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HOMELIE

03 novembre
année 2018-2019

Année C - 31ème dim. du T.O., 3 nov. 2019
Sag 11 23-12 2 ; T Thess 1 11- 2 2; Luc 19 1-10
Homélie du F.Bernard

Seigneur, Tu aimes tout ce qui existe, car Tu n’aurais pas créé un être en ayant de la haine envers lui. Comment aurait-il subsisté, si Tu ne l’avais voulu ? Mais Tu épargnes tous les êtres, parce qu’ils sont à Toi, Maître qui aimes la vie (Sg 11, 23-26).

Ces paroles entendues à l’instant sont tirées du livre de la Sagesse, le livre le plus récent des Écritures, composé seulement 50 ans avant J-C à Alexandrie. Cet ouvrage a pu recueillir tout le trésor de la Révélation biblique, bénéficier également de l’apport de la sagesse grecque. Ces paroles sont d’une largeur de vue assez exceptionnelle. Elles témoignent d’un sens étonnamment juste de Dieu. Comment Dieu pourrait-il en effet avoir de la haine pour l’homme qu’il a créé, créé à son image comme sa ressemblance, et qu’il maintient aujourd’hui dans l’existence ?

Mais la haine existe. Elle a ses racines dans le cœur de l’homme, elle est en lui le fruit du diable. Haine de celui qui est différent de soi, de l’étranger. Mais aussi haine de celui qui est proche, du frère. Les premières pages de la Bible parlent déjà du meurtre d’Abel par Caïn. Haine encore de soi-même. Est-ce si facile de s’aimer, quand on se sent impuissant face à ses défauts, ses échecs ? Peut-être alors le mépris ou la haine de soi est-il tout proche ? Mais laissons cela.

Par contre la haine ne peut exister en Dieu. Dieu est Amour en lui-même. Il ne peut être qu’amour et miséricorde envers sa créature. On pourrait certes objecter que dans l’Écriture nombreux sont les textes qui parlent d’une haine en Dieu, plus encore dans l’homme à cause de Dieu, au nom de Dieu. L’Écclésiaste, le Siracide, ce livre écrit quelque cent ans avant le livre de la Sagesse, déclare : Donne à l’homme pieux, mais ne vient pas en aide au pécheur. Le Très-haut lui-même a les pécheurs en horreur, et aux impies il infligera une punition (Si 12, 4-7). Et ce sentiment attribué à Dieu, répercuté et amplifié dans l’homme, aboutit à ce qu’exprime le psalmiste : Ceux qui se dressent contre Toi, Seigneur, je les hais d’une haine parfaite. Ils sont pour moi des ennemis (Ps 139, 21-22).

Les Juifs contemporains de Jésus savaient bien qu’ils devaient aimer leur prochain. C’était inscrit très clairement au livre du Lévitique : Tu aimeras ton prochain comme toi-même (Lv 19, 18). Mais dans la pratique ils ajoutaient assez spontanément : Et tu haïras ton ennemi (Mt 5,43), l’ennemi étant celui qui n’observait pas la Loi, le pécheur, l’ennemi d’Israël assimilé à l’ennemi de Dieu. Saint Paul parlera même d’un mur de la haine érigé entre Israël et les païens, ce mur de la haine que Jésus a abattu en se laissant condamner par la Loi, faisant ainsi des deux, Israël et les nations, un seul Homme nouveau en son propre Corps (Eph 2, 14-16).

Ce mur de la haine était comme matérialisé au Temple de Jérusalem par le mur qui séparait le parvis d’Israël du parvis des païens. Le franchir si l’on n’était pas Juif, c’était encourir la mort, comme le laisse entendre le livre des Actes.

Alors Jésus est venu enseigner, dans le Sermon sur la montagne, une autre justice surpassant celle des scribes et des pharisiens : Eh bien, moi je vous dis : aimez vos ennemis, priez pour vos persécuteurs, afin de devenir fils de votre Père céleste, qui fait lever son soleil, et donner sa pluie, pour les justes et pour les injustes (Mt 5, 44-45).

Jésus n’est pas venu enseigner seulement en paroles, mais aussi par ses actes. Il aura manifesté sur terre le visage de Dieu, de Dieu qui aime tous les hommes sans exception, surtout ceux qui risquent de se perdre, ou sont considérés comme déjà perdus par les autres, comme ce fils prodigue qui revient à la maison paternelle, déclarant : Père, je ne mérite plus d’être appelé ton enfant ( Lc 15, 19), comme le publicain de l’Évangile de dimanche dernier qui vient prier au Temple et se frapper la poitrine, disant : Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis (Lc 18, 3), plus encore comme le chef de publicains de l’Évangile d’aujourd’hui.

Zachée voulait voir Jésus. Était-ce comme Hérode qui souhaitait assister à quelques miracles ? Je ne le pense pas. Zachée voulait plutôt sans doute rencontrer celui qui pourrait le sortir de sa médiocrité, de son enfermement. Or voici que les regards de Jésus et de Zachée viennent à se croiser. Et Jésus dépasse le désir caché de Zachée, que celui-ci n’aurait peut-être jamais osé formuler : Aujourd’hui il me faut demeurer chez toi. Oui aujourd’hui le salut est arrivé pour cette maison, la maison de Zachée. Ce dernier a reçu son Seigneur avec joie. C’est pour apporter ce salut que Jésus est venu, pour chercher et sauver ce qui était perdu.

Jésus traversait alors la ville de Jéricho. Il venait de guérir l’aveugle né, qui avait entrepris aussitôt de le suivre sur le chemin de Jérusalem. Zachée, restauré maintenant dans sa dignité de fils d’Abraham, peut prendre à son tour la route dans le cortège des pécheurs pardonnés, en route vers le Royaume. Nous aussi, nous faisons partie de ce cortège. Avec les mots de l’oraison de ce jour, demandons au Seigneur de progresser sans que rien nous arrête vers les biens qui nous sont promis.- 3 novembre 2019

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