis laissons-le nous regarder ; Marc est le seul à noter cela : « Jésus posa son regard sur lui, et il l’aima.»

Mais que voulait cet homme qui accourt vers Jésus ? Il avait apparemment tout ce qu’il fallait : de l’argent, de grands biens, une éducation, une conduite irréprochable. Ce qu’il voulait, c’est une assurance pour la vie éternelle : « Que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? »

Il veut se mettre du bon côté, être bien placé, mais il reste centré sur lui-même, attaché à ses principes, à sa bonne conduite ; il est prêt à faire ce qu’il faut, et même un peu plus, pour obtenir la vie éternelle, pour la mériter.

C’est là que la parole du Christ va l’atteindre de plein fouet. Comme le dit la lettre aux Hébreux, « elle est vivante, la Parole de Dieu, énergique et plus coupante qu’une épée, elle pénètre jusqu’au cœur. » Jésus ne met pas en cause tout le bien déjà fait par cet homme qui connaît les commandements de Dieu et les met en pratique ; mais peut-être a-t-il trop lié ensemble pratique religieuse et assurance-vie-éternelle ?

Jésus met ici le doigt sur une faille, il veut montrer à cet homme qu’il y a en lui un désir plus grand, un désir d’infini que nous avons tous en nous, mais qui pour se réaliser demande un dépassement, une rupture, un saut dans le vide, un risque à prendre : « Une seule chose te manque : vends tout ce que tu as et suis-moi. »

Cette parole nous arrache à nos sécurités et nous force à l’aventure ; c’est bien la même parole qui fut adressée jadis à Abraham, que Jésus adresse à ses premiers disciples au bord du lac ; dans la vie monastique, nous les frères, nous l’avons entendue : « Va, quitte ton pays, vends ce que tu as, allège-toi, puis viens, suis-moi » Et, vous aussi les diacres, d’une autre manière, vous l’avez écoutée avec votre épouse. Il y en a qui aujourd’hui l’entendent malgré eux d’une manière ben plus forte, ceux qui doivent fuir leur pays ou la guerre, et tout abandonner : les choses alors prennent une valeur bien différente.

Mais comment faut-il entendre la parole de sagesse de la 1° lecture ? Dans notre société de surconsommation qui nous contraint à avoir toujours plus, cette parole ne vient pas faire l’éloge de la précarité, un scandale qui doit être toujours combattu, elle vient plutôt mettre en valeur la fragilité. Celle-ci, quand elle est assumée, nous détache des biens matériels et redonne du prix à la vie, pour ce qu’elle est réellement. C’est cela que l’homme riche n’a pas compris. A force de vouloir gagner sa vie éternelle, il en oublie de vivre la vie réelle. Il ne voit pas que le présent est un don. Il vit sa vie par mérite, par devoir. Il ne s’occupe que de lui-même. Il ne voit pas que la vie n’est une richesse que dans la mesure où elle se donne.

Pour ceux qui se risquent à vivre cette audace de la fragilité au quotidien, la vie éternelle n’est plus envisagée alors comme une récompense, mais comme un don de chaque instant.

Vivre la fragilité, ce signe intérieur de richesse, c’est changer notre regard sur le temps qui passe, redécouvrir ce qu’il est pour nous réellement : autant de moments où l’éternité de Dieu peut faire irruption dans notre histoire. « Apprends-nous la vraie mesure de nos jours : que nos cœurs pénètrent la sagesse » avons-nous chanté dans le psaume. L’éternité de Dieu ne se possède pas, elle se reçoit au quotidien, dans la gratuité. Les fruits que nous récolterons alors, seront la patience, la bienveillance et une vraie sagesse de vie.

Vivre cette audace de la fragilité, c’est se rendre disponible à la présence de Dieu dans nos vies ; c’est regarder l’humain, comme Jésus l’a fait, avec les yeux de la bienveillance et non de la performance, de la gratuité et non pas du profit.

F et S, osons vivre cette fragilité et nous nous découvrirons toujours plus sous le regard aimant de Dieu. Alors aimer consistera à trouver la vraie richesse hors de nous-mêmes. Si la solitude ou le désespoir nous guettent, apprenons à lire notre vie avec les yeux de Dieu, avec la lumière du Royaume et cet amour inconditionnel pour qui rien n’est impossible.

Et notre cœur sera libre pour aimer.

Frère Basile

Homélie du 06 octobre 2024 — 27e dim. ordinaire — Frère Jean-Louis
Cycle : Année B
Info :

Année B - 27e dimanche ordinaire - (06/10/2024)

(Gn 2, 18-24 – Ps 127 – He 2, 9-11 – Mc 10, 2-16)

Homélie du F. Jean-Louis

Texte :

Frères et sœurs,

Les lectures de ce dimanche ont pu peut-être vous laisser perplexes.

Le récit de la Genèse et son côté mythologique, l’évangile qui paraît être une condamnation sans appel des divorcés remariés, situation douloureuse que nous avons sans doute à peu près tous rencontrée… Il n’y a que la lecture du passage de la Lettre aux Hébreux qui peut nous donner du courage, de l’espérance…

Et de fait, cette dernière lecture résume ce que nous célébrons ce dimanche, chaque dimanche : car si Jésus a fait l’expérience de la mort, c’est pour conduire une multitude de fils jusqu’à la gloire. Ainsi, Jésus n’a pas honte de nous appeler ses frères. C’est vraiment une bonne nouvelle qui nous est ici annoncée.

Jésus n’a pas honte de nous appeler ses frères. Voilà l’horizon de notre foi, voilà notre espérance : être introduits dans la gloire de Dieu, être déjà appelés frères du Christ. Frères et sœurs, empêtrés dans nos contradictions, nos refus, n’avons-nous pas tendance à oublier parfois ces paroles pourtant si libératrices ? Voilà peut-être un de nos grands problèmes : le mal, le péché nous empêchent d’avoir pleinement conscience de notre vocation, de notre dignité qui sont celles de tout être humain.

A partir de cette réalité fondamentale du Salut acquis par la Passion, la mort et la Résurrection du Christ, relisons la première lecture et l’évangile.

S’il y a un passage biblique très connu, c’est bien le début du Livre de la Genèse : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. Dieu dit : « Que la lumière soit… et la lumière fut, etc… »

Mais il y a un autre récit de création, différent, au chapitre deux de la Genèse dont est extraite la lecture d’aujourd’hui. Nous sommes après la création de l’homme (masculin) et Dieu lui cherche une aide qui lui corresponde. Et il modèle avec de la terre les bêtes des champs et les oiseaux du ciel. Or, dans le premier récit de création du chapitre un, les animaux ont été créés avant l’homme. Ces deux récits de création, différents, qui inaugurent la Bible nous montrent qu’il ne faut pas considérer ces récits comme des récits scientifiques des origines de l’univers. En effet, ces deux récits ne concordent pas. Les auteurs bibliques sont à des années-lumière de notre mentalité scientifique, aussi pertinente soit-elle.

Si, dans le premier récit, Dieu vit que les animaux créés étaient bons, ils ne sont cependant pas une aide qui corresponde à l’homme dans le second récit.

Dieu crée alors la femme à partir de l’homme et il y a ce cri d’admiration de l’homme devant la femme : « Voilà l’os de mes os et la chair de ma chair. » N’est-ce pas la reconnaissance de l’égalité en dignité de l’homme et de la femme ? Et la fin de la lecture n’exprime-t’elle pas la force de la relation de l’homme et de la femme dont l’attachement conduit l’homme à quitter son père et sa mère pour ne plus faire qu’un avec sa femme ? Voilà une nouvelle affirmation de l’égalité en dignité de l’homme et de la femme. On ne fait pas un avec quelqu’un qui vous est inférieur.

Quant à l’évangile, il faut reconnaître que nous sommes tellement marqués par les nombreux divorces, séparations et remariages que nous risquons de projeter cette problématique sur notre texte d’aujourd’hui.

Pourtant, la question « Est-il permis à un mari de renvoyer sa femme ? » vise en fait à mettre Jésus à l’épreuve, à le piéger, à le mettre en défaut par rapport à la Loi de Moïse. Et Jésus a bien perçu le piège, d’où sa réponse qui renvoie à la Loi : « Que vous a prescrit Moïse ? » Et les pharisiens répondent : « Renvoyer sa femme à condition d’établir un acte de répudiation. »

Remarquons plusieurs choses : les pharisiens parlent de l’homme qui renvoie sa femme et pas de la femme qui renvoie son mari. Ils ne considèrent pas qu’hommes et femmes ont les mêmes droits. C’est le Christ qui, devant ses disciples, parle du droit de la femme à renvoyer son mari. Ensuite, les pharisiens reconnaissent qu’il y a un acte de répudiation à faire, ce qui constitue déjà un certain progrès dans la condition de la femme. On ne répudie pas son épouse n’importe comment. Il y a une condition à remplir. Ce n’est certes pas l’idéal mais ça amène à reconnaître que la répudiation n’est pas un acte banal qu’on pourrait accomplir sous le coup d’une simple émotion, d’une simple colère. Pour le Christ, c’est une concession faite par Moïse en raison de la dureté des cœurs, car l’homme reste maître du lien entre époux dans la logique des pharisiens. Et le Christ revient alors au principe fondamental de la Genèse évoqué plus haut : l’homme et la femme ne font qu’une seule chair et aucun des deux ne peut se considérer maître du lien qui unit le couple. La répudiation limite en théorie les séparations de couples mais le Christ exige plus.

En fait, dans les pratiques du temps de Jésus, c’est la femme qui était largement victime de cette pratique de la répudiation et l’histoire du christianisme nous montrera que, bien longtemps après le Christ et la prédication de l’évangile, il ne manquera pas de princes ou de rois chrétiens qui répudieront leur femme parce qu’il n’y avait pas d’héritier mâle. Comme quoi l’évangile met bien du temps à imprégner les mentalités.

Finalement, le Christ fixe un horizon, un idéal, mais aussi un avertissement adressé à une mentalité qui considérait l’autre, la femme, comme un objet qu’on use et jette à sa guise : la fameuse « culture du déchet » du pape François. On ne peut se tenir quitte de la Loi en pratiquant la répudiation même selon les règles prévues. Car, pour le Christ, il y a quand même adultère lors d’un remariage après répudiation légale.

Mais qu’en est-il des couples qui vivent un enfer ? des conjoints trahis par un départ ? des séparations qui sont de l’ordre de la survie ? L’évangile rappelle que les liens du mariage ne sont pas à prendre à la légère. Mais remarquons que, dans l’évangile selon saint Jean, le Christ n’hésite pas à dialoguer avec une Samaritaine qui a eu cinq maris et dont l’homme avec lequel elle vit n’est pas son mari. Il ne la rejette pas, il lui demande même à boire. Ainsi, dans son attitude concrète, le Christ accueille tout le monde et entre en dialogue, dialogue qui fait cheminer les gens.

Ainsi, nous pouvons rejoindre les recommandations du pape François dans la pastorale des divorcés remariés : que le prêtre ne soit pas un douanier qui rejette, exclut, mais qu’il soit accueillant aux situations complexes, sans perdre de vue l’horizon très exigeant posé par le Christ, mais en étant, comme le Christ, à l’écoute de toutes les situations concrètes parfois très complexes, des essais de reconstruction d’une relation authentique et respectueuse de l’autre. Et je pense que c’est une invitation faite à tous les baptisés.

Ne pas juger pour ne pas être jugé. On pourrait dire : accueillir pour être accueilli. Que l’Esprit Saint nous inspire les attitudes conformes à la volonté du Christ dans les situations si difficiles que nous pouvons rencontrer de nos jours comme de toujours.

Nous pourrons alors rejoindre le projet de Dieu esquissé par la seconde lecture : « Ne pas avoir honte de ses frères, conduire à la gloire une multitude de frères.

» AMEN

Homélie du 29 septembre 2024 — 26e dim. ordinaire — Frère Vincent
Cycle : Année B
Info :

Année B - 26 dimanche du Temps Ordinaire - 29 septembre 2024

Nb 11 25-29 - Jacq 5 1-6 - Mc 9 38-43.47-48

Homélie du F. Vincent

Texte :



Qui est vraiment Jésus ? C'est la question de l'évangile de ce matin, comme c'était déjà celle d'il y a quinze jours, et comme c'est celle de tout l'évangile de St Marc. Et à la remarque de Jean, ce ma-tin, Jésus aurait bien pu répondre : "Mais qui suis-je vraiment pour vous ?" Oui, qui est vraiment Jésus ? Et qui n'est pas avec Jésus ?

Cette question préoccupe les disciples, alors qu'ils ont vu un inconnu chasser les esprits mauvais au nom de Jésus. Un inconnu c'est à dire quelqu'un qui ne fraie pas avec eux, qui ne fait pas partie du groupe de ceux qui suivent Jésus de près. Et on peut comprendre leur étonnement ! Chacun d'eux a fait de Jésus une expérience si personnelle, qu'il lui semble bien le connaître, du moins sous un certain jour. Mais où situer cet inconnu qui prétend lui aussi au nom de Jésus, et à ses pouvoirs ?

Ce que Jésus dans sa réponse veut leur faire comprendre, c'est que la foi en lui, nous arrache au comparatif. Pour la simple raison qu'au lieu de nous brancher sur nous-mêmes, elle nous oriente totalement sur sa personne à lui. La foi met en nous les sentiments mêmes qui furent ceux du Christ Jésus. Notre force de conviction ne venant plus de nous, nous bénéficions alors d'une grande liberté intérieure. Nous pouvons regarder les autres d'un œil fraternel. Comme le Christ, nous nous réjouissons de ce qui les ouvre, eux aussi, à plus de vérité, à plus de sainteté. Nous ne considérons plus notre Église comme une boutique sur laquelle fondrait la concurrence de toutes les autres religions. L'important n'est plus que nous soyons les seuls à offrir la meilleure denrée. La seule chose qui compte à nos yeux, c'est bien que l'Esprit de Dieu, l'Esprit de l'évangile, se répande. Or l'Esprit de Dieu, l'Esprit Saint, c'est l'amour qui unit et non qui met en concurrence. Une des phrases les plus importantes de l'Evangile, à mon sens est celle-ci : "A ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples, à cet amour que vous aurez les uns pour les autres". Si nous aimons les autres, nous serons heureux qu'ils fassent le bien, heureux qu'ils apportent aux autres, à leurs frères, le meilleur d'eux-mêmes.

Seul Jésus, le Fils de Dieu, peut parler d'une telle façon. Et encore ne le fait-t-il qu'en parlant à des disciples qui en principe, ont déjà tout quitter pour le suivre ; c'est-à-dire à des croyants qui sans doute, l'aiment vraiment. Hors du contexte de l'amour, en effet, personne ne saurait parler ainsi.

Cela conduit aux déclarations du Concile Vatican II sur la part de vérité que portent en eux, ceux qui ne sont pas des nôtres. Cela avait conduit aussi le Pape Saint Jean-Paul II, à réunir par deux fois à Assise des représentants des grandes religions. Ces rencontres d'Assise au cours desquelles on avait pu voir pratiquement toute l'humanité prier pour la paix, avaient été un symbole très fort et fécond pour notre temps.

Cette parole de Jésus de ce matin s'adresse aussi à nous, à chacun d'entre nous. Est-ce que, dans notre adhésion à notre Église, notre unique souci est de rendre vivant, en nous, en elle, l'Esprit de Jésus, c'est-à-dire l'Amour même qui est en Dieu, qui est Dieu ? Cet Esprit est large et ouvert, comme les deux bras de Christ Jésus largement étendus sur la Croix.

A nous de nous vouloir témoins de ce pourquoi nous sommes faits : l'Amour universel, dans la fidélité à la manière dont nous percevons le vrai, mais aussi dans le respect de la manière dont les autres peuvent le percevoir. C'est à ce prix qu'un dialogue constructif peut s'instaurer pour l'avancée de tous.

Homélie du 22 septembre 2024 — 25e dim. ordinaire — Frère Charles Andreu
Cycle : Année B
Info :

Année B - dimanche 22 septembre 2024 -25e dimanche TO,

– Sg 2, 12.17-20 ; Jc 3,16-4,3 ; Mc 9, 30-37

Homélie de F. Charles

Texte :

Voyons si ses paroles sont vraies, regardons comment il en sortira. La première lecture résumait ainsi le défi qui se lance bientôt contre celui dont la parole, dont l’existence même, constitue pour les pécheurs une contrariété, un reproche. Mais qui parle ici ? D’où vient sa parole ?

Dans l’Ancien Testament, c’est le prophète, qui surgit du dedans du peuple, porteur d’une parole de Dieu qui dénonce l’injustice. D’Amos à Jean-Baptiste se dessine ainsi une longue tradition que poursuit le Nouveau Testament. Jésus est évidemment, par excellence, cette parole rejetée, même s’il n’est pas le plus « dénonçant » des prophètes, si ce n’est envers quelques pharisiens. Et la mission apostolique poursuit la mission prophétique : Ceux qui commettent des péchés, reprends-les devant tout le monde, conseillait Paul à Timothée.

Ainsi l’Église a-t-elle toujours vécu avec la forte conviction d’être dépositaire d’une parole venue de Dieu, d’un Évangile qui sauve, mais aussi dénonce, exhorte, s’oppose parfois, au risque du rejet, voire de la persécution. Appeler à la justice, être la voix des pauvres et des sans voix, c’est ce que font avec droiture, sans même le savoir, sans le faire savoir en tout cas, tant de gens simples et vrais. Mais voilà, c’est encore ce que prétendaient faire Jean Vanier ou l’abbé Pierre, et nous avions cru reconnaître en eux des prophètes pour notre temps.

Voyons si ses paroles sont vraies, regardons comment il en sortira. Nous vivons certainement un temps charnière, celui où la prétention prophétique de l’Église, où la crédibilité de sa parole, craque sous la pression d’autres paroles, car ces paroles dénoncent des violences et même des crimes, car elles dénoncent encore la manière dont on les a traités. Ces paroles ne viennent pas de gens qui « méditent le mal » ; ceux qui les profèrent ne prétendent pas être des prophètes, des envoyés de Dieu, porteurs d’une parole éternelle, d’une parole de salut. Ils parlent, sans autre prétention que leur seule humanité, sans autre autorité que leur bon sens. Leur vie parle, elle nous parle, elle s’oppose, reproche, accuse, non parce qu’elle revendique d’être sainte, mais parce qu’elle est brisée.

Or, paradoxalement, nous peinons à attendre cette parole qui vient à la fois d’ailleurs et de trop près, qui parle au nom de l’humanité, et pas au nom de Dieu.

Oserais-je dire qu’une longue tradition, que l’Écriture Sainte elle-même, n’y pousse guère. Certes, le peuple de Dieu s’y montre souvent ouvert à la parole de l’étranger. Mais de la reine de Saba à Naaman le Syrien, des rois mages au Centurion qui se tient près de la croix, cette parole ne fait que confirmer : Vraiment, ta sagesse est admirable ; vraiment, cet homme était fils de Dieu. Et voilà qu’il faut apprendre à écouter des reproches. L’invitation du Concile Vatican II à se faire attentif aux « signes des temps » porte peut-être ailleurs que prévu.

Devoir de justice et de vérité d’abord, qui par surcroît rendra plus crédible le service que l’Église doit à la parole dont elle est porteuse. Le Christ invite, dans l’évangile de ce dimanche, à être « serviteur ». Mais que serait un serviteur qui sait tout, qui a toujours raison, qui fait la leçon mais auquel on ne peut rien reprocher, et se place ainsi à la première place, au-dessus de ceux qu’il sert. Curieux serviteur, dont les déclarations d’humilité – parfois quelque peu surjouées – ne dissipent guère le malaise qu’il suscite, mais le renforcent.

Voyons si ses paroles sont vraies, regardons comment il en sortira. Comment répondons-nous à la parole qui nous est adressée ? Personne n’aime être critiqué, ni devoir se reconnaître « mauvais » : personne n’aime avoir à changer en profondeur les manières de faire, de penser où il s’est installé. Alors bien des réflexes de défense et de déni, de silence et d’inaction nous traversent : réflexes violents, d’une violence d’autant plus grande qu’elle ne hausse pas le ton, qu’elle ne se reconnaît pas comme telle, pièges tendus à celui qui parle et à sa parole, pour s’en débarrasser comme d’autres se sont débarrassés du Christ. La compassion elle-même ne suffit pas. Écoutons de nouveau les paroles de saint Jacques : c’est par mes œuvres que je te montrerai ma foi – et bien aujourd’hui, c’est par mes œuvres que je te dirai ma compassion.

Homélie du 15 septembre 2024 — 24e dim. ordinaire — Frère Hubert
Cycle : Année B
Info :

Année B - 24e dimanche TO – 15 septembre 2024

Is 50, 5-9a ; Jc 2, 14-18, Mc 8, 27-35

Homélie du F. Hubert

Texte :

Qui est Jésus ? C’est la question de st Marc tout au long de son évangile.

Entre l’affirmation de foi qu’il pose dès son premier verset :

« Commencement de l’Evangile de Jésus Christ, Fils de Dieu »,

et la proclamation au pied de la croix par le centurion païen qui a présidé à la crucifixion :

« Vraiment, cet homme était Fils de Dieu »,

tout son récit nous sollicite sans cesse :

Qui est celui-là qui chasse les esprits impurs,

pardonne ses péchés au paralytique,

commande avec autorité au vent et à la mer ?

Qui est celui-là que sa parenté cherche en se disant : « Il a perdu la tête ! » ?

À Césarée de Philippe, c’est Jésus lui-même qui pose la question :

« Au dire des gens, et pour vous, qui suis-je ? »

Question cruciale qui concerne tout son être, toute sa mission ; moment décisif.

« Tu es le Christ », répond Pierre ;

mais aussitôt Jésus « défend vivement aux disciples de parler de lui à personne ». Pourquoi ?

Pierre a répondu « avec le qualificatif le plus fort et le plus élevé dont il disposait, mais c'est justement ce qualificatif messianique qui est à l'origine d'idées parfaitement erronées. » dit un commentateur.

Oui, Jésus est le Messie, mais pas n’importe quel messie.

« Nous annonçons un messie crucifié, scandale pour les juifs, folie pour les païens », dira Paul plus tard.

Qui est Jésus ? – Le Christ. Mais on pourrait dire aussi : Qui est le Christ ? c’est Jésus, Jésus de Nazareth, Fils de Dieu fait homme, condamné et crucifié, justifié par Dieu et ressuscité des morts.

Il n’y a pas d’autre Messie que celu-là, cet homme qui a vécu cet itinéraire.

Cet itinéraire, ni Pierre ni ses compagnons, ne peuvent le soupçonner, l’envisager.

Comment envisager un Messie, terminant sa vie, cloué sur une croix ?

Il y a un abîme entre l’attente des disciples, l’attente du peuple élu, nos attentes,

et ce que Jésus vient nous révéler.

Cet abîme est toujours là.

Ne laissons pas l’habitude affadir ce scandale, cette folie.

Nous proclamons un Messie crucifié : rien de moins sage, rien de moins confortable.

Ce que nous croyons, ce que nous proclamons est une énormité : scandale ou folie.

C’est pourquoi, Jésus ne veut pas que les disciples parlent de lui avant de l’avoir suivi jusqu’à Jérusalem,

avoir été confrontés à la passion de leur maître, à leur faiblesse,

et avoir reçu l’Esprit pour comprendre ce mystère de mort et de résurrection,

ce mystère du don total dans la faiblesse et la défiguration absolues.

À Césarée, Jésus ne reprend pas le titre de Messie, trop ambigu, mais celui de Fils de l’homme.

Lui qui est Fils de Dieu, se déclare Fils de l’homme,

et il annonce ses souffrances, sa mort, sa résurrection.

Pierre, en faisant de vifs reproches à Jésus, joue le rôle du Satan

pour Jésus lui-même dont le combat n’est pas feint.

Il est pour lui occasion de chute, l’invitant à accaparer la vie pour lui-même

au lieu de la perdre pour que ceux qu’il aime aient la vie,

au lieu de la recevoir toujours de son Père comme un don.

Aussi, Jésus le repousse vivement comme il a repoussé Satan au désert.

Il faut que l’amour aille jusqu’au bout de l’amour.

Frères et sœurs, nous n’avons pas fini de découvrir le mystère du Christ,

pas fini d’entrer dans le mystère de notre foi.

Si nous annonçons le Christ selon les critères du monde, nous annonçons un faux messie.

Si nous modelons le Christ selon les critères du monde, nous fabriquons un faux messie.

Il nous faut sans cesse écouter la Parole de Dieu, regarder Jésus tel que l’Evangile nous le révèle,

pour progresser dans notre expérience chrétienne,

et mieux témoigner de celui qui est descendu aux enfers

pour nous faire asseoir avec lui dans les cieux.

Il a fallu du temps, beaucoup de temps, aux disciples pour comprendre le mystère de Jésus.

Il aura fallu le don de l’Esprit pour qu’ils commencent à comprendre et qu’ils puissent témoigner.

Que cela nous rassure sur notre propre lenteur à entrer dans le mystère du Christ,

mais que cela ne nous endorme pas !

L’Esprit nous est donné, et pas moins qu’aux apôtres !

nous allons le recevoir en communiant au Corps et au Sang du Christ :

Laissons-le nous instruire.

Laissons-le graver l’Evangile dans nos cœurs, dans nos vies.

Jésus est l’unique Messie, le Chemin, la Vérité et la Vie.

Homélie du 14 septembre 2024 — La Croix glorieuse — Frère Basile
Cycle : Année B
Info :

Fête de la Croix Glorieuse - 14 septembre 2024

Nombres 21, 4-9 / Psaume 77 - Jean 3, 13-17

Homélie du F. Basile

Texte :

Vous l’avez remarqué, il n’y a aucune mention de la Croix dans cet évangile et pourtant le mystère est bien là de façon voilée : « Il faut que le Fils de l’homme soit élevé », avec le rappel du serpent de bronze élevé par Moïse dans le désert. Oui, c’est clair que Jésus sera élevé lui aussi pour que nous puissions regarder vers lui et avoir la vie.

Dans un autre passage du 4° évangile, Jésus dira : « Quand j’aurais été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. » Oui, dans l’Evangile, tout converge vers le mystère de la Croix où Jésus sera élevé, où il va mourir, où il va nous révéler la Gloire et l’Amour de Dieu. « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique »

C’est là sur la Croix que Dieu se révèle à nous dépouillé, transpercé, désarmé, prenant sur lui notre péché, notre misère, mais pour la convertir, la recouvrir de sa miséricorde. La Croix du supplice devient alors Croix de lumière, Croix glorieuse, nous ouvrant le chemin du Père.

Comme le disait le P. Christian de Chergé, « c’est bien là notre chemin de croix, et notre chemin de gloire, car c’est là que Jésus nous élève, avec Lui, vers le Père qui nous attend tous, les bras ouverts. »

Regardons vers Lui et nous serons sauvés !

Fête de la Croix Glorieuse

14 septembre 2024

Accueil

Nous fêtons aujourd’hui la Croix Glorieuse :

c’est une fête très ancienne, celle de l’ « Exaltation de la Croix », liée à la Dédicace de la Basilique du St Sépulcre à Jérusalem, lorsque la Croix fut retrouvée. Le 14 septembre est aussi une date charnière dans le calendrier monastique : on commence à regarder vers la Pâque de l’année suivante.

Nous sommes déjà par la Croix en plein mystère pascal, mystère de mort et de résurrection, et au début de cette eucharistie, nous regardons vers Jésus, élevé sur la Croix, devenue l’Arbre de vie, car c’est en Lui que nous avons le pardon, la rédemption de nos péchés.

- Seigneur Jésus, élevé sur la Croix pour guérir tous ceux qui regardent vers toi, Seigneur, prends pitié de nous.

- O Christ Ressuscité, qui donnes la vie aux pécheurs, ô Christ, prends pitié de nous.

- Seigneur, élevé à la droite du Père, où tu intercèdes pour nous, Seigneur, prends pitié de nous.

Que le Dieu d’amour et de paix …

Homélie du 08 septembre 2024 — 23e dim. ordinaire — Frère Guillaume
Cycle : Année B
Info :

HOMELIE du 23ème dimanche du TO (Année B) – 08/09/2024

(Isaïe 35, 4-7 ; Jacques 2, 1-5 ; Marc 7, 31-37)

Homélie de F. Guillaume

Texte :



Frères et sœurs

S‘il est un mot qui a pu et qui devrait retenir notre attention dans le passage d’Evangile lu à l’instant, c’est bien celui d’Ephatta,, d’origine araméenne, la langue parlée par Jésus et les juifs de son temps et que l’on traduit par « ouvre-toi ! ». Mais de quelle « ouverture » s’agit-il et comment pouvons-nous l’interpréter aujourd’hui ?

Nous sommes en présence d’un récit de guérison. Jésus « ouvre » les oreilles et la bouche d’un homme sourd et muet. Face à la foule et devant ses disciples, son statut de thaumaturge en est ainsi confirmé, mais il faut aller plus loin.

Nous disons volontiers d’une personne sympathique et intelligente, que c’est une personne « ouverte », ouverte à la vie, aux autres, attentive à la compréhension des évènements, ayant la capacité de se mettre en question, le cas échéant. A la différence des personnes repliées sur elles-mêmes, sur leur souffrance, leurs peurs, leurs échecs, bref leur négatif.

C’est bien cette expérience négative que le peuple d’Israël a vécue en exil à Babylone, et dont le prophète Isaïe annonce la libération dans la 1ère lecture, avec le retour à Jérusalem et la promesse par Dieu de la venue du Messie. « Dieu vient lui-même et va apporter le salut. Alors s’ouvriront les yeux des aveugles et les oreilles des sourds ». Et l’on sait que ce même prophète Isaïe, prophète de la consolation est aussi le prophète de « l’ouverture du salut aux nations ». Israël, le peuple élu par Dieu est envoyé en mission. Le salut messianique ne lui est pas seulement réservé. Dieu aime tous les hommes et la création. Il veut tous les sauver en ouvrant largement son cœur.

C’est bien d’ouverture qu’il s’agit aussi dans la 2nde lecture, quand Saint Jacques demande à l’Assemblée des premiers chrétiens d’ouvrir leurs yeux, mais surtout leurs cœurs, à la présence des pauvres au milieu d’eux. « Ecoutez bien, c’est-à-dire ouvrez bien vos oreilles, frères bien-aimés. Dieu n’a-t-il pas choisi ceux qui sont pauvres aux yeux du monde. Il les a faits riches de la foi, il les a faits héritiers du Royaume qu’Il a promis à ceux qui l’auront aimé ». Ainsi l’ouverture vers les pauvres, vers ceux qui sont à la périphérie ou sur le seuil, dirions-nous avec le pape François, cette ouverture est la condition d’accès, par la charité, à la foi et à l’héritage du Royaume

Quant au passage de l’Evangile de Marc, on pourrait s’arrêter sur bien des détails. Remarquons que la parole de Jésus : « Effata » s’accompagne d’un lever de ses yeux au Ciel et d’un soupir, littéralement, d’un gémissement, en grec, un terme que l’on retrouve chez Saint Paul dans son épitre aux Romains pour qualifier à la fois les gémissements de l’homme et de la création qui aspirent au Salut, mais aussi et surtout, à la prière de l’Esprit Saint, au fond de nos cœurs dans la prière pour entrer en relation avec Dieu et lui crier : Abba, Père. Dans ce soupir de Jésus et dans cet « Ephatta », c’est toute l’espérance et le désir de l’homme qui rencontrent, en son humanité incarnée, la force, la compassion et l’amour de Dieu Père.

Cette « ouverture aux réalités divines » passant par des réalités et des gestes très concrets du corps : les oreilles, la bouche, les yeux, la salive, etc. l’Eglise les marque dans la célébration des sacrements. Je relèverai plus spécialement ceux du baptême et du mariage, mais on peut le constater pour les 7 sacrements.

Au début de la célébration d’un baptême (qu’il soit enfant ou adulte), l’officiant reprend les gestes et la parole de Jésus dans le rite de l’Ephatta, en touchant de son pouce l’oreille droite et l’oreille gauche, puis les lèvres du catéchumène, en disant : « Efféta, afin que tu proclames la foi que tu as entendue pour la louange et la gloire de Dieu ».

Quand au mariage, il est demandé aux fiancés qui se préparent au sacrement de tenir leur engagement sur 4 piliers : la liberté du consentement, la fidélité dans la durée, l’indissolubilité et l’ouverture à la vie, par l’accueil des enfants et leur éducation selon la volonté de Dieu. Le 4ème pilier de l’ouverture à la vie est tout aussi important que les 3 premiers pour garantir la validité de l’union. Un couple qui se présenterait à l’Eglise avec une ferme intention de ne pas avoir d’enfant peut se voir refuser l’accès au sacrement. Et même si l’intention se révèle après une célébration, ce serait une cause de reconnaissance en nullité de ce mariage.

Ainsi, frères et sœurs, avec cette injonction de Jésus entendue dans l’évangile de ce dimanche : « Ephatta : ouvre-toi ! », nous avons à faire avec une caractéristique fondamentale de notre vie chrétienne, de notre vie de foi. Ouverture à la vie, à l’amour, à la joie, et à la communion.

Je termine en laissant la parole au poète dont nous aimons chanter l’hymne à l’office :

« Ouvre mes yeux, Seigneur

Fais que j’entende, Seigneur

Aux merveilles de ton amour

, Tous mes frères qui crient vers moi

Je suis l’aveugle sur le chemin

A leur souffrance et à leurs appels

Guéris-moi, je veux te voir

Que mon cœur ne soit pas sourd

Garde mon cœur, Seigneur Garde ma foi, Seigneur,

Aussi dur que soit le chemin,

Tant de voix proclament ta mort

Je veux te suivre jusqu’à la fin

Quand vient le soir et le poids du jour

Viens me prendre par la main

O Seigneur, reste avec moi

Ouvre mes mains, Seigneur,

Qui se ferment pour tout garder,

Le pauvre a faim devant ma maison

Apprends-moi à partager,

Homélie du 01 septembre 2024 — 22e dim. ordinaire — Frère Cyprien
Cycle : Année B
Info :

Année B - 22e dimanche du Temps Ordinaire - 1° sept. 2024

Dt 4/1-2, 6-8 Jac1/17-18,21b-22,27 Mc7/1-8c,14-16,21-23

Homélie du F. Cyprien

Texte :

« Vous n’ajouterez rien à ce que je vous ordonne, et vous n’en retrancherez rien… » « Ecoutez et vous vivrez »…

Plutôt que de parler de textes sacrés, nous venons ici écouter une parole, la PAROLE de Vérité pour nous aujourd’hui, … pour nous et …pour que nous la mettions en pratique ! …Aujourd’hui, …pour nous !

…Trois lectures et une seule Parole, Parole toujours plus facile à comprendre qu’à mettre en pratique, mais c’est elle nous met en face l’exigence de l’Evangile du Christ.

« Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu ». Dans le sermon sur la montagne, Jésus n’a pas dit en effet : « Heureux ceux qui se lavent les mains avant d’aller à table »…Jésus a parlé au cœur des hommes de bonne volonté, de ceux qui cherchent le Royaume de Dieu.

…Danger des pratiques extérieures, de tout ce qui dans nos vies aussi s’organise… et parfois plutôt pour nous rassurer.

Nous sacralisons des gestes, des habitudes, et ces habitudes ne sont pas si mauvaises (par ex. se laver les mains avant d’aller manger !)… mais, mais pour certaines choses : « on a bien tout fait ce qu’il fallait et comme il le fallait », et la bonne conscience est là avec une paix dans le coeur… une paix à bon marché !

Guettés par le formalisme et le légalisme nous courons le risque de l’hypocrisie.

« … Ce peuple m’honore en paroles, mais son cœur est loin de moi ».

Nous croyons en effet honorer Dieu par des paroles, des chants, des gestes et toutes sortes de pratiques… et nous pouvons devenir peut-être idolâtres de nos propres idées… idolâtres…vous vous rendez-compte… en croyant être en règle avec Dieu.

Nous savons parfaitement que ce n’est pas ce qui entre dans notre bouche qui va salir notre cœur et notre personne, …nous oublions vite que Dieu parle à notre cœur …et c’est avec notre cœur qu’il nous faut lui répondre… C’est du dedans, du cœur de l’homme que doivent sortir les bonnes pensées, les actions de justice, de miséricorde et de fidélité.

Il s’agit donc de purifier l’intérieur, de travailler au-dedans de nous-mêmes : au lieu de priser plus ce qui parait que ce qui est,

Nous sommes appelés à convertir nos cœurs, sans cesse. Nous souvenir que notre cœur est l’hôte de l’Esprit de Dieu : comment notre demeure pourrait-elle faire cohabiter l’Esprit du Christ et la méchanceté ?

On ne peut penser à Dieu sans éliminer en même temps les pensées et les désirs mauvais, sans ôter ce qui est contraire à l’attention aux autres, à la bienveillance…

Exercice laborieux mais efficace… et nous ne sommes pas assez persuadés que ce qui nous fait du mal, ce qui nous porte à faire mal… « C’est du dedans…C’est du dedans que sortent les pensées perverses, inconduite, vol, meurtre, adultère, cupidité… »

S’exercer à la bienveillance par la pensée, on appelle cela la « garde du cœur », …prévenir les pensées inutiles ou méchantes

.

La pureté que Dieu veut pour nous est belle. Elle est le fruit de l’Esprit du Christ Jésus en nous, elle est bienveillance en pensée, bienveillance en pensée plus rare que la bonté en parole ou en actions … Si notre coeur essaie de fonctionner dans ce registre de la bienveillance et du respect, nous comprendrons mieux les Béatitudes, la manière pure et irréprochable de pratiquer la religion, selon l’expression de saint Jacques. Saint Luc écrit aussi : « L’homme bon tire le bien du trésor de son cœur qui est bon ». Du cœur pur peuvent déborder en abondance la prière et la bienveillance…

Oui, Frères et sœurs, confions-nous à l’Esprit du Christ qui nous conduira vers la bienveillance et la bonté…

Homélie du 25 août 2024 — 21e dim. ordinaire — Frère Basile
Cycle : Année B
Info :

Année B - 21° dimanche ord - 25 août 2024

Josué 24, 1…18 / ps 33 - Ephésiens 5, 21-32 - Jean 6, 60-69 -

Homélie du F.Basile -

Texte :

F et S, si nous avions été à la place des disciples ou à la place de Pierre, qu’aurions-nous dit, qu’aurions-nous fait ? On voit bien dans l’évangile ce qui s’est passé : après les paroles si fortes de Jésus sur le pain de vie, sa propre chair donnée en nourriture, paroles qui semblent intolérables à certains, on voit très bien ce mouvement dans la foule, ceux qui se détachent du groupe, en essayant d’entraîner les autres, avec des petites phrases du genre : « Mais il est fou, ce type-là ! il dit n’importe quoi ! vous n’allez pas continuer à l’écouter ! »

Et Jésus s’en rend parfaitement compte. Il sait, dit l’évangile, quels sont ceux qui adhèrent à ses paroles et ceux qui les refusent, quels sont ceux qui croient et ceux qui ne croient pas. Et il lance sa question comme une flèche au cœur des disciples : « Voulez-vous partir vous aussi ? » J’aime ce « voulez-vous », car Jésus ne force personne à le suivre, et j’aime la réponse de Pierre, en forme de question « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? » Comme toujours, c’est lui qui répond le premier et il s’engage au nom des Douze.

Quelle va être notre réponse à la question de Jésus ?

Car ces paroles sont pour nous aujourd’hui, pour chacun de nous, pour la communauté que nous formons en ce dimanche. Au cours de nos vacances, avons-nous pris le temps de nous poser les vraies questions, celles qui touchent au sens de notre vie, de notre foi chrétienne, de notre adhésion au Christ ? Peut-être que si nous tenons à venir chaque dimanche nous rassembler autour de la Parole de Dieu et de l’Eucharistie, c’est non seulement pour nous nourrir de la Parole et du Pain de vie, c’est aussi pour redire notre foi d’une manière ou d’une autre, personnellement et en communauté, car on n’est jamais chrétien tout seul.

Dans la suite de l’évangile, je voudrais parler de la foi, de cette foi qui est un don du Père : « Personne ne peut venir à moi, nous dit Jésus, si cela ne lui est donné par le Père ». Jésus réveille notre foi quand il nous dit : « Voulez-vous partir, voulez-vous me lâcher ? »

Il arrive que des gens nous disent « Un de mes enfants a perdu la foi » ou même « Tous nos enfants, que nous avions pourtant élevés dans la foi chrétienne, ne croient plus. Que faut-il leur dire ? Faut-il leur en faire reproche ? »

Je réponds « Non. Ne parlez pas d’un échec » car la foi est vraiment un don de Dieu, mais ce doit être aussi une relation vivante qui grandit avec la découverte de l’Evangile et des paroles de Jésus. La foi n’est pas une croyance, c’est une confiance donnée à Quelqu’un, une réponse libre à une parole entendue d’où l’importance de connaître Jésus, Celui qui nous appelle et de le rencontrer dans la prière, de lui dire « Tu », « Tu as les paroles de la vie éternelle »

Ensuite la foi, c’est une alliance : toute la Bible nous raconte cette alliance de Dieu avec l’humanité, Dieu qui s’engage le premier avec un peuple choisi, 1° alliance conclue avec Moïse au Sinaï, et puis cette alliance nouvelle où Dieu s’engage totalement en nous donnant son Fils devenu l’un de nous.

Qui dit alliance, dit engagement de part et d’autre : c’est un choix que l’on fait et il faut s’y tenir. Dans la 1° lecture où nous avions une des premières célébrations de l’Alliance en terre promise, Josué le disait très bien : « Qui voulez-vous servir ? Les idoles, les dieux des Amorites, ou bien le Seigneur, l’Unique, Celui qui vous a libérés de l’esclavage. »

Nous voyons aussi que cette alliance n’est pas seulement personnelle, individuelle ; Dieu fait alliance avec un peuple, entrer dans son Alliance, c’est être relié à une communauté, à un peuple, à l’Eglise. La foi ne se vit jamais seul. Quand on baptise un enfant ou un adulte, c’est toujours au sein d’une communauté chrétienne.

Mais lorsque l’enfant grandit ou lorsqu’il se convertit à l’âge adulte, Dieu attend de lui, Dieu attend de nous une réponse libre et aimante. Ce n’est pas une obligation ou une contrainte. Dieu ne nous force jamais. C’est une histoire d’amour.

Je donne, je redonne ma parole, ma confiance à Celui qui m’a aimé et s’est livré pour moi, mais qui jamais ne me forcera. C’est là le plus beau de la foi, le plus beau de l’amour : c’est un choix libre. La liberté, çà ne veut pas dire que je peux faire n’importe quoi ou tout ce qui me plaît, mais que je choisis librement qui je veux servir, qui je veux aimer.

Il a fallu se battre au Concile de Vatican 2 pour réaffirmer le droit de toute personne à la liberté religieuse. Hélas dans le passé on a parfois forcé des gens à se convertir, mais çà ne veut rien dire : Dieu n’a pas besoin d’esclaves, il veut être aimé et servi par des hommes et des femmes libres.

Dans une ancienne homélie, j’avais déjà cité le roi Saint Louis : c’est sa fête aujourd’hui. C’est un texte de Charles Péguy qui fait parler Dieu sur st Louis dans le Mystère des Saints Innocents :

« Quand on a connu d’être aimé par des hommes libres, dit Dieu, les prosternements d’esclaves ne vous disent plus rien.

Quand on a vu saint Louis à genoux, on n’a plus envie de voir ces esclaves d’Orient couchés par terre…

Etre aimé librement, rien ne pèse ce poids, rien ne pèse ce prix…

Quand on a une fois goûté d’être aimé librement, tout le reste n’est plus que soumissions…

Quand saint Louis m’aime, dit Dieu, je sais qu’il m’aime.

Au moins je sais qu’il m’aime, celui-là…

Et quand il dit qu’il aimerait mieux être lépreux que de tomber en péché mortel, je sais que c’est vrai…

Il ne dit pas çà pour que çà fasse bien…parce qu’il a vu çà dans les livres. Il dit cela parce que çà est. Il m’aime à ce point. Il m’aime ainsi. Librement. » (p 716-717)

C’est vrai que cette liberté n’est pas facile à apprendre aux enfants : pourtant, quand Dieu nous appelle à la foi, il nous laisse toujours libres de la réponse, de la décision de nous engager.

Jésus nous dit « C’est l’Esprit qui fait vivre »,oui c’est l’Esprit Saint qui nous fait découvrir le « maintenant » de cette décision.

Il nous rappelle les paroles de Jésus. Il nous donne la pleine liberté du présent et nous ouvre à l’avenir, à l’espérance d’une fidélité créatrice.

Homélie du 18 août 2024 — 20e dim. ordinaire — Frère Jean-Louis
Cycle : Année B
Info :

Année B - 20e dimanche ordinaire - (18/08/2024)

(Pr 9, 1-6 ; 2, 23-24 – Ps 33 – Ep 5, 15-20 – Jn 6, 51-58)

Homélie du Frère Jean-Louis

Texte :

Frères et sœurs,

Au cœur du mois d’août, les lectures de ce dimanche nous parlent de sagesse, de repas, de nourriture. Mais comme souvent, les lectures de la messe nous emmènent sur des chemins qui peuvent être inattendus.

Ainsi, dans la première lecture, la Sagesse de Dieu est personnifiée sous les traits d’une maîtresse de maison qui envoie ses servantes pour inviter à son festin. On y retrouve une image que le Christ prendra volontiers pour parler du Royaume des cieux, il s’agira alors d’un maître de maison qui envoie ses serviteurs.

Si nous regardons le texte de près, nous pouvons être légitimement surpris car les personnes que la Sagesse invite à son festin, sont des étourdis, des gens qui manquent de bon sens, des gens sans intelligence. Etonnant, la Sagesse de Dieu invite des personnes qui sont à l’opposé d’elle-même. Et qui plus est, le festin préparé, et qui est symbolique, vise à quitter le chemin de l’étourderie, à prendre le chemin de l’intelligence. Manger le pain, boire le vin pour devenir sages ! Comme assez souvent dans l’Ancien Testament, la relation de Dieu avec son peuple se scelle par un repas. Souvenons-nous du repas pascal.

Remarquons donc qu’ici, les personnes appelées sont des gens sans mérite, sans sagesse. Ce ne sont pas des gens de qualité mais des gens finalement pas très recommandables selon nos critères. On retrouvera cela aussi chez saint Paul écrivant à la communauté chrétienne de Corinthe : « Frères, vous qui avez été appelés par Dieu, regardez bien parmi vous, il n’y a pas beaucoup de sages aux yeux des hommes, ni de gens puissants ou de haute naissance. Au contraire, ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour couvrir de confusion les sages. »

Le psaume entendu nous rappelle que ce sont les pauvres qui sont en fête et non les riches qui ont tout perdu et ont faim. Et il donne comme condition du bonheur de garder sa langue du mal et ses lèvres des paroles perfides, d’éviter le mal et de poursuivre la paix, de la rechercher. N’est-ce pas là la vraie sagesse ? En tout cas, ce psaume nous rappelle la prédilection de Dieu pour les pauvres. Cela parcourt tout l’Ancien et le Nouveau Testament.

Saint Paul, aujourd’hui, nous parle de notre conduite en y recommandant la sagesse. Tirer parti du temps présent, ne pas être insensé mais comprendre la volonté du Seigneur. Ne pas s’enivrer de vin. Paul est très concret et réaliste. Il s’attache surtout à inviter à la prière par des psaumes, des hymnes des chants inspirés. Nous y retrouvons nos offices liturgiques. Il s’agit, en fait de rendre grâce au Seigneur. Voilà la vraie sagesse.

Quant au Christ, il nous parle d’un repas qui a une toute autre dimension. : manger la chair du Fils de l’homme et boire son Sang. Le saut est tellement immense que ses contemporains ne peuvent le comprendre. Et était-ce compréhensible avant la mort et la résurrection du Christ ? N’est-ce pas sa passion et sa mort, annoncées dans le dernier repas de la Cène (encore un repas), qui ont donné la clé pour comprendre ces paroles obscures et inacceptables pour un juif contemporain de Jésus ?

Mais la sagesse de Dieu est folie pour les hommes et il faudra le mystère pascal de la mort et de la résurrection du Christ pour faire comprendre que la Cène qui accomplit la Pâque juive nous fait passer de l’image de la libération des Hébreux de l’esclavage d’Egypte à notre libération de la souffrance et de la mort par la résurrection du Christ. Certes, mort et souffrance sont toujours présentes dans nos vies, mais elles n’ont plus cet aspect définitif qui ôte tout espoir. Le mal n’aura pas le dernier mot.

La chair du Christ et son sang sont vraie nourriture et vraie boisson en ce sens qu’elles donnent la vraie vie, c’est-à-dire la vie par le Christ.

Frères et sœurs, les lectures de ce jour peuvent nous dire beaucoup sur Dieu, sur le Christ, si nous les accueillons dans la foi et la confiance, ce qui n’est pas toujours facile, surtout si notre vie connaît des périodes de turbulence.

Dieu n’attend pas que nous soyons sages pour nous inviter à la sagesse. Nous l’avons entendu dans la première lecture, la Sagesse de Dieu invite des gens qui sont tout sauf sages pour les faire cheminer vers la sagesse. Nous le savons si nous connaissons un peu les évangiles : le Christ a la réputation de côtoyer les pécheurs, les femmes de mauvaise vie, les collecteurs d’impôts. Et, du temps de saint Paul, la communauté de Corinthe ne sera pas réputée pour la sagesse et la bonne tenue de ses membres. Là nous est dit quelque chose d’essentiel sur Dieu si nous nous percevons comme fragiles, pécheurs, pas à la hauteur des exigences de l’évangile, tout est possible avec Dieu et sa grâce et bien plus, c’est vers nous qu’il se tourne de façon préférentielle. Mais si nous nous estimons parfaits, vertueux, si nous comptons sur nos propres forces, avons-nous encore besoin de Dieu ?

Saint Paul nous signale cependant qu’être invités par Dieu, par le Christ, cela ne signifie pas ne rien avoir à faire, car il nous rappelle fermement la nécessité de comprendre quelle est la volonté du Seigneur. Cela implique de prendre le temps d’un retour sur soi, de descendre en nous-mêmes pour y rencontrer le Christ. A nous de nous libérer dans un emploi du temps parfois si rempli.

Moyennant cela, dans la foi, sachons nous rappeler que la chair du Christ, reçue dans l’eucharistie est vraie nourriture pour avoir la vraie vie, sans oublier que, dans la tradition chrétienne, et notamment dans la tradition monastique, méditer, ruminer la Parole de Dieu est aussi une nourriture pour notre vie spirituelle qui a toute son importance. Laissons-nous une place suffisante dans nos vies à cette nourriture de la Parole de Dieu ? Lui consacrons-nous du temps ? L’eucharistie est le lieu qui unit la Parole et le Pain eucharistique comme nourriture pour notre vie avec le Christ. Sachons rendre grâce pour ce don qui nous est fait, et en faire profiter les autres …

AMEN