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Règle de saint Benoît

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COMMENTAIRES
SUR LA REGLE DE SAINT BENOIT

Chapitre 2, Versets 1 à 10
CE QUE DOIT ETRE L'ABBE

1. L'abbé qui est digne de gouverner le monastère, doit toujours se rappeler le titre qu'on lui donne, et vérifier par ses actes le nom du supérieur.

2. Il apparaît en effet comme le représentant du Christ dans le monastère, puisqu'on l'appelle d’un des noms de celui-ci,

3. selon le mot de l'Apôtre : « Vous avez reçu l'esprit d'adoption filiale, dans lequel nous crions : abba, père ! »

4. Aussi l'abbé ne doit-il rien enseigner, instituer ni commander qui soit en-dehors du précepte du Seigneur,

5. mais son commandement et son enseignement s'inséreront dans l'esprit de ses disciples comme un levain de justice divine.

6. L'abbé se rappellera toujours que son enseignement et l'obéissance des disciples, l'une et l'autre chose, feront l'objet d'un examen au terrible jugement de Dieu.

7. Et l'abbé doit savoir que le pasteur portera la responsabilité de tout mécompte que le père de famille constaterait dans ses brebis.

8. En revanche, si le pasteur a mis tout son zèle au service d'un troupeau turbulent et désobéissant, s'il a donné tous ses soins à leurs actions malsaines,

9. leur pasteur sera absous au jugement du Seigneur et il se contentera de dire au Seigneur avec le prophète : « Je n'ai pas caché ta justice dans mon cœur, j'ai dit ta vérité et ton salut. Mais eux s'en sont moqués et ils m'ont méprisé. »

10. Et alors, les brebis qui auront désobéi à ses soins auront enfin pour châtiment la mort triomphante.

Commentaire de Père Abbé Luc

St Benoit emprunte en bonne part ce chapitre de l' abbé au chapitre 2 la Règle du Maitre qui porte le même titre. Il y a cependant des différences. Je note ainsi qu'à la fin de son chapitre 2, le Maitre parle de l'abbé comme de « l'artisan du saint art » (RM 2, 51). Je le cite : « L'abbé sera l'artisan du saint art que nous allons dire. Ce n'est pas à lui-même qu'il attribuera le ministère de cet art, mais au Seigneur, dont la grâce opère en nous toute oeuvre saintement accomplie par nous». Pour le Maitre, l'abbé est ainsi un artisan du saint art. Il exerce le ministère d'enseigner !'art spirituel, art que le chapitre suivant développe, et qui correspond au chapitre 4 de la RB.
Cette image de l'abbé artisan me parait suggestive pour comprendre la place de l'abbé que les moines sont invités à croire et à reconnaitre comme père, comme figure de l'autorité du Christ. Fondamentalement, c'est le Christ qui est Père pour Benoit. Parler de l'abbé comme père dit le sens ultime de sa fonction : permettre à chacun et à tous, de se mettre sous l'autorité du seul Père, le Christ. A côté de la figure du père, la figure de !'artisan dit le serviteur qui remplit des tâches pour que chacun et tous ensemble au monastère vivent selon la volonté de Dieu. L'abbé-père fait signe. L'abbé-artisan fait des choses. L'abbé du monastère est un frère choisi parmi ses frères, pour être à la fois le signe de cette paternité du Christ sous l'autorité duquel on veut vivre, et à la fois il est ce frère qui a la mission précise d'enseigner, mais aussi de corriger, rassembler, entrainer comme nous le verrons plus tard.
Il enseigne. Une des conséquences du titre d'abbé qu'on lui donne, c'est qu'il ne « doit rien enseigner, instituer ni commander qui soit en dehors du précepte du Seigneur, mais son commandement et son enseignement s'insèreront dans l'esprit de ses disciples comme un levain de justice divine ». L'abbé qui enseigne est cet artisan qui est lui-même un instrument au service de la parole divine. S'il ne doit pas s'écarter du précepte du Seigneur, il n'est pas condamné à simplement répéter. Non, il est invité à se laisser lui-même travailler par la Parole de Dieu, par l'enseignement du Christ, afin que ses propres paroles, ses commandements, tout ce qu'il dit soit comme un « ferment de justice divine » dans l'esprit de ses frères. Lourde responsabilité qui ne peut-être que l'oeuvre de la grâce, grâce qui peut faire de la faiblesse des mots ou des gestes d'un homme une lumiere ou une source de vie. Je vous remercie de prier pour moi.